Miroir, ô mon beau miroir...
Samedi 11 janvier 2025 à 07h
Cette semaine, l’un de nos fidèles lecteurs nous interroge à propos d’un miroir. L’occasion pour Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en dire plus sur cet objet.

Au début de chaque année, il est de coutume de prendre de bonnes résolutions. Pour certains, cela rime aussi avec un changement de décoration, afin de transformer leur cadre de vie.
L’objet de cette semaine est un miroir semblant être de taille moyenne ; son cadre en bois doré est orné de feuilles d’acanthe en enroulement dans les angles inférieurs, tandis que sa partie supérieure cintrée est décorée de rinceaux se rejoignant vers une coquille située à son sommet. Le miroir en lui-même est plat et plaqué sur trois planches de bois, visibles à l’arrière. Ses pieds étant trop fins pour le supporter, on en déduit qu’il ne s’agit pas d’un miroir à poser sur un meuble mais d’un miroir à fixer au mur.
L’utilisation du miroir est particulièrement ancienne. En effet, les premières traces archéologiques de son utilisation remontent à la Haute Antiquité. Les techniques et matériaux utilisés diffèrent selon les époques : on trouve ainsi des miroirs en bronze ou fabriqués dans des matières précieuses, tels que l’argent massif, l’or ou l’ivoire.
La mise au point de miroirs en verre par les artisans vénitiens au XVIe siècle fut une véritable révolution. Ceux-ci utilisaient la technique de l’étamage, consistant à revêtir une plaque de verre de plusieurs couches d’étain et d’une couche de mercure afin de produire un effet réfléchissant. Les miroirs ainsi réalisés étaient si précieux que ces artisans furent forcés de s’installer sur l’île de Murano pour préserver leur secret !
La technique de fabrication des miroirs commença à se diffuser au XVIIe siècle sous l’impulsion de souverains, tels Louis XIV, qui fonda en 1665, à Paris, la Manufacture royale des glaces de miroirs, dont les productions ornent la Galerie des Glaces de Versailles. Signes du savoir-faire français, ces miroirs permettaient de restreindre les importations, très coûteuses, et conféraient un grand prestige à leur propriétaire, lequel pouvait ainsi… « épater la galerie » !
On doit l’invention du miroir argenté au chimiste Justus von Liebig qui, en 1835, développa le procédé d’argenture, plus rapide, moins coûteux et bien plus sûr que l’étamage au mercure. Toutefois, c’est au XXe siècle que le miroir devient un objet usuel, que l’on retrouve désormais dans des formes et des tailles variées dans tous les foyers.
Avec sa coquille et ses ornements symétriques, votre miroir, cher lecteur, adopte les codes du style Régence. Cependant, la sculpture qui l’orne est assez frustre, sa glace est dépourvue de tache et de saut de mercure, et l’arrière ne présente aucune patine : autant d’éléments montrant une production récente. Il s’agit donc d’un meuble de style, probablement réalisé au XXe siècle.
Ce type de pièce n’étant plus très recherché par les amateurs aujourd’hui, il convient de rester raisonnable à propos de son estimation, que l’on pourrait fixer autour de 100 euros en fonction de ses dimensions et son état de conservation. Une somme qui vous permettrait cependant de refaire votre intérieur pour ajouter une touche d’ancien dans votre foyer !
