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Trousseau de mariage de la Princesse Chiyohime, Tokugawa Museum
Trousseau de mariage de la Princesse Chiyohime, Tokugawa Museum

1639 – La Princesse Chiyohime, troisième fille de la troisième génération de shogun Tokugawa Iemitsu reçoit un « Hatsune Maki-e Konrei », à l’occasion de ses fiançailles, à l’âge de deux ans avec Mitsutomo, héritier de la famille des Owari Tokugawa. Ce trousseau de mariée, composé de 75 pièces de laque, est fabriqué par la famille Kôami, fournisseur officiel des Tokugawa. Kôami Nagashige (1599-1651) est le patriarche de 10 générations de laqueurs à Kyoto. Il réalise cette commande entre 1637 à 1639. Ces 75 pièces de laque conservées au musée de Tokugawa à Nagoya (Japon) représentent le chapitre "Hatsune" du Dit du Genji. Trésor national au Japon, ce trousseau est considéré comme l’un des chefs-d’oeuvres de l’art de la laque au XVIIe siècle (1). Notre coffre, de même qualité, de même époque est le plus grand objet de laque conservé aujourd'hui dans le monde. Il provient vraisemblablement du même atelier et présente d’autres scènes du Dit du Genji. La boîte Van Diemen, un plus petit coffre, conservé au musée Victoria & Albert de Londres, et des panneaux de laque de la même époque montés postérieurement sur différents cabinets européens (V&A, Sotheby's, Charlottenburg), reprennent également le thème du Dit du Genji.

La description du Japon par François Caron
La description du Japon par François Caron

1640 - François Caron (1600-1673), dernier chef de la mission de la Compagnie Hollandaise des Indes orientales(V.O.C.), à Hirado, en 1639-1641, commissionne, le plus probablement, la boîte Van Diemen, le petit coffre conservé au Victoria & Albert Museum (Londres) (2), ainsi qu’une dizaine de petits laques aujourd’hui répertoriés dans le monde – et, a fortiori, ce grand coffre dont le décor est comparable. Sa proximité avec le Shogun Iemitsu lui permet de passer une commande au faste inégalé : « Caron, qui avait un contact intime et de longue date avec les laques d’exportation, espérait-il produire les makie les plus luxueux jamais conçus ? Les ouvriers qu’il a fait travailler étaient-ils les mêmes que ceux qui livraient les Shogun ? Ces ouvriers ont-ils choisi eux-mêmes de quitter le style traditionnel des laques Nanban ? Dans quelle limite les thèmes et techniques (de ce coffre) reflètent-ils les souhaits du client et quelle est la part issue des conseils et de l’imaginaire des ouvriers ? Ce remarquable travail donne naissance à des questions sans fin et passionnantes auxquelles nous n’avons aujourd’hui pas de réponses claires à apporter. » (3) D’après le Victoria & Albert Museum, la fabrication d’un coffre dure deux ans et demi à trois ans.

1641-1864 – Le gouvernent japonais interdit d’exporter « les objets d’art, notamment objets de laque, paravents et autres décorés de motifs de ville, château, figures humaines, surtout hommes armés… toute désobéissance à cette loi sera punie par décapitation. » (4) Cette interdiction prise par un article du 14 août 1641 est en vigueur jusqu’en 1864. L’exportation de laque ne se tarit pas pour autant. Caron quitte le Japon en 1641, date à laquelle la V.O.C. est forcée de s’installer sur l’île artificielle de Dejima, dans la baie de Nagasaki.

1643 – Quatre grands coffres « extraordinarij schoon » (extraordinairement beaux) quittent le Japon dans les soutes du navire « Orangienboom » le 1er octobre 1643 à destination Batavia via Taiwan. Chacun d’entre eux est compté pour 144 taels,  somme fabuleuse comparée au prix des cabinets qui étaient alors de 31,5 taels (5). Le coffre du Victoria & Albert Museum étant ornée de plantes automnales (bambous), celui-ci de fleurs de magnolias fleurissant en mai et en juin, pourquoi ne pas envisager que ces quatre coffres correspondent aux quatre saisons illustrant le Dit du Genji ? Les deux autres coffres pourraient avoir été ornés de fleurs de cerisier (printemps) et de chrysanthème (hiver).

