Eau à tous les étages
Samedi 07 décembre 2013
Cette semaine Maître Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, se penche sur un meuble de toilette dont Martine, de Cellettes, aimerait connaître la valeur.
Faire couler de l’eau chaude à volonté chaque matin semble si naturel ! Mais, ce n’était même pas le privilège de Louis XIV à Versailles ! La notion de confort est une chose toute moderne. En plus des photos de cette pièce, Martine nous envoie également des souvenirs de jeunesse. Dans son courrier, elle évoque ses vacances à la campagne, dans la maison de son grand-père. Ce meuble s’y trouvait, dans une chambre, et notre lectrice se souvient de l’avoir utilisé faute de salle de bain et de douche ! Songez que si Paris dispose de l’eau courante dès la fin du XIXème siècle, seulement 30 % des communes rurales sont équipées d'un réseau de distribution d'eau potable à domicile en 1945 ! Et ce n’est qu’à la fin des années 80 que les campagnes les plus reculées bénéficieront de ce« luxe ». Ainsi, avec ce meuble, nous plongeons dans une époque toute proche de nous ou l’eau, qui se trouvait au fond du puits de la cour ou à la fontaine du coin de la rue, était l’objet d’une corvée.
Le bâti est en bois résineux mouluré. Il ouvre en façade par une porte et deux petits tiroirs en ceinture où étaient rangés les ustensiles de toilette. Les montants avant sont agrémentés de deux consoles décoratives sculptées de cannelures. Le plateau reçoit une plaque de marbre creusée d’une gorge et ajourée en son centre pour accueillir une vasque de forme circulaire en porcelaine blanche. D’une autre plaque de marbre, placée à la verticale, sort un robinet en métal muni d’une poignée de porcelaine. Cet élément masque une cuve en métal étamé formant réservoir. Une planche de bois munie de charnières permet d’y accéder afin d’y déverser l’eau nécessaire à la toilette.Une autre cuve située en partie inférieur est destinée à recevoir l’eau usagée.Elle est, de fait, amovible. Ce meuble présente des finitions plutôt soignées.Le marbre employé est un rouge royal de Hautmont. Ce marbre de qualité provenant de Belgique est, au même titre que la porcelaine, gage de qualité.Parmi les nombreux meubles de toilette fabriqués entre la fin du XIXème et le début du XXème, celui-ci présente les caractéristiques d’un produit haut de gamme, pour étage noble. Il est typique de ceux que l’on pouvait trouver imprimés sur les catalogues du Bon Marché à Paris. Ce meuble, dont une plaque de marbre est brisée, est aujourd’hui parfaitement inutile. Ce témoignage d’un passé justement révolu, peut s’échanger pour 50 € dans un vide-grenier.