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En souvenir de la Pompadour, la vie en rose !

Samedi 03 juillet 2010

Cette semaine, Jocelyne, nous envoie les photographies d’une paire d’assiettes en porcelaine à décor de fleurs qu’elle tient de sa grand-mère. Elle nous demande de l’éclairer « sur l'histoire, l'ancienneté de ces objets et leur origine ». Maître Philippe Rouillac, commissaire-priseur à Vendôme, lui répond.

Cette semaine, Jocelyne, nous envoie les photographies d’une paire d’assiettes en porcelaine à décor de fleurs qu’elle tient de sa grand-mère. Elle nous demande de l’éclairer « sur l'histoire, l'ancienneté de ces objets et leur origine ». Maître Philippe Rouillac, commissaire-priseur à Vendôme, lui répond.

Pleines de charme, ces assiettes polylobées en porcelaine sont peintes au centre d’un décor en réserve de fleurs au naturel. L’aile, à fond rose, est décorée en camaïeu de trois rubans à entrelacs alternés de compositions florales dans des réserves. Les centres des assiettes, appelés « bassins », sont chacun peint d’un églantier rouge et d’un camélia panaché rose et blanc. Ces compositions florales, peintes en réserve sur fond blanc, sont rehaussées de bordures mouvementées de fleurs et feuillages peintes à l’or en léger relief. Cette paire d’assiettes en porcelaine est signée au dos« Rihouet à Paris » pour la Manufacture Rihouet. Installée dès 1820 rue de l’Arbre Sec puis au numéro 7 de la rue de la Paix à Paris, elle devient en 1836 la manufacture Rihouet et Lerosey puis Lerosey seul. Dès lors, produite dans la première moitié du XIXème siècle à Paris, l’on peut situer cette création plus précisément entre 1820 et 1836, sous la Restauration ou le règne de Louis-Philippe. Période pendant laquelle le célèbre céramiste Jacob Petit fait des prouesses de son savoir-faire. Plus extravagant dans ses productions, il créera des modèles de vases ou pots-pourris en porcelaine très décoratifs, avec une dextérité très inventive et sublimant la noble matière.

Mais cette paire d’assiettes ont plus de choses à nous dire. En effet, elle est le résultat d’évolutions esthétiques et techniques et de la recherche botanique. Tout d’abord, au fond rose de ses assiettes s’attache le souvenir de la Marquise de Pompadour, si proche de nous en son château de Ménars. Favorite du roi Louis XV, elle influencera considérablement les arts de son temps. Notamment, elle permettra le réaménagement de la manufacture royale de porcelaine de Vincennes et son transfert à Sèvres au milieu du XVIIIème siècle. Son goût pour la porcelaine et pour la couleur rose amèneront Louis XV à appeler « rose Pompadour » le rose créé en 1757 à la manufacture royale de Sèvres. D’ailleurs, son secret de fabrication sera longtemps gardé à la manufacture. Il sera ensuite très employé sur la porcelaine. La Marquise et la Cour, sous son aura, en feront bien sûr collection. Le Musée du Louvre et les collections royales anglaises conservent d’ailleurs de magnifiques pièces comme des pots-pourris ou des appliques à fond rose et rehauts d’or. Deux ans après la mort de « la Pompadour » en 1764, cette couleur devient moins prisée. Il sera moins utilisé sous le règne de Louis XVI qui voit lui apparaître le motif du nœud de rubans entrelacés, symbole de liens amoureux que l’on retrouve sur nos assiettes. Au XIXème suite à la chute du monopole royal de productions de porcelaine à Sèvres lors de la Révolution, les manufactures parisiennes, comme Rihouet, sont florès. Elles s’inspireront de l’excellence du XVIIIème, de ses couleurs et de ses fleurs, royales ou impériales!

En effet nos assiettes, conservant le souvenir d’une maîtresse de Louis XV et du règne de son successeur, sont aussi très inspirées du travail du botaniste Pierre-François Redouté (1759-1840) pour leur décor central. Appelé « le Raphaël de Fleurs », Redouté s’est attachée à leur étude graphique. Dessinateur et peintre du cabinet de Marie-Antoinette, dessinateur de l'Académie des sciences, peintre de fleurs de l'impératrice Joséphine, professeur de l'impératrice Marie-Louise, Redouté peindra et gravera avec subtilité et grâce des milliers de fleurs. Son œuvre majeure, Les Roses, sera éditée de 1817 à 1824. Son séjour à Londres, ses promenades au Hameau de la Reine et à la Malmaison lui ont permis de devenir et de rester encore aujourd’hui le dessinateur de fleurs le plus brillant. Ainsi l’églantier rouge, rose sauvage symbole de passion, et le camélia, symbole d’excellence sans prétention, sont comme cueillies et fraîchement déposées au centre de ces assiettes. Finement immortalisées sur cette blanche porcelaine, elles sont plus destinées à décorer votre intérieur qu’à orner vos tables pour un dîner, vous risquerez de ternir leur beauté ! Bien qu’un dessert de fruits rouges servi dans ces assiettes, c’est le must !

Légères dans cette bordure à fond rose et rehauts d’or, elles sont pleines de charme et de vie. Sous réserve de prise en main, ces fleurs peintes sur assiettes de porcelaine de Paris au début du XIXème siècle, pourront trouver amateurs autour de cent euros en vente publique. Petit prix pour histoire prestigieuse, il ne manque plus qu’à ses fleurs, leur parfum de printemps !
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