Le coût considérable de ces coffres et les instabilités liées à la guerre de 30 ans effrayent les amateurs. Les commandes se ralentissent et baissent de qualité. La dernière réception de commande de la V.O.C en laque est datée du 28 octobre 1651. « Le 19 septembre 1648 les Heren XVII votent la résolution de vendre sans délais leur stock de laque, en échange d’un paiement comptant » (6). Aucune autre commande ne sera passée jusqu’en juillet 1658 … quelques mois après qu’un amateur fortuné n’est relancé le marché du laque en Europe.

Le Cardinal Mazarin par les frères Le Nain
Le Cardinal Mazarin par les frères Le Nain

1658 – Jules, Cardinal, Mazarin (1602-1661) fait vraisemblablement acheter ce coffre au mois de janvier, à Amsterdam, par Francis Lescot, marchand-expert. La principale mission de Jacques-Auguste de Thou, baron de Meslay, ambassadeur de France à Amsterdam, entre 1656 et 1661, est d’aider le Cardinal à constituer sa collection de laques du Japon. « Un des plus beaux achats qu’il fit pour son maître fut celui de 1658 : Lescot s’en revint sur un « vaisseau de guerre » qui le transporta, en toute sécurité, avec des objets superbes pour le Cardinal. Pour cette acquisition, Lescot dut même se bagarrer contre un « fripon » d’Amsterdam. Il s’agissait sans doute d’une vente aux enchères » (7).

Ces meubles laqués étant de taille basse, à la manière de vivre des Japonais, « le Cardinal leurfit ajouter des pieds (supports) à quatre, six huit colonnes (ou pilastres) d’un mètre de haut,afin de pouvoir les utiliser dans son palais. »8. Le socle du coffre comportait initialement huitpieds, qui ont été remplacés par des patins plats. Une photographie ancienne de ce socle le montreavec quatre pieds volutes à feuilles d’acanthe. Par ailleurs, il porte, l’étiquette de William Murray,transporteur, sculpteur et doreur du Duc de Hamilton, propriétaire du coffre au XIXe siècle. A-t-ilété réalisé en Hollande ou en France au XVIIe siècle, ou postérieurement en Angleterre ? Certainement pasau Japon. Ses poignées reprennent la forme des poignées du coffre, mais leur qualité est inférieure.

1661 – Inventaire de Jules, Cardinal Mazarin (1602-1661). Si Mazarin ne possède que six belles petites pièces de laque lors de l'inventaire de ses meubles à La Fronde en 16539, l’inventaire de son garde-meuble, à son décès, en 1661, compte deux-cent-six objets de laque. Les « meubles en laque de Chine » sont placés avec les trésors du Palais Mazarin, dans la galerie du premier étage, aujourd'hui Galerie Mazarine de la Bibliothèque Nationale de France, comme on les voit sur une gravure par Nanteuil du Cardinal10. L'inventaire des biens du Cardinal, après son décès, est dressé par Colbert à la demande du Roi, malgré l'interdiction plusieurs fois répétée du Cardinal de procéder à l'inventaire de tous ses biens. Parmi les 26 « coffres en verny de la Chine » inventoriés (n°777, 787, 795-801, 804-805, 807-812, 814-816, 826, 829, 835, 839, 840, 843), ce coffre est l'un des quatre plus grands.

Il porte le numéro 829 : « Un grand coffre verny de la Chine à une serrure, ses coings et serrure dorez damasquinée, sur le dessus duquel sont représentez des figures de petis enfans Chinois aux costez des arbres, et sur devant dès petites figures, hault de deux piedz deux poulces, large de quatre piedz cinq poulces, et deux piedz trois poulces de profondeur. Prisé la somme de six cens livres ». Sa largeur de 4 pieds cinq pouces (143 cm) et sa profondeur de 2 pieds 3 pouces (72,9 cm) correspondent aux dimensions de ce coffre (143,5 x 73 cm). Il lui manque six centimètres (64 cm) de hauteur pour  correspondre aux 2 pieds 2 pouces (70,2 cm) de l’inventaire. Peut-être s’agit-il d’une erreur de transcription ou d’une mesure différente avec le socle ? (11)

Le coffre conservé au Victoria & Albert Museum porte le n°810 : « Un coffre des plus finis de la Chine sur le couvercle duquel est représenté entre autres choses dans le milieu un arbre sur un rocher eslevé et a gauche une maison et un pont et par devant deux oies, long de trois pieds dix poulces, large d’un pied dix poulces, hault de deux pieds, prisé avecq son pied à six colonnes la somme de deux cents livres tournois ». Pour mémoire les dimensions du coffre du V&A sont : 56,5 cm de hauteur par 100,3 cm de largeur par 63,5 cm de profondeur.

Hortense Mancini, nièce de Mazarin par Pierre Mignard
Hortense Mancini, nièce de Mazarin par Pierre Mignard

1661 – Marie-Anne Mancini (1649-1714), épouse de Godefroy Maurice de la Tour d'Auvergne, 1er Duc de Bouillon (1641-1721), ou l'une des autres nièces du Cardinal, telle Hortense Mancini (1646-1699), épouse de Armand-Charles de la Porte de La Meilleraye, duc de Mazarin, 2e duc de La Meilleraye, duc de Mayenne (1632-1713) hérite de ce coffre au décès de son oncle le Cardinal Mazarin (12). Dans son testament, le Cardinal privilégie, en effet, sa nièce aînée et son époux, pour l'attribution de ses biens. La Porte relève, ainsi, le titre et le nom de Mazarin en épousant sa nièce entre deux séances de rédaction du testament... Le Cardinal dote cependant richement chacune de ses six autres nièces, attribuant, par exemple, à chacune d'elles 40.000 livres de « meubles meublants, pierreries, bagues et joyaux restants et vaisselle d'argent (...) dont le choix, partage, estimations et délivrance seront faits par Messieurs les exécuteurs testamentaires selon et ainsi qu'ils l'estiment à propos » (13). Ces quatre exécuteurs testamentaires sont : le premier président du parlement de Paris, Fouquet surintendant des Finances, l'évêque de Fréjus et Colbert. Le choix final n'est pas public. Les bijoux de la Couronne offerts à la reine Anne d’Autriche étaient, quant à eux, conservé dans l’un des trois autres grands coffres de laque du Japon dans la grande galerie.

1699 - Armand-Charles de la Porte de La Meilleraye, duc de Mazarin, 2e duc de La Meilleraye, duc de Mayenne (1632 - 1713) hérite au décès de son épouse Hortense Mancini d’un « grand coffre de la Chine sur lequel est un pont et une femme chinoise. » La description du panneau correspond à celle du coffre conservé au Victoria & Albert Museum. Il porte le numéro 626 de l’inventaire après décès de son épouse et est évalué 400 livres (14) .

1738 - Claude-Antoine JULLIOT, expert bijoutier, sis quay de Conti, à Paris, achète lors de la vente du château de Chilly Mazarin « un grand bahut de lac ancien du Japon en relief doré et en cartouche de quatre pieds de long sur son pied de bois doré … vendu à M Julliot demerurant sur le quay Conti… pour la somme de cent quatre-vingt livre dix sol ». Les dimensions de ce coffre correspondent à celle du coffre conservé au Victoria & Albert Museum. Ce bahut porte le n°528 de la vente commencée le 5 mars 1738, et est vendu pour la somme de 190 livres et 10 sols15 .

Rouillac | Coffre Mazarin, Louis Jeanne de Durfort
Louise Jeanne, duchesse de Durfort

1781 - Louise Jeanne de Durfort, duchesse de Rethel, duchesse de Mayenne, duchesse de La Meilleraye et de Mazarin (1738-1781), décède à l'âge de 45 ans "lorsque elle achevait à peine de former son cabinet", relève la préface du catalogue de sa vente qui se tient en son hôtel, quai Malaquais, le 10 décembre et jours suivants. Le catalogue, édité par Lebrun, présente en toute fin « les objets de curiosités du Chilly que l'on rapportera ou qui seront vendus sur les lieux. » (16) Parmi ceux-ci, six objets en laque sont dispersés, à commencer par le n°357 ainsi décrit : « Un grand coffre à panneau, fond noir, avec dragons en or & garni de cuivres dorés ; il est posé sur un pied de bois sculpté & doré. » La description de ce coffre pourrait correspondre avec celle du nôtre. Il aurait dans ce cas échu au décès du Cardinal à sa nièce aînée Hortense, ancêtre de Louise de Durfort, et directement placé par son mari, le Duc de Mazarin, dans son fief, devenu aujourd'hui Chilly-Mazarin. Le catalogue de vente consulté est muet quant à son prix et à l'identité de l'acheteur final. Était-ce son cousin le Duc de Bouillon ?

Rouillac | Coffre Mazarin Jacques Léopold Charles Godefroy de La Tour d'Auvergne, 7e Duc de Bouillon
Jacques Léopold Charles Godefroy de La Tour d'Auvergne, 7e Duc de Bouillo

1781, 1792 - Jacques Léopold Charles Godefroy de La Tour d'Auvergne, 7e Duc de Bouillon (1746-1802), hérite-t-il de ce coffre familial avec le titre de Duc, à la mort de son père en 1792, ou l'achète-t-il à la vente de sa tante en 1781 ? Peut-être l'acquiert-il autrement ? Son goût pour le vieux laque du Japon est certain : il achète ainsi, en 1777, dans la vente Randon de Boisset, la boîte Van Diemen, provenant des collections de la marquise de Pompadour (17). En mars 1800, le dernier Duc de Bouillon doit payer l’énorme somme de 3 millions de livres pour récupérer son duché, mis sous séquestre à La Révolution. Ses collections sont progressivement vendues.

Le marchand mercier Darnault achète lors de la vente des collections du Duc de Bouillon le 2 Thermidor an IX (21 juillet 1801) « pour Monsieur Beckforth » (sic) 51 laques. Ce coffre porte le n°6 de la facture adressée en août 1801 par Darnault à Beckford : « Un grand coffre de 3 pieds de long sur deux de large et deux de hauteur. Les panneaux représentent Paysages avec fabriques figures et animaux &c. le tout incrusté en or et argent relief. Encadrements des dits panneaux représentant ornements et rosaces incrustés en or et en nacre de prle. Avec sa cage de glace garnie de bronze doré le tout dans la plus parfaite conservation. » Il est compté pour la somme de 1 280 francs. C’est le laque, de loin, le plus cher de la facture qui totalise 5 888 francs (18).

Rouillac | Coffre Mazarin, William Beckford
William Beckford

1801 - William Thomas Beckford (1760-1844) a très tôt le goût des vieux laques du Japon. Quelque mois avant la vente des biens de la Duchesse de Mazarin, en avril 1781, il écrit ainsi à Lady Hamilton : “I feel I shall never be... good for anything in this world but composing airs, building towers, forming gardens, collecting old japan... ” (19). À la tête, enfant, d’une fortune colossale, Beckford est critique d’art, écrivain et homme politique. Ce coffre est le laque le plus cher des 51 laques achetés pour son compte par le marchand mercier Darnault le 21 juillet 1801.

1802 - Le coffre du Victoria & Albert Museum est probablement acheté par Beckford lors de la vente sur saisie du stock du citoyen Julliot à Paris, le 1er Germinal an X (2 mars 1802). Le procès-verbal de la vente relève, en effet, sous le numéro 266 : « un grand coffre carré-long, dont le dessus et le devant en panneaux de laque du Japon à figures » (20).

On retrouve deux coffres, en 1812, dans la propriété de Beckford, Fonthill Abbey, Wiltshire (Royaume-Uni) : « on the east side of the Gallery stood “a large Japan chest inlaid with curious devices in pearl and silver ; the bordering… uncommonly rich”, the famous Mazarin chest together with more lacquer , was in the Oratory » (21).

1823 - La vente des collections de Beckford, à Fonthill Abbey, par Phillips, est un évènement marquant de l’histoire du goût et des collections. Le coffre présenté à Cheverny est l'un des fleurons de la King Edwards Gallery. Il est ainsi décrit : « A SUPERB COFFER OF RAISED JAPAN, presumed the largest specimen known of this superior quality ; the LID without and within, as also the FRONT and SIDES, are covered with representations of buildings and landscapes, of the finest raised and spangled Japan, and with animals in SOLID gold and silver. This unique specimen of Japanese art was formerly the property of CARDINAL MAZARIN, and belonged, subsequently to the DUC de BOUILLON. » (22) Vendu le 27 septembre 1823, le quinzième jour de vente, il porte le numéro 576. Il est vraisemblablement racheté par Beckford, par le biais d'un intermédiaire nommé Swaby, pour la somme de 131 livres et 5 shillings (23). On retrouve ensuite le coffre chez le gendre de William Beckford, Alexander Duc de Hamilton.

Rouillac | Coffre Mazarin, Alexander Hamilton, 10e Duc de Hamilton
Alexander Hamilton, 10e Duc de Hamilton

1844 –Alexander Hamilton, 10e Duc de Hamilton (1767-1852), épouse, en 1810, Susan Euphemia Beckford (1786-1859). Le couple installe ce coffre dans le château de Hamilton Palace en Écosse. Le Metropolitan Museum of Art, le Waddesdon Manor, le Getty Museum, le Louvre ou la Frick Collection s’enorgueillissent aujourd’hui de meubles provenant de cette demeure disparue. Sous le socle en bois doré de ce coffre est collée l’étiquette : « William Murray Cavrer & Gilder To His Grace the Duke of Hamilton & Brandon 25 Buchanan Street Glasgow, Architectural Coats of Arms, Ships and Furniture Carving… »

Rouillac | Coffre Mazarin, William Douglas-Hamilton, 12e Duc de Hamilton
William Douglas-Hamilton, 12e Duc de Hamilton

1882 - Ruiné, leur petit-fils, William Douglas-Hamilton, 12e Duc de Hamilton (1845-1895), se sépare des collections de Hamilton Palace en 1882. Christie, Manson & Woods organisent la vente qui dure treize jours24. T. M. Whitehead acquiert, à cette occasion, le petit coffre en laque noir et or numéro 147, présenté comme provenant de l’ancienne collection de Napoléon Ier, pour la somme de 735 livres 25. Ce petit coffre, avec une clé française du XVIIIe siècle aux armes des Mazarin-La Meilleraye, est ensuite revendu 772 livres26 au musée de South Kensington, aujourd’hui Victoria & Albert Museum (27).

Ce coffre est le seul réputé provenir de la prestigieuse collection du Cardinal de Mazarin, Duc de Bouillon, Fonthill. Il est ainsi décrit : « A VERY FINE OBLONG COFFER, OF OLD JAPAN LACQUER, with a large landscape, buildings, threes and a river, with a bridge and figures in the foreground, in border of birds and scrolls, animals and birds in gold and silver in relief, similar landscapes on the front and ends and inside the lid, black and gold trellis-border, with circular ornaments, inlaid with mother-o’-pearl, chased metal-gilt mounts –on carved and gilt wood stand -4ft. 6 in. by 2 ft 3 in. From the Collections of the Cardinal Mazarin, the Duc de Bouillon and Fonthill ». Il est vendu le 10 juillet 1882, onzième jour de vente, sous le numéro 1165, pour la somme de 682 livres et 10 shillings à Sir Trevor Lawrence.

Rouillac | Coffre Mazarin, Sir Trevor Lawrence
Sir Trevor Lawrence

1882 - Sir James John Trevor Lawrence, 2nd Baronet (1831-1913), est Président de la société royale d’horticulture, philanthrope, mais est également collectionneur. Lors de la vente d'Hamilton, il achète d’autres objets d’art asiatique, pour un montant total de plus de 794 livres. Ses boîtes en laques sont exposées en 1894 au Burlington Fine Art Club. Sa « Collection d’art japonais » est publiée, à compte d’auteur, à Londres en 1895. Le coffre, numéroté 1110, est l’objet « le plus remarquable » de sa collection. Il est reproduit en frontispice sur une double page. L’intérieur et le couvercle sont, chacun, reproduits sur une pleine page. Il est ainsi décrit : « HITSU (a chest).Probably used as a receptacle for robes. Size, 4 ft. 8 in. long, by 2 ft. 2 in high 2 ft. 4 in. wide ; decorated on all sides with scenes in gold lacquer on black, contained within a triple bordering of diapers and floral designs in gold and mother-of-pearl. The scenes depicts flowers gardens, building, bridges, and ornamental waters, in and by which Court ladies and children walk and play. The chest is bound with brass and gilt angle plates, decorated hinges, and fittings, the plate surrounding the keyhole having an elaborate design with a panel upon a nashiji ground » (28).

Son inventaire après décès, rédigé en 1914 par William J. Hipkin, ne mentionne qu'un seul coffre en laque asiatique : « Chinese lacquer chest, inlaid mother o’pearl – 3ft. 4in. x 4ft. 4in ». Localisé dans la chambre londonienne du baronnet, il n'est évalué que 30 livres (29). Est-ce le nôtre ? Rien n’est moins sûr... Le coffre était plus probablement conservé dans sa propriété de Burford à Dorking dans le Surrey.

La vente de sa succession s'étale sur trois sessions en mai, novembre et décembre 1916. Le coffre porte le numéro 262. Il est ainsi décrit : « A JAPANESE LACQUER CHEST, with lifting top, the pannels finely decorated with landscapes, scenes in the ground of a palace, buildings and figures, in black and gold and nashiji lacquer, with inlay of metals and mother of pearl, crests and diaper-ornaments roudnthe border : the interior of the lid decorated with hunting scenes on a nahiji ground ; with engraved metal-gilt mounts, the lock-escutcheon chased and gilt with dragons. 4 ft. 9 in wide -on stand. From the Collection of Cardinal Mazarin, the Duc de Bouillon, and Fonthill. From the Hamilton Palace Collections, 1882. See illustration » (30). Présenté le troisième jour de la première vente, le 29 mai 1916, organisée par Christie, Manson & Wood, il est acheté par Sir Clifford Cory.

Rouillac | Coffre Mazarin, Sir Clifford Cory
Sir Clifford Cory

1916 - Sir Clifford John Cory, 1er Baronnet (1859-1941), achète le coffre qu’il conserve dans sa propriété de Llantarnam Abbey dans le Pays de Galles (Royaume-Uni). Cet industriel, homme d’affaire et politicien libéral décède le 3 février 1941. Ses collections sont vendues aux enchères en pleine Bataille d’Angleterre. Le coffre est décrit comme « a large Chinese Chest »31. Aucune autre trace de cette vente ne nous est parvenue (32).

1941 – Le docteur Zaniewski et son épouse achètent probablement ce coffre lors de la vente Cory. Grands amateurs, les époux Zaniewski, d’origine polonaise, conservent le coffre dans leur hôtel particulier londonien, à Dorin Court, South Kensington. La plus grande discrétion entoure cependant ce coffre, dont le lieu de conservation n’est plus connu des amateurs.

1970 – Un ingénieur français de la Shell Petroleum, locataire londonien et ami du Docteur Zaniewski, lui achète ce coffre pour une somme symbolique. Ce coffre suit les pérégrinations professionnelles de son propriétaire, retrouvant le sol français lors de la retraite de celui-ci en Val-de-Loire en 1986.

