FR
EN

Des petits trésors de Touraine aux enchères

Jeudi 23 mai 2024

La Nouvelle République, Pascal Landré

Tous les « vendeurs » rêvent de vivre l’histoire de cet habitant de l’Yonne (à gauche) qui ne soupçonnait pas un instant que ce tableau familial qui servait de cible au jeu de fléchettes des enfants, valait une fortune : l’œuvre de la Renaissance signée Lavinia Fontana fut adjugée 1,25 million d’euros par Aymeric Rouillac (à droite), au château d’Artigny, en 2023.
© Photo NR
L’épisode le plus marquant de la carrière de commissaire-priseur de Philippe Rouillac : la vente en 2013 du « coffre de Mazarin » pour plus de 7 millions d’euros. Le coffre servait à ranger les bouteilles d’apéritif dans un pavillon des bords de Loire.
(Photo archives NR)
Une des œuvres signées des maîtres flamands Jan et Jan Brueghel, dénichées chez une Tourangelle, qui seront présentées à la vente d’Artigny le 26 mai 2024.
C’était en 2013, dans une maison de bords de la Loire, où le commissaire-priseur Philippe Rouillac était venu estimer des horloges comtoises. Au moment de servir l’apéritif, le propriétaire ouvre un lourd coffre de bois pour saisir une bouteille. Le commissaire-priseur a un flash. Il se penche sur le coffre et croit halluciner. Le bar aux portos et aux whiskies ressemble à ce grand coffre de laque incrusté d’or et de lamelles d’argent du 17e siècle qu’il a vu il y a bien longtemps dans un livre d’art. Bingo ! Il s’agit bien du grand coffre que le cardinal Mazarin avait fait réaliser au Japon entre 1630 et 1640. Quelques mois plus tard, le 9 juin, la Maison d’enchères Rouillac adjugera le « bar à papa » pour la somme de 7,31 millions d’euros, frais compris, au Rijksmuseum d’Amsterdam. Là même où l’objet avait été vendu aux enchères il y a 355 ans.

L’excitation de tomber sur un trésor

Ce genre de découverte extraordinaire, tous les commissaires-priseurs rêvent de la vivre. « À chaque fois qu’on pousse la porte d’une maison, d’un appartement, d’un château, on se demande toujours si on ne va pas y trouver un trésor insoupçonné », raconte Aymeric Rouillac, associé à son père. Lui-même a déjà vécu l’excitation et l’enthousiasme de celui qui fait une découverte extraordinaire. « Je venais juste d’être nommé commissaire-priseur en 2013, quand, en visitant l’appartement d’une Tourangelle derrière l’hôtel de ville de Tours, je suis tombé sur un tableau en mosaïque de plumes du Mexique, datant du 17e siècle. Nous l’avons adjugé 272.000 euros ! »

Le tableau de famille servait de jeu de fléchettes aux enfants : adjugé 1,25 million d’euros !

En 2023, un habitant de l’Yonne soumet un tableau au commissaire-priseur tourangeau pour expertise. La toile qui a toujours été dans la famille a été quelque peu malmenée par les enfants qui la prenaient pour cible aux fléchettes. L’œil d’Aymeric Rouillac est sans appel : il s’agit d’une œuvre de la Renaissance signée Lavinia Fontana. Estimée 80.000 €, elle s’est finalement vendue 1,25 million d’euros à Montbazon. Sous les yeux écarquillés de son nouveau millionnaire de propriétaire.

Des petits trésors qui ont fait de leurs propriétaires des millionnaires

Quelques instants plus tard, c’est un tableau de l’artiste japonais Kazuo Shiraga qui défrayait la chronique. Son propriétaire, un ancien industriel amboisien, l’avait acquis pour quelques dizaines de milliers d’euros sans rien connaître de l’artiste. La cote de celui-ci n’a cessé de grimper pendant des décennies. L’œuvre a atteint 1,86 million d’euros sous le marteau d’Aymeric Rouillac. Faisant un autre heureux dans la salle.

Deux œuvres des maîtres flamands Jan et Jan Brueghel sous le bras, pour traverser le Vieux Tours.

La prochaine vente de la Maison Rouillac aura lieu dimanche 26 mai 2024 au château d’Artigny. Avec en lots vedettes une œuvre du peintre Odilon Redon, deux tableaux d’Auguste Renoir et… le scooter de l’ancien président François Hollande. Mais aussi d’autres œuvres précieuses, dont certaines proviennent de familles tourangelles. Notamment deux peintures sur cuivre des maîtres flamands Jan et Jan Brueghel (16e et 17e siècles) que des Tourangeaux avaient hérité de leur père, industriel dans le Jura (estimé entre 150 et 250.000 €). « C’était assez surréaliste de traverser le Vieux Tours ce jour-là avec mes deux Brueghel sous le bras », confie Aymeric Rouillac.
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :