De Gaulle explique l'Appel du 18 juin
Lundi 08 avril 2013
Le Figaro, Valérie Sasportas
Quatre feuilles tapuscrites le 17 mai 1943, comme l'indique la date mentionnée en tête de la première page, et corrigées à la main le « 18 juin 1943 à 21h30 ». Soit trois ans jour pour jour après le fameux appel donnant naissance à la France Libre. Pour les deux hommes, c'est un souvenir commun.
« En 1940, Jean Oberlé était à Londres. C'était celui qui parlait aux Français, il était juste une voix. Lors de l'appel du 18 Juin, il se tenait assis à côté du Général », raconte Aymeric Rouillac. Quand Oberlé demande à Charles de Gaulle - trois ans plus tard donc - d'expliquer les conditions de son appel qui restera dans les annales, ce dernier lui répond. C'est un discours politique. On lit la première phrase: « Ma conduite le 18 juin 1940 est l'aboutissement, le prolongement de la politique que j'ai suivie depuis que j'ai fait partie du gouvernement Reynaud. » Déjà, Oberlé nuance ces propos (de son propre chef ou pas, l'histoire ne le dit pas): « le prolongement de la politique qu'avait décidé de suivre le gouvernement Reynaud dont je faisais partie ».
Écriture fine et lisible
La phrase suivante aussi est rectifiée. L'expression « secrétaire d'État à la Guerre » devient « secrétaire d'État à la Défense nationale ». De Gaulle poursuit: « La défaite en France était en vue, il fallait voir au-delà de la défaite. » Pas de correction. « L'idée de continuer la lutte en Afrique du Nord convenait à Reynaud. » Phrase intacte…Les précisions reviennent plus loin, d'une écriture fine, lisible. Ainsi, à la fin de ce premier feuillet: « Reynaud, furieux, me dit: allons voir Huntziger. » Oberlé corrige: « Reynaud, mécontent, incline à limoger Weygand. Je lui conseille de le remplacer par Huntziger, faute de mieux !»
Ce document oublié se trouvait dans un paquet d'archives d'un des petits-neveux d'Oberlé qui lui-même n'a pas eu d'enfants, mais sa sœur oui avec son mari Welles Bosworth, architecte de la famille Rockefeller. Inédite, mais pas écrite de la main du général de Gaulle (auquel cas il n'aurait pas été permis de la vendre), cette interview est mise à prix 1 000 €. Elle sera dispersée avec d'autres archives de guerre de Jean Oberlé, les 8 et 9 avril, à Vendôme (Loir-et-Cher).