Rouillac | Coffre Mazarin, The Lawrence chest
The "Lawrence chest" reproduit par Impey avant sa découverte par Rouillac

Dans les années 1980, le Victoria & Albert Museum, qui conserve le petit coffre acheté à Hamilton Palace et la boîte Van Diemen offerte par les héritiers de Trevor Lawrence, publie un avis de recherche de ce coffre dans le magazine « Country Life », puis dans les années 2000 sur les pages de son site internet33. Le musée s’interroge : “How can a chest of such supreme quality and exceptional size have disappeared like this? Did it suffer at the hands of enemy action during World War II, or is it gathering dust somewhere in a proverbial attic, unrecognized for what it is by its current owner? The V&A is very keen to locate the Lawrence Chest or identify who bought it from the 1941 sale, as this would be of enormous benefit to our research on the Mazarin Chest.” Sans succès.

2013 - Philippe Rouillac, commissaire-priseur, retrouve ce coffre en Touraine (France) plus de soixante-dix ans après son dernier passage en vente publique. Ce meuble, qui est l’un des plus convoités au monde -avec seulement 13 propriétaires, dont Mazarin - avait tout simplement été transformé… en bar !..

Il est présenté aux enchères publiques dans le cadre du Château de Cheverny le 9 juin 2013, comme pièce phare, de la 25e vente Garden-party à la française.

