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Le fauteuil de Bonaparte

Fauteuil Bonaparte 2015
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FÛT DE FAUTEUIL D'APPARAT
En hêtre sculpté et doré, à dossier cannelé renversé orné d'arabesques. Les accotoirs droits, en sceptre égyptien avec un décor de fleurs de lotus, sont terminés par des protomés de lions appliqués, en bronze ou en laiton. Il repose sur deux pieds antérieurs en pilastres, ornés de palmes et feuilles d'acanthe et deux pieds postérieurs sabres, à motifs d'ailes de chauve-souris. La ceinture est ornée toutes faces de fleurettes.

Estampilles "G. IACOB" et "JACOB D RUE MESLEE".
Georges Jacob (1739-1814), reçu maître en 1765 ; il utilise son estampille jusqu'en 1796.
François Honoré Georges Jacob-Desmalter (1770-1841), il utilise cette estampille entre 1803 et 1816.
Deux fois marqué au feu du Garde-Meuble royal et à l'encre du numéro d'inventaire "336".

Époque Consulat.

Haut. 96, Larg. 58, Prof. 53 cm.

Provenance : galerie du palais de l'Élysée, avant 1809.

NAPOLEON BONAPARTE CEREMONIAL CHAIR AT THE PALAIS DE L'ELYSEE BY JACOB. Sculpted and gilded beech wood. Marked G. IACOB and JACOB D RUE MESLEE. Fire marked with the emblem of the Royal Furniture Storage Unit. Period: Consulat. Provenance: Palais de l'Élysée prior to 1809.

PRÉSENTATION TÉLÉVISÉE LE 14 AVRIL 2015


cliquez pour visionner la présentation télévisée sur le plateau de TV Tours

LE FAUTEUIL DE BONAPARTE À L'ÉLYSÉE

Signé de Georges Jacob (Cheny, 1739 - Paris, 1814), notre fauteuil pourrait être un prototype au destin fameux. La première estampille de ce siège n'est plus utilisée par le père de la dynastie d'ébénistes après 1796. Or, le plus ancien témoignage sur ce meuble remonte à 1801 : ses têtes de lion apparaissent en effet sur un dessin de François Gérard, conservé au musée de Versailles. Bonaparte y est assis alors qu'il s'apprête à signer le Concordat, le 15 juillet 1801, au palais des Tuileries. Le modèle est en tout point identique au nôtre, à l'exception des pieds postérieurs, qui sont au modèle des pieds antérieurs.

L'estampille "JACOB FRERES RUE MESLEE", correspondant à l'association des deux fils de Georges Jacob (1796-1803), n'apparaît pas sur ce siège. Ce fauteuil est-il un siège créé par Georges Jacob, père, avant 1796, ou bien l'estampille paternelle a-t-elle aussi servi après 1796 lors de l'association entre ses deux fils ? Le style "Retour d'Égypte" de ce fauteuil, avec ses accotoirs reprenant la forme du sceptre du pharaon Thoutmosis III (Musée du Louvre, inv. E5983), le date clairement de la période du Consulat (1799-1804). La seconde estampille "JACOB D. RUE MESLEE" est apposée lors de la restauration de ce siège, probablement vers 1809, lors de l'association de Georges Jacob et de son fils Jacob Desmalter (1803-1813).

Très apprécié, ce modèle de fauteuil sert ensuite avec quelques variantes : dans la salle à manger de Fontainebleau, pour l'ameublement de la chambre à coucher de Napoléon et du troisième salon de l'Impératrice à Compiègne, ainsi qu'au salon du Conseil à La Malmaison ou dans le salon du Grand Trianon. En 1808, le dessin du pied postérieur de notre fauteuil, attribué à Charles Percier et à Pierre-François-Léonard Fontaine, est repris pour le mobilier de la chambre de Napoléon Ier aux Tuileries. Napoléon pose avec ce type de siège pour Ingres (1804) et pour le baron Gérard (1812). Le fauteuil sert également de modèle pour des portraits de Marie-Louise et du roi de Rome (1813), ou de la reine Hortense et de son fils (1807).

Notre fauteuil apparaît, avec ses protomés de lion, dans l'inventaire du palais de l'Élysée en 1809 (Archives nationales AJ/19/77). Il y est décrit en paire, à la ligne 275, mais les numéros d'inventaire ne sont plus précisés après le 204. Localisé dans la "Galerie", ou "Salon des officiers", il est compté pour 240 francs : "Deux grands fauteuils meublants en bois sculpté et doré, pieds à console, accotoir à rouleaux, le devant en forme de patère, avec tête de lion en cuivre ciselé et doré, dossier à crosse, garni en plein, couverte en (...) encadré d'une crête à jour. (...) Hauteur : 0,96. Largeur : 0,64. Profondeur 0,50 cm." Il est précisé : "Ces deux fauteuils et deux tabourets sont au Garde-meuble". Ces fauteuils, correspondant à la ligne 275 de l'inventaire de l'Élysée, sont absents des inventaires suivants, à cet emplacement, pour les années 1818, 1820 et 1822.

Racheté par Joachim Murat en 1805, le palais de l'Élysée reçoit un lustre incomparable avec notamment des dépenses de menuiserie-ébénisterie s'élevant entre 1805 et 1808 à la somme considérable de 390.000 francs. Quittant la France pour régner sur le trône de Naples en 1808, le palais de l'Élysée devient alors la résidence de l'Empereur, qui n'a de cesse de faire compléter le mobilier sans relâche. Les travaux de menuiserie de Jacob pour l'Élysée sont toujours considérables : ils comprennent tant la fourniture de nouveaux meubles que la remise en état d'anciens meubles, dont... quarante-quatre fauteuils.

Bonaparte, devenu Napoléon Ier, fait livré ainsi à l'Élysée en 1808 ce fauteuil, qui l'accompagne vraisemblablement depuis la période du Consulat. L'ameublement de la "Galerie" en 1809 indique sa fonction d'apparat : 10 rideaux, embrases et patères, 5 draperies, 4 bras à sept lumières, 4 lustres à 16 lumières et 2 demi-lustres à 8 lumières. À ces éléments de décors ne s'ajoutent que 18 sièges : 8 tabourets en bois doré à 90 francs, 6 tabourets "en X" en bois doré pour 120 francs, 2 tabourets "en X" avec des têtes de lion pour 120 francs et nos deux fauteuils en bois doré avec leurs têtes de lion pour 240 francs. Ces deux fauteuils constituent donc le trône de l'Empereur et de l'Impératrice dans la Galerie l'Élysée, autour desquels sont disposés 16 tabourets.

Après la chute de l'Empereur, ces fauteuils sont remisés au Garde-Meubles royal, dont le journal référence en 1817 sous le numéro 336 : "Deux fauteuils en bois sculpté et doré. Péking rayé. Crète à forme (...) (1009)." Ces fauteuils sont comptés pour 100 francs chacun, puis annotés comme présent en "21", en "24" et enfin sortis en "42" (Archives nationales AJ/19/605). Il s'agit bien de la description et du numéro inscrit sur notre fauteuil, miraculeusement retrouvé et identifié à l'occasion de cette vente Garden-party.

Philippe et Aymeric Rouillac

Ce fauteuil a été identifié avec la collaboration d'Élodie Abad, historienne de l'art à l'Université François Rabelais à Tours, et de Karl Benz, clerc de la maison de ventes Rouillac.
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