FR
EN

Leçon de géographie

Samedi 05 septembre 2015

Cette semaine, Sylvie, de Vendôme, interroge Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, afin de connaître la valeur d’un atlas datant de la fin du XIXe siècle.

En cette semaine de rentrée scolaire, cette rubrique se doit d’être studieuse ! Au programme : géographie du Monde avec cette édition de 1881 de l’atlas du docteur Heinrich Kiepert. Rappelons qu’un atlas est un recueil de cartes géographiques et/ou de tableaux thématiques divers. Il tire son nom d’un Titan de la mythologie grecque condamné par Zeus à soutenir la voûte céleste après s’être révolté. Le premier recueil de cartes à être baptisé ainsi est publié au XVIe siècle, soit trois cent ans avant le nôtre, dont la première édition date de 1860. Publié par l’Institut Géographique de Weimar, dont Kiepert est membre, il se compose de 45 cartes en couleur couvrant avec précision l’ensemble du planisphère, toutes terres (ou presque) étant à l’époque connues. Certaines sont assez générales, à l’image de celle de l’Australie, tandis que d’autres montrent « en gros plan » de petits pays ou régions. Carte allemande oblige, la préférence est donnée aux états germaniques. Vous pourrez ainsi tout savoir sur la géographie d’anciens royaumes aujourd’hui disparus comme la Prusse ou encore de l’Empire Austro-Hongrois. Observez également l’Afrique : la conférence de Berlin, tenue en 1885, n’a pas encore « découpé » le continent entre les grandes puissances coloniales. Cet ouvrage est l’héritier d’une longue conquête de la nécessaire connaissance de l’aspect de la Terre.

Ce que les archéologues pensent être les premières cartes sont visibles sur les parois de certaines grottes préhistoriques. Elles figurent l’environnement direct autour de l’habitation. En Mésopotamie, avant même l’invention de l’écriture vers 3 000 av. J-C., on utilise des tablettes d’argiles sur lesquelles est gravé un itinéraire. À l’image de la tablette sur laquelle il figure, on suppose alors que la Terre est plate.
Il faut attendre les Grecs et leurs intellectuels de génie à l’image de Thalès, Pythagore ou encore Aristote, pour que la rotondité de la Terre soit supposée et confirmée. Pour l’anecdote, Ptolémée, astronome et géographe d’Alexandrie, propose au IIe siècle une projection du globe avec latitudes et longitudes. Carte fort précieuse qu’utilisent encore les grands navigateurs de la Renaissance. Le seul hic est que ses calculs sont inexacts… Ils vont amener Christophe Colomb à penser que la route des Indes est plus courte par l’Ouest !

Au Moyen-Âge, l’Église privilégie une vision biblique du Monde et rejette nombre de principes scientifiques posés sous l’Antiquité, comme la sphéricité de la Terre. Pendant ce temps, le Monde arabe poursuit les travaux cartographiques.Au XIIe siècle, la carte que dresse Al-Idrisi est la somme des connaissances en la matière. Au XIIIe siècle, la généralisation de l’emploi de la boussole et de l’astrolabe permet d’établir des cartes marines de plus en plus exactes. Cartes précieuses pour les Vasco de Gama, Magellan et autres Colomb qui, lors des Grandes Découvertes, fin XVe, début XVIe, repoussent sans commune mesure les connaissances géographiques du Monde. À la fin du XVIe siècle, la Terre est représentée sous sa forme et ses proportions réelles.
Au siècle suivant, les cartographes ne sont plus des explorateurs mais des mathématiciens et géographes. Les néerlandais sont de loin les plus talentueux.Et leurs imprimeries performantes font que le Monde est noyé sous les cartes hollandaises. Affront pour la France qui crée sous Louis XIV le corps des ingénieurs-géographes afin de servir l’Art de la guerre et contrer le monopole flamand. Une carte de France de la plus grande précision est dressée par les Français Cassini père et fils à la fin du XVIIIe siècle ; elle sera la référence du siècle suivant. LeXIXe siècle édite des cartes toujours plus exactes mais aussi thématiques. La suite nous est connue, la photographie aérienne, puis satellite qui ne laisse plus de place à l’approximation. Aujourd’hui, les cartes papier disparaissent au profit du GPS sans lequel nombre d’entre nous ne serait jamais arrivé à bon port cet été…

Inutile donc d’emporter l’atlas de Kiepert dans votre voiture…Destiné au grand public, ses trois éditions, de 1860 à 1889, sont imprimées à des milliers d’exemplaires. Il n’a donc aucun caractère de rareté. De plus, la reliure de l’exemplaire de Sylvie est en mauvais état. Comptez ainsi une dizaine d’euros en brocante.
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :