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Gentleman Chasseur

Samedi 26 septembre 2015

Un fidèle lecteur fait parvenir cette semaine à Maître Philippe Rouillac les photographies « d’un petit fusil » dont il souhaite connaître la valeur.

Demain matin, les coups de fusil résonneront à nouveau dans nos campagnes. C’est l’ouverture générale de la chasse, après 6 mois de trêve permettant au gibier de se reproduire et de grandir. Ainsi, ce seront plus d’un million deux cent mille chasseurs qui épauleront à nouveau leur fusil, record d’Europe ! C’est le second sport le plus pratiqué dans notre pays après le football. La France, notamment de par la diversité de ses territoires, mais aussi grâce à la richesse de sa faune, a toujours été un grand pays de chasse ; ou plutôt de chasses : à tir, à courre, au vol, à l’arc…

Mais du Moyen-Âge à la Révolution de 1789, la chasse est réservée à la noblesse, pratique intimement liée à un style de vie et à une démonstration de pouvoir. Les braconniers prenaient de gros risques : amende et fouet à la première incartade, fouet et bannissement à la première récidive, galères et confiscation des biens à la seconde, peine de mort (jusqu’en 1669) pour la troisième. À de rares exceptions, nos rois ont tous nourri une véritable passion pour cette distraction qui leur permet de fuir la lourde atmosphère de la Cour. Parmi eux, c’est peut-être Louis XVI le plus passionné. Nombre d’anecdotes nous sont parvenues, décrivant un souverain bien différent de celui que l’on connaît. En chasse intime, le Roi se fait presque rustre. Emporté, querelleur, parfois violent, ce loisir est pour lui un véritable exutoire. Il chasse presque tous les jours et tient soigneusement un journal dans lequel il résume sa journée en une ligne. Au 14 juillet 1789, on peut lire « Rien ». D’aucuns ont conclu à un détachement total du monarque vis-à-vis des évènements révolutionnaires. C’est faux.Simplement, ce jour-là, pas le moindre gibier n’était tombé dans la gibecière de l’équipage royal. Après la Révolution, tout propriétaire peut librement chasser sur ses terres, toute l’année et sans se soucier de ce advient des populations animales... Au cours du XIXe siècle, la chasse se démocratise et, de fait, se voit encadrer légalement.

Les évolutions techniques rendent sa pratique plus aisée, le fusil de notre lecteur, à percussion, en est un bon exemple. Ce système né vers 1820 n’est évidemment pas aussi confortable que celui utilisé aujourd’hui. On commence par verser de la poudre dans les canons. Ensuite on y insère une bourre (souvent du papier), puis la munition et… PAN ! Cette arme possède deux canons juxtaposés en acier sous lesquels est glissée la baguette servant à les bourrer. La pièce qui recèle et protège le mécanisme, la platine, est elle aussi en acier et reçoit un décor gravé de rinceaux. Admirez les éléments en laiton – fort bien astiqués - que l’on nomme garnitures : pontet et plaque de couche. On utilise beaucoup le laiton dans la marine car le sel ne le ronge pas comme le fer. Sur terre, c’est une coquetterie, et un signe de qualité. Autre signe de fabrication soignée : la crosse de noyer finement sculptée d’une tête de lion incrustée d’yeux en verre rouge. Nous sommes ici face à l’arme d’un chasseur de goût !

Elle date de la seconde moitié du XIXe siècle. Mesurant 92 cm, elle est de taille plutôt modeste. Malheureusement, nous ne pouvons retrouver son fournisseur, aucun marquage n’étant présent. Son propriétaire actuel en a pris grand soin.Elle est propre et bien lustrée. Malheureusement les canons ont subi les affres du temps et sont piqués, ce qui est fort dommageable. Néanmoins, comptez sur une estimation autour de 200 €.

En revanche, pas question de taquiner le gibier avec cet hiver ! Elle ne peut plus servir !
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