En attendant les 12 coups de minuit
Samedi 30 décembre 2023 à 07h
Cette semaine, Patrick soumet à notre expertise une imposante pendule. L’occasion pour Aymeric Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en conter l’histoire et de nous en informer quant à sa valeur.
« Les deux guerriers les plus puissants sont la patience et le temps. ». Par ces mots, tirés de La Guerre et la Paix, Léon Tolstoï nous rappelle le caractère fuyant du temps, illustré par la maxime latine tempus fugit. Faute de pouvoir le contrôler, l’humanité s’est mise à développer des systèmes pour le mesurer afin de s’en servir pour réguler la vie sociale.
Les premiers systèmes de mesure du temps furent basés sur la course du soleil avec le cadran ou l’écoulement de substances avec la clepsydre avec l’eau, et le sablier. Pour répondre aux besoins liturgiques et déterminer l’heure des offices, différentes innovations techniques seront faites au cours des siècles. Celles-ci viseront à améliorer la précision et la régularité des horloges notamment pour la perte de temps. Il est ainsi possible de penser à la mise au point de l’horloge mécanique fonctionnant grâce à la chute de poids et de contrepoids permettant l’action de rouages qui commandaient les mouvements de l’horloge. Une autre évolution majeure fut la mise au point du pendule par Huygens, un mathématicien hollandais, au cours du XVIIe siècle. Le développement des horloges électroniques, puis celles dites à quartz, encore utilisées aujourd’hui constitue une dernière étape permettant ainsi à tous de s’offrir des horloges précises.
Les horloges furent pendant longtemps des objets de prestige et d’apparat réservés à une catégorie sociale fortunée. Elles furent l’objet d’un important décor dès le moment où la miniaturisation des mécanismes permit de les placer dans les intérieurs. Elles sont alors ornées de sculptures, de bronzes dorés ou encore de matières raffinées telles que le marbre, la porcelaine ou les pierres dures.
La période phare pour les horloges-sculptures fut le XIXe siècle qui connut différentes innovations telle que l’amélioration de la technique de la fonte au sable permettant de nombreux tirages à partir d’un même modèle. La seconde innovation fut le développement du régule - alliage de plomb et d’étain - offrant la possibilité de remplacer le bronze à un coût nettement moindre. En conséquence, les tirages pouvaient être abondants, et dans différentes matières, en fonction des moyens du public visé.
Votre horloge Patrick, s’inscrit dans cette veine de l’objet d’art extrêmement décoratif et impressionnant, alliant une horloge au cadran émaillé blanc avec une base en marbre rouge griotte, des ornements de métal doré et des colonnes colorées en émaux cloisonnés. La sculpture de l’horloge de près de 70 cm. titrée « le Réveil de Zéphir », est signée par Emile Bruchon (1806-1895). Classé dans la catégorie des « artistes décoratifs de la Belle Époque », il fut un élève de Mathurin Moreau, et exposa au Salon de 1880. Sa production se compose de statuettes en bronze ou en régule dans des thèmes académiques notamment des allégories et des sujets mythologiques. La partie abimée de la sculpture présente de reflets argentés caractéristiques des œuvres en régule. Surtout pas de nettoyage, les conséquences en seraient désastreuses !
En l’absence de vérification de visu, il est difficile de savoir si votre horloge est en état de fonctionnement ce qui constituerait un plus. Toutefois, différents éléments diminuent sa valeur, notamment son état puisque l’on constate plusieurs manques au niveau du marbre, et de la sculpture, ainsi que la restauration grossière au bras. De plus, les œuvres en régule sont de moins en moins recherchées et prisées. En conséquence, il nous apparait raisonnable de proposer une estimation autour de 50 euros maximum. Une somme certes modeste, mais, elle permettra de vous offrir le champagne pour le passage à la nouvelle année. Avec ce dernier trésor, nous vous adressons tous nos vœux de bonheur et de prospérité pour la nouvelle année 2024 !