Victor Hugo l’assuré
Samedi 13 septembre 2025 à 07h
Cette semaine, Thierry, de Ménars, soumet à notre expertise un contrat d’assurance signé par Victor Hugo. L’occasion pour Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en dire plus sur l’histoire et la valeur de ce document.

Ce week-end ont lieu les Journées européennes du patrimoine. Instituées en France en 1984, ces journées visent à promouvoir le patrimoine et sa protection, notamment à travers la visite de lieux habituellement fermés au public, afin de mieux les connaître et les préserver. Cependant, la défense du patrimoine est une préoccupation ancienne, et certains grands auteurs se sont engagés très tôt dans la protection des monuments historiques, tels que Prosper Mérimée ou encore Victor Hugo.
C’est justement de ce grand auteur qu’il est question cette semaine, à travers l’objet présenté. Il s’agit d’un contrat d’assurance établi entre la « Compagnie royale d’assurances sur la vie » et le « Vicomte Hugo », le 22 janvier 1840. Ce contrat garantit le versement de la somme de 20 000 francs à ses héritiers au décès de l’assuré, contre une cotisation annuelle de 618 francs, à verser jusqu’à sa mort.
Le principe de l’assurance est une pratique économique très ancienne, qui prend sa forme actuelle aux alentours des XIIe ou XIIIe siècles. À l’origine, le principal risque assuré concernait les pratiques maritimes, notamment les cargaisons en cas de naufrage, mais aussi les risques d’incendie, fréquents en raison des nombreux bâtiments construits en bois. Les travaux de l’Italien Lorenzo Tonti permettent par la suite la création d’un nouveau mécanisme, la tontine : un groupe d’épargnants met en commun une somme d’argent, qui sera allouée au dernier survivant à l’issue d’une période donnée. Cette pratique est d’ailleurs réglementée par un édit du cardinal Mazarin en 1653. Le XVIIIe siècle est une période d’expérimentations économiques, avec la création de plusieurs compagnies d’assurance, comme la « Compagnie d’assurance sur la vie », fondée par Étienne Clavière en 1788. Cette dernière est dissoute dès 1790, à la suite des scandales financiers liés aux faux assignats et à des détournements de fonds. De nouvelles sociétés voient le jour au cours du XIXe siècle, dans un contexte de développement d’une vision plus prévoyante de l’avenir : assurer une subsistance à ses descendants et favoriser la mutualisation des risques. On assiste alors à la naissance de ce que l’on pourrait qualifier de conscience sociale — une notion toujours d’actualité aujourd’hui, à travers les débats autour des successions et de leur fiscalité.
Votre document, Éric, est très intéressant. Toutefois, pour en établir la valeur, il serait nécessaire de pouvoir l’examiner directement. En effet, le titre de « vicomte » peut nous interroger : Victor Hugo ne reçoit ce titre qu’en avril 1845, lorsqu’il est nommé pair de France par le roi Louis-Philippe. Ce détail soulève donc des questions, puisque le document est daté de 1840.
En attendant d’en savoir plus, nous vous invitons à redécouvrir la cathédrale Notre-Dame de Paris, sublimée dans le roman éponyme de Victor Hugo publié en 1831 — un ouvrage qui constitue l’un des actes fondateurs de la conscience patrimoniale française et de la restauration des monuments historiques. N’oubliez pas la pièce de théâtre de Patrick Tudoret : « Juliette, Victor Hugo, mon fol amour », qui sera donnée ce samedi 20 septembre dans les salons du château de Meslay. Il reste encore quelques places.
