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Vous avez quatre heures

Samedi 28 juin 2025 à 07h

Cette semaine, l’une de nos fidèles lectrices soumet une importante garniture de cheminée à l’expertise d’Aymeric Rouillac. L’occasion pour notre commissaire-priseur de nous en dire plus sur l’histoire et la valeur de cette pièce de décoration.



Le dénouement est proche pour les lycéens, qui ont eu l’occasion de plancher sur leurs différentes épreuves communes et de spécialité. Pour beaucoup d’entre eux, ce passage marque le premier examen avant l’entrée dans les études supérieures. Il s’agit aussi des premières épreuves longues, où les secondes égrenées par l’horloge sont à la fois synonymes d’angoisse et de délivrance.

Il est justement question de temps avec l’objet de cette semaine. Il s’agit d’une garniture de cheminée, composée d’une horloge et de deux cassolettes en métal patiné, reposant sur une base en marbre rouge griotte. Les cassolettes présentent un décor ornemental de têtes féminines et de fleurs en applique. La pièce centrale est une pendule à sujet représentant une femme alanguie, vêtue à l’antique. Elle tient un bouquet de fleurs dans une main et un livre dans l’autre, qu’elle appuie sur une borne où se trouve le cadran émaillé blanc rehaussé d’une guirlande de fleurs. Les heures y sont indiquées en chiffres arabes. Enfin, la présence de deux emplacements de remontoir laisse supposer qu’il s’agit d’une pendule à sonnerie.
Ce type de pendule, dite "à sujet", fut particulièrement populaire en France durant la seconde moitié du XIXe siècle. En effet, cette période est marquée par le développement de la classe bourgeoise, qui cherche à meubler les nouveaux appartements construits selon le modèle haussmannien — du nom du baron Haussmann, préfet de la Seine, qui dirigea les grands travaux engagés sous le Second Empire. Le mobilier se veut alors impressionnant, éclectique, et la mode est aux intérieurs richement décorés.

Afin de répondre à une demande croissante, les matériaux utilisés se diversifient. On utilise ainsi des matières nobles comme les bois précieux, l’écaille, le marbre ou le bronze. Toutefois, les progrès de l’industrie permettent aussi de créer des matériaux moins onéreux, imitant ces matières rares et coûteuses, à l’instar du régule — un alliage à base d’étain, d’antimoine et de plomb — qui permet de remplacer le bronze dans les arts décoratifs, rendant ces œuvres accessibles à une clientèle plus large. Cette tendance offre également aux sculpteurs une nouvelle source de revenus, leur permettant de diffuser plus largement leurs créations. Ils puisent leur inspiration dans les siècles passés, cette femme alanguie n’étant pas sans rappeler les compositions du XVIIIe siècle, notamment celles de Boucher.

Probablement réalisée entre 1880 et 1920, votre garniture n’a pas l’élégance ni la finesse de celles réalisées par la famille Moreau ; elle est sans doute l’œuvre de l’un de ses suiveurs. Ses bronzes ne sont pas sans rappeler les productions du sculpteur d’origine suisse Oscar Ruffoni. Son prix dépend du matériau utilisé : au vu de la ciselure et des productions comparables de l’artiste, il est probable qu’il s’agisse de régule. On pourrait donc estimer sa valeur entre 60 et 80 euros. De quoi offrir une jolie surprise à un futur bachelier pour le récompenser de ses efforts tout au long de l’année !
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