Calder l’avait pris en affection
Samedi 05 avril 2025
La Nouvelle République, Alexandre Salle

Christian Quenault, ferronnier d’art, a stoppé son activité et vendu aux enchères son outil de travail le 4 avril 2025. Sa relation avec le sculpteur Alexander Calder a fait réagir des anciens collègues des établissements Biémont.
Christian Quenault, ferronnier d’art à Parçay-sur-Vienne, a pris sa retraite le 4 avril. Ce jour-là, son outil de travail et ses sculptures ont été vendus aux enchères par Aymeric Rouillac. Près de 80 personnes ont assisté à l’adjudication dans la salle communale de Rilly-sur-Vienne. Plus de 90 % des sculptures ont trouvé preneur, pour une vente qui totalise plus de 40.000 € frais compris. « C’est donc un grand succès pour la cote de cet artiste autodidacte », se réjouit auprès de la NR le commissaire-priseur.Christian Quenault, qualifié de sculpteur poète et d’assistant de Calder lors de la présentation de la vente aux enchères, a suscité plusieurs réactions d’anciens employés des établissements Biémont de Tours. « Calder n’avait pas d’assistant. L’artiste travaillait seul, totalement seul, dans son atelier de Saché, puis il apportait maquettes ou parfois croquis aux établissements Biémont, où l’on réalisait ses œuvres, affirme Michel Juigner, auteur du livre Sauvegarde de la mémoire Calder en 2024. Dans l’entreprise, une partie du personnel a plus ou moins travaillé un jour ou l’autre à la réalisation de ses œuvres. Seul le contremaître Jean Berruet avait une proximité particulière avec Calder. Absolument personne d’autre. »
Pour l’ancien de chez Biémont, Calder n’a pas pu repérer Christian Quenault, « qui a pu travailler qu’exceptionnellement et très momentanément sur une œuvre de l’artiste ». Du qualificatif « assistant », Michel Juigner préfère celui de « technicien » ayant travaillé « pour mais pas avec ». Les anciens de chez Biémont voient dans ce qualificatif d’assistant une façon de faire grimper la cote de Christian Quenault.
Reste que Christian Quenault affirme avoir travaillé dans l’atelier du sculpteur à Saché, même après la mort de l’artiste américain. « Bien sûr, Christian Quenault n’était qu’un technicien, un jeune soudeur de 19 ans chez Biémont. Il n’a d’ailleurs jamais prétendu le contraire, répond Aymeric Rouillac. Mais Calder l’avait pris en affection et lui demandait de venir dans son atelier, chose rare pour être soulignée. Je crois que si Christian Quenault avait voulu se faire de la publicité pour ses “ œuvres ”, il n’aurait pas attendu de partir à la retraite pour le faire. »
Pour le commissaire-priseur, la procédure judiciaire intentée par la Fondation Calder au moment de la vente de trois œuvres attribuées à Calder, offertes par l’artiste à Christian Quenault, a tranché la question en donnant raison au soudeur tourangeau : « Ça ne fait pas très plaisir aux aigris, mais c’est un fait têtu. Le résultat de la vente illustre que Quenault est un ferronnier d’art, artiste autodidacte, bijoutier de la ferraille, dont Calder a décillé les yeux. C’est ainsi que nous l’avons présenté, sans prétention aucune, avec simplicité et honnêteté. »
