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Un coffret reliquaire pour Pâques

Samedi 08 avril 2023 à 07h

En cette fin de semaine Sainte, Fabrice, de Tours, soumet à notre expertise un petit coffret reliquaire. L’occasion pour Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en dire plus sur l’histoire et la valeur de cet objet.



Le coffret de Fabrice est orné de multiples symboles et personnages chrétiens. On peut y voir Dieu, la Vierge Marie, ainsi que de nombreuses représentations de Jésus. Parmi celles-ci, des scènes font référence à la période de Pâques. Tout d’abord, la crucifixion du Christ. Le Nouveau Testament indique que Jésus a été condamné au supplice par Ponce Pilate sous la pression des responsables religieux de Jérusalem, qui voyaient en cet « agitateur public » un danger. Après avoir porté sa croix, Jésus est crucifié le Vendredi Saint. Il reviendra du Royaume des morts le dimanche de Pâques. La présence sur le reliquaire d’un agneau est intéressante. La symbolique de l’agneau pascal est très ancienne, puisqu’elle date du sacrifice demandé par Dieu à Moïse. Dans l’Ancien Testament, le sang d’agneau sur les portes des familles juives leur permet d’échapper à l’une des dix plaies d’Égypte, à savoir la mort subite des nouveau-nés. Depuis, dans la tradition juive, les familles sacrifient un agneau lors de la fête de Pessah. Les chrétiens, notamment les catholiques, se sont emparés du symbole et le gigot d’agneau est le plat traditionnel des tables pascales. Le dimanche de Pâques est calculé de la même façon depuis le 4e siècle, sous le règne de l’empereur Constantin : «Pâques est le dimanche qui suit le 14e jour de la Lune qui atteint cet âge le 21 mars ou immédiatement après.» Au-delà de la signification religieuse stricto sensu, la symbolique du passage de la mort à la vie en cette période printanière, où la nature se réveille doucement après le rude hiver, explique également le succès de la tradition pascale.

Le reliquaire, traditionnellement utilisé pour recueillir les restes des Saints, est un objet très courant tout au long du Moyen-Âge. La présence de reliquaires dans l’Europe entière va contribuer à développer un art à part entière. Les matériaux utilisés sont aussi diverses que la fortune de leur commanditaires : bois, or, argent ou émaux, certaines créations sont spectaculaires, comme la très célèbre châsse de Saint-Thomas Becket, datant du début du XIIIe siècle et entièrement recouverte d’émaux de Limoges d’une finesse exceptionnelle. Si le reliquaire peut prendre plusieurs formes, notamment celle du visage du Saint en question, il est le plus souvent présenté, à la manière de l’objet de Fabrice, comme un coffret reprenant les bases architecturales d’une maison sur quatre pieds.

Si le coffret de Fabrice ressemble beaucoup à une création typique du XIIIe siècle, il n’en est pourtant rien ! C’est une imitation du Moyen-Âge, dans le plus pur style néo-gothique du XIXe siècle. Le néo-gothique est un retour au forme et à la symbolique de la fin du Moyen-Âge et du début de la Renaissance. Style né en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle, il connait ses heures de gloire en France sous l’impulsion de l’inévitable Viollet-le-Duc, restaurateur de Notre-Dame de Paris et bâtisseur de Pierrefonds. Le coffret de Fabrice n’est pas, comme aux grandes heures de la dévotion aux Saints, en or ou en émaux fins, mais en bronze. De dimensions modestes (15x16x8 cm), cet objet a toutefois de belles qualités décoratives. Si sa valeur historique est minime, le reliquaire de Fabrice pourrait cependant trouver amateur aux enchères aux alentours de 100 euros. Une somme bien raisonnable pour ce petit témoin religieux et stylistique de notre Histoire, qui illuminera encore davantage un weekend pascal qui s’annonce radieux !
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