Aymeric ROUILLAC, commissaire-priseur

NOTES


1 - Rupert FAULKNER,, « The Mazarin Chest», Perspective: The Japan Fondation in London Newsletter, Londres, septembre 2003.
2 - Meiko NAGASHIMA(dir.), « Japan Export Lacquer : Reflection of the West on Black and Gold Makie», catalogue d‘exposition à Kyoto, 2008, p. 308.
3 - NAGASHIMA, ibid, p. 39.
4 - YY.. YOKOMATO, « Jûroku-seiki Nichi-Ou kôtû-shi no kenkyû (Étude sur l’histoire des commerces entre le Japon et l’Europe au XVIesiècle); livre III, chap. I Kobe, 1942. Dagh-Register (Nagasaki, article du 14 août 1641).
Cité par Tomiko YOSHIDA-TAKEDA, « Les paravents collectionnés par le cardinal Mazarin (1602-1661) », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 148e année, N. 4, Paris, 2004. P. 1492.
5 - Olivier IMPEY et Christian JÖRG, « Japanese Export Lacquer, 1580-1850 », Hotei Publishing, Amsterdam, 2005, p. 247.
6 - IMPEY, ibid p. 247.
7 - Arch. Minist... Aff. Étr., Corresp. Polit., Hollande n° 58, fol.174 vo., lettre de de Thou à Mazarin, 31 janvier 1658 ; voir aussi, ibid., ses lettres-rapports, février-mai 1658.
Cité par Tomiko YOSHIDA-TAKEDA, « Les motifs décoratifs des objets d’art asiatiques collectionnés par le cardinal Mazarin (ob-
jets de laque et paravent) », Comptes rendus des séances de l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres, 146eannée, N. 4, 2002, pp. 1328-1329.
Consulter également à ce propos Tomiko YOSHIDA-TAKEDA, « Les paravents collectionnés par le cardinal Mazarin (1602-1661)», Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 148eannée, N. 4, Paris, 2004., p. 1488-1492.
8 - Tomiko  YOSHIDA--TAKEDA, « La décoration intérieure du palais Mazarin et sa collections d’art décoratif de l’Extrême-Orient (Chine et Japon) », in Mazarin les Lettres et les Arts, Monelle Hayot, Saint-Rémy-en- l’Eau, 2006, p. 192.
9 - Henri Eugène Philippe Louis d'Orléans duc d'Aumale, « Inventaire de tous les meubles du Cardinal Mazarin dressé en 1653 », Whittingham et Wilkins, Londres, 1861.
10 - Gabriel, Jules, comte de COSNAC, « Les Richesses du palais Mazarin », Renouard, Paris, 1884. p. 123
11 - Tomiko YOSHIDA-TAKEDA, « Inventaire dressé après le décès en 1661 du Cardinal Mazarin », Académie des Inscriptions, Paris,2002, p. 161.
12 - Olivia ANTONI, Conservateur aux archives du palais et à la bibliothèque de Monaco, a identifié une vingtaine de coffres en laque dans l’inventaire après décès, en 1699, d’Hortense Mancini.
13 - « Du Testament et ordonnance de dernière volonté de feu très illustre... Julles cardinal Mazariny,... reçeu au chasteau de Vincennes par Nicolas le Vasseur et François le Fouyn, le sixième jour de mars 1661, et codicille... », feuillet n° 35.
14 - Geneviève LACAMBRE, Conservatrice générale honoraire du patrimoine, nous a communiqué cette référence retrouvée dans les Archives du palais princier de Monaco, sous la cote S. 118.
15 - Geneviève LACAMBRE, Conservatrice générale honoraire du patrimoine, nous a communiqué cette référence retrouvée dans les Archives du palais princier de Monaco, sous la cote S. 179.
16 - Jean-Baptiste, Pierre, LEBRUN « Catalogue raisonné des marbres... formant le cabinet de madame la Duchesse Mazarin», Hôtel de Lubert, Paris, 1781, p. 94
17 - Francis J.B. WATSON, «Beckford, Mme de Pompadour : the Duc de Bouillon and the taste for Japanese Lacquer in eighteenth century France» la Gazette des Beaux-Arts, Paris, février 1963, p. 125-126.
18 - BODLEIAN University, « List of items bought by W. Beckford at his sale 1801 : MS Beckford c. 37, fols. 69-71, Oxford ».
19 - WATSON, ibid, p. 107.
20 - Geneviève LACAMBRE, Conservateur honoraire du patrimoine, nous a communiqué les références de cette vente, suite à ses recherches publiées dans l’article “Les laques du Japon et la France”, in “L’Or du Japon”, I.A.C. Édition d’art, Paris, 2010, p. 52.
21 - STORER, 1812, cité par WATSON, ibid, p. 109.
22 - PHILIPPS, « A catalogue Of The Costly And Interesting Effects Of Fonthill Abbey, Parts 1-6. William Beckford», catalogue de la vente à l’abbaye, du 23 septembre et 16 octobre 1823..
23 - WATSON, ibid, p 118.
24 - CHRISTIES, « The Hamilton Palace Collection. Illustrated priced catalogue of Christies auction’s», Remington, Londres, 1882 p. 153.
25 - « The Hamilton Palace Collection », Ibid, p. 26.
26 - Sir Trevor LAWRENCE, « Catalogue of the collection of Japanese Works of Art...», Marcus B. Huish, Londres, 1895, p. 49
27 - «William Beckford 1760-1844 : an eye for the Magnificient». The Dulwich Picture Gallery, 2001.
28 - Sir Trevor LAWRENCE, ibid, p. 84.
29 - William J.J. HIPKINN, « Estate of Sir Trevor Lawrence, baronet, deceased», Londres, 1914, p. 74.
30 - CHRISTIE & MANSON & WOOD, « Catalogue of the collection of Porcelain object of Art and Decorative Furniture formed by Sir Trevor Lawrence, Br. K.C.V.O.» Londres, vente le 29 mai 1916, p.31.
31 - Joe EARLE, "Genji Meets Yang Guifei : A Group of Japanese Export Lacquers," Transactions of the Oriental Ceramic Society, 47 (1982-3), pp. 45-75.
32 - VICTORIA & ALBERT MUSEUM, « Mazarin Chest: Related Japanese export lacquer in other collections »,http://www.vam.ac.uk/content/articles/m/mazarin_chest_related_objects_elsewhere/
33 - VICTORIA & ALBERT MUSEUM, ibid.

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