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Un Napoléon en guise de fève !

Samedi 06 janvier 2024 à 07h

Cette semaine, Nicole soumet à l’expertise de Philippe Rouillac une pièce en or napoléonienne de 40 lires datant de 1812. L’occasion pour notre commissaire-priseur de nous parler de numismatique.



« J’aime la galette avec une pièce dedans ». L’Épiphanie, qui célèbre la venue des Rois mages des quatre coins d’Orient, est restée pour nous un temps de partage et de gourmandise. Héritée des saturnales romaines, fêtes célébrées pendant l’Antiquité lors du solstice d’hiver, elle nous offre l’occasion de partager une délicieuse galette, ronde, dorée et beurrée, avec l’espoir de tomber sur une jolie fève ou parfois une belle pièce d’or. Mettons que nous tombions sur la pièce de Nicole, que nous dirait-elle ? Napoléon Bonaparte est alors Empereur des Français depuis 1804 et roi d’Italie depuis 1805. Il s’est couronné lui-même à Milan, en compagnie de Joséphine, en prononçant ses mots : « Dieu me l’a donnée, gare à qui la touche ». Il met ainsi fin à la République en unifiant des principautés divisées : Lombardie, Vénétie et Dalmatie. En 1808 les états Pontificaux sont intégrés au Royaume d’Italie, composé de 24 départements. De retour en France, Napoléon nomme le fils de Joséphine, Eugène de Beauharnais, vice-roi d’Italie.

Cette pièce de 40 lires, en or jaune 900 millièmes, de 26 millimètres de diamètre et d’un poids de 12,88 grammes, est indexée au franc. En circulation depuis 1803 sous le contrôle de la Banque de France nouvellement créée, le Franc et ses monnaies satellites permettaient de faciliter les échanges dans l’Empire. Faisant partie des « napoléonides », c’est à dire des monnaies à l’effigie de Napoléon, l’avers de la pièce représente le profil gauche du roi, la tête nue, encadrée par l’inscription « Napoleone Imperatore e re / Napoléon empereur et roi ». En-dessous, la date « 1812 » indique son millésime de frappe. Cette date marque un tournant pour l’Empire avec le début, en juin, de la campagne de Russie et la mobilisation de plusieurs contingents italiens. Le « M », en dessous de la date, indique que cette monnaie a été frappée dans l’atelier de Milan, ce que confirme le symbole de la grenade en bas à gauche de la date. A droite de la date, on retrouve le différent, c’est-à-dire la marque du graveur général, Luigi Manfredini (1771-1840), symbolisée par une coupe sur piédouche renversée. Au revers, on lit, en principe, un écu écartelé en cinq quartiers avec les armes des États du Pape, de Milan, de Venise, de Ligurie et de Savoie Sardaigne, entouré du collier de la légion d’honneur et de l’inscription « Royaume d’Italie ». Il est soutenu par une aigle sur laquelle repose la couronne de fer, couronne-reliquaire réputée forgée avec l’un des clous de la Passion, qui constitue l’un des principaux emblèmes de la royauté italienne. Cette couronne est un symbole important, repris par l’Ordre de la couronne de fer pour honorer les serviteurs du royaume, puis par les empereurs d’Autriche en 1814. Cette monnaie reste en circulation treize années en Italie, même pendant la domination autrichienne après la chute de l’Empire, et jusqu’en 1827.

Si cette pièce semble en parfait état de conservation, de nombreuses pièces à l’effigie du roi furent au contraire rayées en réaction à la fin de la présence française, un acte courant dans l’Histoire des États. Pour évaluer cette pièce nous étudions sa valeur, la qualité de sa frappe et de sa conservation, son ancienneté, sa rareté et l’atelier monétaire dont elle est issue. Frappée à 55.547 exemplaires, cette pièce de 40 lires peut être estimée entre 500 et 600 euros aux enchères : une jolie somme pour ce témoin de l’Histoire ! S’il vous échappait, vous pouvez toujours aller voir « Napoléon » au cinéma, le dernier film de Ridley Scott, et frissonner devant la reconstitution de la bataille d’Austerlitz !
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