Plus de 100 œuvres de Maria Vassilieff, artiste oubliée de l’âge d’or de Montparnasse, refont surface
Lundi 24 novembre 2025
Connaissance des arts, Clémentine Pomeau-Peyre

Marie Vassilieff dans son atelier au 21, avenue de Maine, 1922. Collection Claude Bernès. ©Véronique Herbaut

La collection Claude Bernès consacrée à Marie Vassillieff, avant sa dispersion. Photo : © Rouillac

Marie Vassilieff, Autoportrait avec la poupée, 1929huile sur panneau. Collection Claude Bernès. 54,5×35,5 cm. © Véronique Herbaut

La collection Claude Bernès consacrée à Marie Vassillieff, avant sa dispersion. Photo : © Rouillac
Avec une journée de vente aux enchères entièrement consacrée à Maria Vassilieff en juin, le commissaire-priseur Aymeric Rouillac poursuit le long travail effectué par un collectionneur qui a consacré quarante ans de sa vie à l’artiste.
C’est dans un appartement parisien du 9e arrondissement de Paris qu’Aymeric Rouillac présente une collection unique de plus d’une centaine d’œuvres signées Maria Vassilieff. À l’origine de ce trésor, le collectionneur Claude Bernès : « Dans les années 1970, il achète quelques tableaux de cette artiste d’origine russe dans une vente aux enchères… Et c’est le début d’une vraie passion, il va consacrer les quarante années suivantes à rassembler des œuvres et des informations sur cette artiste… Au fil des ans, il est devenu un véritable expert, sa correspondance montre que de nombreuses maisons de ventes le consultaient. »La bohème de l’entre-deux-guerres
Née en 1884 en Russie, Maria Vassilieff arrive en France en 1905, et se lie d’amitié avec Matisse, dont elle fréquente l’atelier. Lorsqu’il ferme, elle décide d’ouvrir l’Académie Vassilieff avenue du Maine. « Elle devient la femme autour de qui toute la communauté des artistes de Montparnasse s’organise, la légende dit que le Douanier Rousseau l’a demandée en mariage et qu’elle a refusé », s ‘amuse le commissaire-priseur. En 1915, Maria Vassilieff décide de rentrer en Russie, mais elle n’y reste pas longtemps, juste assez pour participer à l’Exposition 0.10 dans laquelle Malevich va montrer son Carré noir sur fond blanc.
Elle reprend sa place parmi les artistes de Montparnasse à son retour en 1917 comme le montre un dessin figurant dans la collection : elle s’est représentée dans la cantine qu’elle a ouverte durant la Première Guerre mondiale, accueillant un banquet pour célébrer le retour du front de Georges Braque. Autour de la table sont alignés Picasso, Cendrars et Matisse, et un Modigliani furieux de ne pas avoir été invité, car son rival Alfred Pina est attablé avec son ex-femme…
Une artiste touche-à-tout
Outre ses dessins et peintures, elle fabrique désormais des poupées représentant ses amis et connaissances, assemblées à partir de matériaux très variés (cartons, chutes de tissus, rhodoïd…). « Paul Poiret va l’encourager dans cette voie, elle dessine un flacon de parfum pour lui, et va ensuite diriger des ateliers de costumes, concevoir des affiches publicitaires pour des bals… Elle décore également en 1927 deux piliers de la brasserie La Coupole, boulevard du Montparnasse », détaille Aymeric Rouillac.
Dans les années 1940, cette artiste décidément éclectique s’essaie à la céramique, dont elle se sert pour former à la fois des pièces de table et des sculptures. Retraitée dans les années 1950, elle est inhumée à Nogent-sur-Marne en 1957.
Aymeric Rouillac n’a pas encore établi les estimations des œuvres qu’il présentera en vente le 6 juin prochain, mais indique qu’il va tenir compte à la fois de « l’absence des collectionneurs russes qui soutenaient ce marché, et de l’effet de rattrapage ces temps-ci pour les artistes femmes qui ne sont pas encore suffisamment reconnues ». Pour mémoire, une huile sur panneau Pierrot sa maman et son chat datée de 1929 a été adjugée 36 016 € frais compris en mai dernier chez Bukowski (Stockholm).
