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Papa, ça pique !

Vendredi 17 juin 2016

Cette semaine, Fabien, de Blois, écrit à Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, pour lui partager une trouvaille : une boîte à affûter les lames de rasoir.

Cette semaine, Fabien, de Blois, écrit à Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, pour lui partager une trouvaille : une boîte à affûter les lames de rasoir.

La barbe, un sujet qui déchaîne les passions depuis des millénaires. Mode, hygiénisme, coutumes et croyances l’ont tantôt imposée, tantôt proscrite. De nos jours, entre les hipsters au collier fourni et les « négligés-chics » et leur barbe de trois jours sur le visage, on n’a probablement pas croisé autant de barbus depuis un siècle ! Pour des questions de propreté, ils auraient été mis au ban de la société en Égypte Antique. En revanche, rien de tel pour passer pour un homme sage et viril en Grèce. Au Moyen-Âge, c’est globalement l’inverse, hormis quelques exceptions. À Venise, au début du XIIe siècle tout hipster aurait terminé au pilori, ordre du Doge ! Tout change à la Renaissance lorsque le Pape Jules II(1453-1513) relance la mode de la barbe, alors interdite aux clercs de l’Église depuis des siècles. Et tous les souverains s’y mettent ! Citons François Ier, Henri VIII ou encore Charles Quint. Notre dernier Roi barbu est Henri IV. Après lui, seule la moustache, puis le visage glabre prévalent, et ce jusqu’au XIXe siècle. La barbe est alors quasi-incontournable, sauf pour les ecclésiastiques et les domestiques qui ont interdiction de l’arborer. On affiche alors son rang et ses opinions sur le visage : longue et fournie pour les socialistes, favoris pour les libéraux, impériale pour les bonapartistes.

Tout cela est fort bien mais encore faut-il avoir les ustensiles pour la tailler ! D’aucuns prétendent que Cro-Magnon se rasait déjà de près à l’aide de silex tranchants. La métallurgie Antique rend tout de même les choses plus aisées grâce à des rasoirs en bronze, voire même en or ! Le fameux coupe-chou, dont la lame se replie dans le manche, apparaît au XVIe siècle. Moment de détente, ces messieurs allaient chez le barbier-chirurgien. Une dénomination qui n’a rien de rassurant, d’autant plus que les conditions sanitaires de ces lieux laissent souvent à désirer… C’est pourquoi, dès la findu XVIIIe, un Français invente un rasoir dit « de sûreté » (avec lequel les possibilités de se blesser sont moindres), et incite tout un chacun à se raser lui-même, chez lui ! De nombreuses tentatives eurent plus ou moins de succès jusqu’à la fin du XIXe siècle. Le rasoir « GEM »inventé en 1880, met tout le monde d’accord. La boîte de notre lecteur date de cette époque et servait probablement à affûter la lame d’un rasoir GEM. En acier nickelé, elle répond aux critères hygiénistes de l’époque. Détail charmant : la poignée de la manivelle entraînant les deux cylindres d’affûtage est en bois tourné. Vingt ans plus tard, Gilette lance ses lames jetables qui annoncent le déclin des lames affûtables, et donc des boîtes à affûter…

Pour cet objet insolite et amusant comptez une vingtaine d’euros en brocante.

Un chic cadeau pour la fête des pères !

L’encrier de notre lecteur est donc l’exemple parfait d’un objet encore indispensable il y a moins de cent ans et parfaitement inutile aujourd’hui ! En bon état, comptez une centaine d’euros pour ses qualités esthétiques. Poser-le sur votre bureau et rangez donc vos « Bic » dans la cuvette, Hippocrate ne vous en voudra pas !
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