La Tasse de Lumières
Lundi 01 juin 2020
Livrée par le manufacture de Sèvres à Cambacérès, 1794
SÈVRES. Rare et importante TASSE « LITRON » et sa SOUCOUPE,
première grandeur, en porcelaine tendre, à fond beau bleu sur lequel se détache un très riche décor de quatre médaillons ovales ornés de symboles révolutionnaires et maçonniques (faisceau de licteur, bonnet phrygien, niveau) cernés de filets or, de frises de perles, et de frises feuillagées stylisées or.Sur la partie inférieure de la tasse, une frise de laurier est placée entre deux frises de perles et filets or. Sur le bord supérieur de la tasse, un ruban tricolore se détache sur un fond hachuré.
Le très riche décor de la tasse se retrouve sur la sous-tasse avec des symboles différents : piques croisées, livre de sciences ouvert avec une pique, œil, et miroir réfléchissant.
Marque : RF Sèvres
Marque du peintre Guillaume Noël (actif à la manufacture de Sèvres entre 1755 et 1804)
Marque 2000 en or du doreur Henry François Vincent dit le jeune (actif entre 1753 et 1806)
1794
Haut. 6,8 cm ;
Diam. sous-tasse : 13,5 cm
Excellent état de conservation et très belle qualité.
Provenance
- Collection Edouard Chappey, vente de sa collection par maîtres Paul Chevalier et Fernand Lair-Dubreuil, Paris le 29 mai 1907, lot 1177.
- Ancienne collection Franck, vente de sa collection organisée par maîtres Jean-Paul Couturier et Raymond de Nicolay, Porcelaines et faïences à décors patriotiques « Révolutionnaires », Paris le 26 mars 1987, lot 83, adjugée 43.000 francs.
Important "litron" cup and saucer, by the painter Guillaume Noël. Rare and rich decoration in Sèvres during the revolutionary period in 1794.
Autres modèles :
- Modèle très proche conservé au musée Carnavalet, Paris. C’est à partir de cet exemplaire que la manufacture Raynaud et Cie à Limoges a réalisé une réédition commémorative, la “Tasse de Lumière”, sous le patronage des Amis du musée Carnavalet.
- Une tasse “litron” et sa soucoupe à fond beau bleu, troisième grandeur, réalisées en 1794, sont conservées au musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg, Russie (inv. N°3F 20569 ; entrée en 1918, ancienne collection A.S. D Dolgorukov de Petrograd.)
Sèvres pendant la Révolution
Symbole par excellence de l’Ancien Régime la manufacture royale de porcelaine perd sa prestigieuse clientèle pendant la Révolution. Cependant, la manufacture ne ferme jamais ses portes, mais ses ouvriers sont partiellement rémunérés ou non.La manufacture reste la propriété du roi jusqu’à la fondation de la République en août 1792 et est placée sous le contrôle du Ministère des Contributions Publiques.
En 1793, le ministre de l’Intérieur, Dominique-Joseph Garat ordonne la destruction des moules et modèles reliés à la famille royale.
Le directeur Antoine Régnier fait changer la marque : les lettres entrelacées sont remplacées par les initiales « R.F. » de la République Française et « Sèvres » est alors inscrit en toutes lettres.
La production est fortement ralentie. Est lancée à partir de 1793 une production restreinte de pièces ornées de symboles révolutionnaires et maçonniques.
La richesse du décor et certains des ornements de notre tasse, comme les frises de perles, évoquent directement les prestigieux services royaux « riches en couleur et riches en or » réalisés en 1784 ; le premier offert par le roi Louis XVI au roi de Suède Gustave III, le second réalisé pour la reine Marie-Antoinette.
Une iconographie exceptionnelle
Notre tasse se distingue par la grande qualité du décor et sa riche iconographie révolutionnaire et maçonnique : le laurier de la gloire, le faisceau de licteur représente l’union et la force des citoyens français, le bonnet phrygien incarne la liberté, le niveau avec un fil à plomb symbolisant le renouveau, l’œil de la Providence, le livre de science sauvegardé par la pique ; le miroir emblème de la connaissance de soi et les piques croisées.La plupart des symboles sont empruntés à la franc-maçonnerie, société secrète introduite en France par les Anglais en 1725. Sans être anticatholique, elle critique toutes les religions et la philosophie des « Lumières ». N’oublions pas que « Liberté – Fraternité – Égalité » avant de devenir une devise républicaine était déjà au début du XVIIIe la règle des francs-maçons.»
Un Mystérieux acquéreur
Le 14 thermidor an II (1er août 1794), le peintre Noël et le doreur Vincent livrent : “4 gobelets litrons de 2(eme) g(randeur) beau bleu, frize et allégories” . Notre tasse faisait très vraisemblablement partie de cette livraison.Si les archives de la manufacture de porcelaine de Sèvres ne permettent pas d’identifier l’acquéreur, l’opulence du décor et l’iconographie de notre tasse indiquent que le récipiendaire de ces objets d’une insigne rareté ne pouvait s’agir que d’un révolutionnaire ardent et d’un franc-maçon engagé. La tradition suggère un personnage aussi important que Jean-Jacques Régis de Cambacérès (1753-1824).
La ‘Tasse de Lumière’ une reproduction commémorative réalisée à Limoges
On y joint une reproduction en porcelaine dure de Limoges éditée pour la commémoration du Bicentenaire de la Révolution française.Commémorations Limited a chargé André Raynaud, maître porcelainier de Limoges, de réaliser la reproduction scrupuleuse dans le moindre détail sous le haut patronage des Amis du musée Carnavalet avec l’accord de la Manufacture de Sèvres.
Manufacture Raynaud et Cie, Limoges
Commande des Amis du musée Carnavalet. Haut. 6, 7 cm
Réédition de la “Tasse de Lumière” conforme à l'original créé à la Manufacture Nationale de Sèvres en 1794. Reproduction sous le haut patronage des Amis du Musée Carnavalet à Paris, dépositaire de l'unique original connu. Commémorations Limited. Fabriqué à Limoges, France.
Le 1er floréal An II (20 avril 1794), au plus fort de la Terreur révolutionnaire, la Manufacture de Sèvres confia au peintre Guillaume Noël de « 4 gobelets et soucoupes, 2e grandeur, frise allégorique ». On convint du prix, soit 48 livres, somme considérable pour l’époque. Huit mois plus tard, fin frimaire An III, le registre des travaux porte la mention : « rendu 4 tasses peintes en allégories très riches et dorées ». Ainsi naquit la « Tasse de Lumière »