29ème VENTE GARDEN PARTY - I
Lot 84
TRAÎNEAU au DRAGON
Terrifiant et fantastique, caracolant, un dragon accroupi aux pattes griffues relève celle antérieure droite, retenant un écu. Il dresse fièrement sa tête aux longues oreilles, crachant une langue de feu fourchue, de sa gueule largement ouverte faisant apparaître de grandes dents. A l'exubérance décorative, son corps entièrement doré, potelé recouvert d'écailles, à petites ailes - se termine par une queue à enroulement gracieux finissant par une pique.
La caisse est gainée de cuir aux clous dorés pour recevoir son participant ; le meneur est assis sur un siège-sellette à l'arrière-train, ses chaussures fixées dans des supports adéquats. Patins, monture et socle en bois rouge, renforcés de pièces métalliques. L'extrémité avant des patins - courbés à l'avant, porte un support de fer destiné au passage des rênes.
Bois sculpté, peint, doré, redoré, polychromie, cuir, métal.
Travail ancien de l'Europe du Nord.
Haut. 1,71, Long. hors tout 2,64, Larg. 0,94 m.
(éclats et accidents, anciennes restaurations).
Provenance : ancienne collection du château de Tronchiennes en Belgique, ancienne propriété de la famille des marquis et prince de Mérode. De la nombreuse famille de Mérode, Maximilien - dont le fils Joachim et le lieutenant colonel Charles Florent, ayant porté également le titre de marquis de Deinze.
D'ou la probabilité des initiales Charles Florent de Deinze : C.F.D. relevé sur le cartouche en écu.
A carved, painted and gilded wood DRAGON SLEDGE. Antique work from northern Europe.
L'ART ARISTOCRATIQUE DES TRAÎNEAUX DE GLACE
Notre exceptionnel et rarissime traîneau d'apparat pour aller sur la glace, conçu pour les promenades sur les pièces d'eau gelées et les allées enneigées des parcs. Grande fantaisie décorative de ces traîneaux, allant jusqu'à adopter le corps de certains animaux faisant ainsi glisser dragon comme le nôtre, et pour d'autres chimères, léopards, hippocampes, aigles, biches et même tortues...
Cette esthétique est bien sûr à rapprocher de la mythologie du char antique et présente de grandes analogies avec les projets connus d'embarcation pour naviguer sur le Grand Canal à Versailles.
Le Mercure de France de février 1729 (1) et différents mémorialistes se firent l'écho de courses effrénées dès que les hivers rigoureux autorisaient un déplacement en traîneau. Splendeur de ces évènements ! Le Marquis de Beringhen, premier Ecuyer du Roi, marchait à la tête sur un grand traîneau tiré par quatre chevaux pour frayer le chemin
Sa Majesté suivait immédiatement sur un magnifique traîneau dont le cheval avait un riche caparaçon bordé de grelots d'argent
La beauté des chevaux qui vont au grand galop, la richesse des harnais et des caparaçons, le bruit des grelots, les étendards de diverses couleurs flottant dans les airs, la magnificence des traîneaux peints et dorés avec beaucoup de goût, de formes agréables et toutes différentes
tout cela joint au son des fanfares.
Le marquis de Dangeau dans ses mémoires, évoque ces moments d'évasion qui faisaient déjà fureur sous Louis XIV. Le mémorialiste raconte qu'un jour où la glace du Grand Canal était trop fine,
le Dauphin fut dans l'eau jusqu'au cou et les princesses renversées. Madame Campan, première femme de chambre de la reine Marie-Antoinette, évoque dans ses mémoires le "bruit des sonnettes
et des grelots dont les harnais des chevaux étaient garnis, lélégance de leurs panaches, la variété des formes de ces espèces de voitures, l'or dont elles étaient toutes rehaussées". Louis XV écrivait ainsi en janvier 1774: "Madame la Dauphine a été une fois seulement en traîneau; vendredi, la neige fondit à son grand regret".
La collection du musée de Compiègne - une des plus importantes d'Europe - recense plus de 25 traîneaux au merveilleux bestiaire. Ceux originaires des Provinces-Unies forment un ensemble important, présentant des formes spécifiques. On distingue ceux avec un aaretikker doté d'une caisse octogonale, ou les traîneaux de type amstellodamois caractérisés par une caisse fortement
galbée. (2)
On répertorie très peu d'iconographie à ce sujet. Il convient cependant de citer Claude Deruet, "l'Eau" - conservé au musée des Beaux-Arts d'Orléans - montrant au XVIIe un paysage de neige sur lequel circulent des traîneaux tirés par un cheval.
Sans oublier l'ouvrage de Georg Engelhard Löhneysen "Della Cavalleria", de 1609 véritable traité encyclopédique d'hippiatrie, comportant notamment de splendides gravures de traîneaux de
glace. (3)
(1) Cité par Saule, 1997, p14-17; Croÿ, 1906-1907, t.1, p.154-155.
(2) Traîneaux palais de Compiègne, http:/palaisdecompiegne.fr/collections/les-traineaux
(3) Paris, Bibliothèque Mazarine.
Estimation : 35 000 € ~ 40 000 €