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La belle époque... ou l'art de vivre à la Française

Lundi 20 avril 2020

extrait de "Adjugé ! La Saga des Rouillac"
par Aymeric Rouillac

"La Belle Époque n’a été jugée « belle » qu’après la tragédie du premier conflit mondial. En France, cette période tumultueuse naît à la fin du Second Empire, dans les braises de la Commune. Elle s’arrête en 1914, avec l’attentat de Sarajevo, qui entraînera la fin des autres empires continentaux. Les attentats anarchistes se multiplient jusque dans la chambre des députés, la classe politique corrompue est décrédibilisée par les scandales de Panama et des décorations, l’armée tire sur les viticulteurs du Languedoc alors que la société est profondément déchirée entre partisans de Dreyfus et anti-dreyfusards. Pourtant... magnifiée par Stefan Zweig dans Le Monde d’hier, la Belle Époque est aussi celle d’un certain art de vivre qui n’est pas encore renversé par la course effrénée au progrès.

Dans le parc Pasteur à Orléans, un manège angevin de vingt-cinq chevaux de bois n’a pas cessé de tourner jusqu’à la fin du XXe siècle, transportant l’enfance de mon père et de mes oncles, jusqu’à son achat par une collection américaine (cat. 150). La vente de ce manège a marqué notre famille, tout comme celle du cirque Pinder. Je me remémore avec émotion la tenue bleu nuit de monsieur Loyal enfilée par mon père pour disperser la caravane de direction ou les gigantesques costumes d’éléphants jouant aux policiers et aux voleurs. Ma mère ayant le don d’enchanter tout ce qu’elle touche, elle décida que cette vente devait être à l’image d’un spectacle circassien... Je crois que c’est la seule fois que j’assistai à une vente en mangeant une barbe à papa !

Les adultes à la Belle Époque préfèrent, eux, les grands chevaux aux petits, que ce soit pour chasser à courre (cat. 147) ou pour leurs luxueuses voitures attelées. Dispersant les écuries du château de La Pierre dans la Sarthe en 2005, mon père y découvre les trésors d’attelages réunis par Philippe du Luart. Un splendide coupé de gala par Georges Ehrler, construit sur le modèle de celui créé pour l’empereur, y régnait en maître (cat. 146). Il servit de modèle à celui ensuite livré à la présidence de la République, aujourd’hui conservé à Versailles. Dans la journée, le comte du Luart menait à un train d’enfer les quatre chevaux de son park drag sur l’avenue Foch, conduisant ses élégants amis en promenade au bois de Boulogne (cat. 144).

Si les femmes sont habillées à la dernière mode, c’est à l’éclat de leurs bijoux qu’on reconnaît leur place dans la société. Le joaillier Chaumet, digne successeur de Nitot, l’orfèvre de l’impératrice Marie-Louise (cat. 115), sertit des rivières de diamants taillés en rose (cat. 152). La princesse Amédée de Broglie porte ainsi cinq magnifiques perles fines en chute. Chacune d’elles lui a été offerte par le maharadjah de Kapurthala, en remerciement de chacun de ses séjours au château de Chaumont- sur-Loire (cat. 155). En montant les marches de cette auguste demeure, des photographies rappellent les facéties du pachyderme accompagnant le prince indien dans ces jardins suspendus au-dessus de la Loire."

Extrait de "Adjugé ! La saga des Rouillac"
240 pages, 450 photos, 39 €, aux Éditions Monelle Hayot

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