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Promenons nous dans les bois …

Samedi 14 octobre 2023 à 07h

Cette semaine, Bruno se questionne sur des champignons rouges en plastique. L’occasion pour Aymeric Rouillac, notre commissaire-priseur, d’en dire plus sur l’histoire et la valeur de cet objet.



Ah l’automne... Saison qui oscille en permanence entre mélancolie et romantisme, le feu et l’or parant les arbres de leurs plus beaux atours. Mais aussi paradis des amateurs de champignons ! Les gourmands se pressent en forêt pour remplir leur panier de cèpes, girolles, trompettes de la mort ou coulemelles... Quel régal ! Mais gare à l’imprudent qui, dans sa besace, placerait un champignon non-comestible, voire vénéneux, car le festin peut très vite virer au drame. Les sous-bois français regorgent d’espèces de champignons pouvant causer une intoxication et parfois même entrainer la mort. Chaque année, en France, ce sont plus de 10 000 intoxications dont au moins trois mortelles qui sont recensées. Le problème de l’empoisonnement ne date cependant pas d’hier, puisque Pline l’Ancien faisait déjà mention, dans ses écrits, de sa tristesse à l’annonce de la mort du philosophe stoïcien et mathématicien respecté Sérénus suite à l’ingestion de champignons. Qui plus est, le monde des champignons est bien trompeur. En effet, certains spécimens présentent de belles couleurs vives qui attirent l’œil, mais sont aussi synonymes de danger, comme votre russule émétique, Bruno, qui peut provoquer des troubles et des vomissements.

C’est pour cela que depuis des millénaires, l’humanité se transmet de génération en génération le savoir sur les aliments propres ou non à la consommation. Aux encyclopédies et dictionnaires se sont ajoutés d’autres outils pédagogiques permettant au grand public de bien connaître la nature, ses merveilles et ses dangers. En 1831, Achille Deyrolle fonde à Paris un commerce de sciences naturelles. La société française du début du XIXe siècle se passionne pour l’histoire de l’évolution et les mystères du vivant. Les muséums d’histoire naturelle garnissent leurs collections d’animaux naturalisés, de fossiles et d’ostéologie. De grandes dynasties de taxidermistes voient alors le jour pour fournir ces institutions. La maison Deyrolle prospère avec Émile, fils d’Achille, et existe toujours aujourd’hui dans le 7e arrondissement de Paris. Véritable institution, Deyrolle est aujourd’hui autant un musée, un cabinet de curiosité qu’une boutique de sciences naturelles. Cependant, on peut y acheter des animaux empaillés ou encore des livres ou du matériel pédagogique. Émile Deyrolle avait fait de l’éducation par l’image un cheval de bataille. Il était persuadé que la reproduction du vivant, si elle est « rigoureusement exacte » selon ses dires, est bien plus efficace que la lecture seule.

Et votre groupe de champignons, Bruno, semble bien provenir de chez Deyrolle. Des étiquettes similaires ont été utilisées par cette maison pour légender les champignons, même si la vôtre semble avoir été coupée au niveau de la signature « Eurosap-Deyrolle ». Dans le courant des années 1960, la maison Deyrolle utilise de nouvelles matières, comme le plastique et le caoutchouc pour ses créations. Cela permet de limiter les coûts de production et donc de proposer des produits bon marché. Ce qui explique pourquoi votre objet, Bruno, pourrait trouver amateur aux enchères aux alentours de 40 euros. Une somme raisonnable pour profiter des couleurs et des délices de l’automne en toute sécurité !
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