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Cavalcade africaine

Samedi 04 juin 2016

Cette semaine, Françoise de Saint Aignan présente au commissaire-priseur Aymeric Rouillac un cavalier en bronze et l’emmène vers les lointaines contrées d’Afrique.

Cette semaine, Françoise de Saint Aignan présente au commissaire-priseur Aymeric Rouillac un cavalier en bronze et l’emmène vers les lointaines contrées d’Afrique.

Les arts d’Afrique ont longtemps été qualifiés d’« arts primitifs » ou d’« art nègre », les reléguant à une catégorie jugée inférieure à celle de la production artistique occidentale. Fort heureusement, depuis quelques dizaines d’années, la tendances inverse et les objets réalisés sur le continent africain sont désormais estimés à la hauteur de leur richesse ethnologique, esthétique et historique. Parmi les matériaux privilégiés par les artisans africains, comptent le bois, l’ivoire mais également le bronze. C’est le bronze ou le laiton qu’a choisi l’artisan qui a fondu la statuette de Françoise . Il est probablement issu du peuple Mossi au Burkina Faso, en Afrique de l’ouest. Cette communauté est célèbre pour son armée de cavaliers qui a réussi à maintenir l’indépendance de ses différents royaumes depuis le XIe siècle jusqu’à la colonisation française à la fin du XIXe siècle. Comme dans de nombreuses sociétés africaines, seules deux castes de nobles étaient autorisées à exercer les métiers de l’artisanat, les Nabissi et les Nakomsé. La société était en effet hautement hiérarchisée et la plupart des créations artistiques étaient destinées au roi. Or quel symbole royal plus puissant que le cheval pouvait-on choisir dans cette société ? D’habiles forgerons ont donc réalisé des statuettes de cavalier en bronze. Chevauchant un cheval cabré, celui que possède Françoise tient une lance dans sa main droite et devait probablement tenir les rênes de sa main gauche. Il porte un casque rond et un vêtement d’apparence modeste. Quant à sa fougueuse monture, elle est sans conteste plus richement vêtue que son maître. Société de cavaliers, les Mossis ont développé l’art de la tannerie en parant l’animal de pièces en cuir peint et brodé. On trouve un témoignage de cette richesse décorative sur la statuette avec des motifs de tourbillons et de nattes sur l’encolure, et de vagues sur la selle.

Notre lectrice nous informe que la statuette pèse environ 5 kilos et mesure 55 centimètres de hauteur. Les statues africaines sont fondues selon la technique de la cire perdue. Un noyer d’argile esquissant les traits du modèle désiré est recouvert d’une couche de cire adoptant la silhouette définitive de la pièce, qui est elle-même renfermée dans un moule d’argile. L’ensemble est alors mis au four. La cire s’échappe, laissant une empreinte où coule le bronze en fusion. Une fois durcie, la pièce en bronze est démoulée. Cette technique, également utilisée en Occident, permet une économie de matériau. Sur la pièce qui nous intéresse, le cavalier semble avoir été fondu séparément du cheval, puis assemblé ultérieurement.

Il est difficile d’avancer une datation précise pour les pièces africaines, elles ont rarement plus de cinquante ans. Seuls quelques chefs d’œuvres comme les têtes très réalistes en bronze datant du XIIe au XIVe siècle retrouvées à Ifé (Bénin) ou les plaques en bronze représentant toute la société du Bénin datant du XVe siècle ont quelques centaines d’années. Les musées de Berlin et de Londres présentent le plus grand nombre de pièces, plusde 1 300 bronzes pris lors du sac du Palais Royal en 1897. Seulement cinquante pièces restent au Nigeria… sur environ 2400 objets produits. Le cavalier présenté par notre lectrice date probablement du milieu du XXe. Sa patine et les traces d’assemblage démontrent qu’il est issu d’une fabrication artisanale et pas d’une large production. Pour cette cavalcade africaine, il faudra compter entre 200 et 300 euros eu égard à ses grandes dimensions.
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