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La dernière Baigneuse de Gustave Courbet

Mercredi 31 mai 2023

Le Magazine des enchères, Interenchères, Diane Zorzi


Consulter l'article de Diane Zorzi sur le site d'origine :
https://magazine.interencheres.com/art-mobilier/la-derniere-baigneuse-de-gustave-courbet-devoilee-aux-encheres-pres-de-tours/

Exposée lors du bicentenaire de la naissance de l’artiste au musée Courbet à Ornans en 2019, une Grande Baigneuse réapparue sur le marché en 2013 sera présentée aux enchères le 4 juin au château d’Artigny, près de Tours, à l’occasion de la 35e vente Garden Party de la maison Rouillac. Peint vers 1869, le tableau est le plus grand nu de Gustave Courbet à être présenté aux enchères et pourrait être son dernier chef-d’œuvre consacré à la nudité féminine.

Ceux qui ont eu la chance de fouler les salles du musée Gustave Courbet à Ornans, lors de l’exposition organisée en 2019 pour le bicentenaire de la naissance de l’enfant du pays, reconnaîtront cette Grande Baigneuse (Femme nue couchée au bord de l’eau), qui était alors présentée à côté de La Source (1868) du musée d’Orsay. Cette toile avait été découverte six ans plus tôt lors d’une vente parisienne, où elle était décrite comme une œuvre anonyme. Après de longs mois de recherche, la toile a retrouvé son maître : Gustave Courbet (1819-1877). Estimée entre 300 000 et 500 000 euros, elle sera l’une des pièces maîtresses de la 35e vente Garden Party de la maison Rouillac. « Seule une cinquantaine de Nus est référencée parmi les 1 000 œuvres qu’on lui connaît. La plupart est conservée dans des musées en Europe et aux Etats-Unis. Celui-ci, mesurant 83 cm de haut par 160 cm de large, est le plus grand de tous les temps à trouver le chemin des enchères », annoncent les commissaires-priseurs Aymeric et Philippe Rouillac.

Le dernier nu de Gustave Courbet ?

Cette Grande Baigneuse aurait été peinte par Gustave Courbet en 1869, ainsi que le révèle la marque du marchand de tableaux parisien, Henri & Cré, figurant au revers, une marque éphémère qui ne fut utilisée qu’en 1869. A cette époque, Courbet, au faîte de sa gloire, n’est plus l’artiste controversé du Pavillon du Réalisme de 1855. « Il a une voix influente au sein de la scène parisienne. Ses chefs-d’œuvre L’Enterrement à Ornans (1850), L’Atelier du peintre (1855), Le Sommeil (1866) et L’Origine du monde sont antérieurs. Au mois de juin 1870, il s’offre même le luxe de refuser la décoration de la Légion d’honneur que lui propose enfin l’Empereur Napoléon III, après dix ans d’attente », détaillent l’expert Thomas Morin Williams et le commissaire-priseur Aymeric Rouillac. Célébré dans toute l’Europe, Courbet expose au cours de l’automne 1869 à l’Exposition internationale de Bavière, au Glaspalast de Münich. En décembre, il brosse en quelques heures La dame de Münich, une œuvre aujourd’hui disparue, considérée par les historiens comme son dernier nu. « Notre Grande Baigneuse est probablement peinte à quelques semaines d’écart de cette toile, mais il est difficile de se prononcer sur son lieu de réalisation : lors du voyage du peintre en Bavière, à Ornans en décembre ou à son retour à Paris au début de l’année suivante », précisent l’expert et le commissaire-priseur.

La Grande Baigneuse aux sources de la Loue

Représentant une jeune femme brune, étendue lascivement sur un linge blanc, Courbet reprend les codes du nu académique qu’il renouvelle en brossant la toile au gré d’une touche nerveuse et empâtée. « Courbet est loin d’en être à son coup d’essai dans le genre du nu féminin, initié à 22 ans (Femme nue dans un paysage, 1841, Musuem of Fine Arts, Boston), lorsqu’il peint cette ultime Grande Baigneuse. Il a abordé le thème avec une grande liberté : tantôt inspiré des maîtres de la Renaissance, Titien puis Vélasquez (La dame de Münich), tantôt pudique (La Source), et tantôt licencieux voire érotique (Femme aux bas blancs, 1864, Fondation Barnes, Chicago). Notre Grande Baigneuse établit quant à elle une audacieuse synthèse entre le paysage réaliste de la région d’Ornans, avec les sources de la Loue où il aimait se baigner, et le nu féminin, qu’il n’a cessé d’explorer et renouveler tout au long de sa vie. » Aux tons pastel et délicats des peintres académiques, Courbet préfère les nuances de la nature, jouant d’une palette sourde et terreuse – « Le beau donné par la nature est supérieur à toutes les conventions de l’artiste ». La Grande Baigneuse fait ainsi corps avec son environnement, abandonnant sa main gauche dans l’onde fugitive de la rivière – un dernier geste qui, ainsi que le souligne l’historien de l’art Niklaus Manuel Güdel (« Gustave Courbet – Une enquête sur le paysage », éditions Les presses du réel, Dijon, 2019) « matérialise le lien entre le modèle et la rivière, puisqu’à travers lui, la femme devient baigneuse ».

Visite en images de la vente Garden Party des Rouillac

La 35e édition de la très attendue « Garden party » des Rouillac se tiendra les 4 et 5 juin au Château d’Artigny à Montbazon, près de Tours, et en live sur Interencheres. Comme chaque année, la vente regorge de trésors. Plus de 350 lots seront présentés, d’une toile abstraite de l’artiste japonais Kazuo Shiraga (1924-2008) à un portrait mystérieux de Lavinia Fontana (1552-1614), en passant par un étonnant mannequin féminin pour artiste, des poupées de Marie Vassillieff (1884-1957) ou une Citroën 2CV en bois de 1955. Visite en images.
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