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Il est passé Palissy !

Samedi 10 décembre 2016

Cette semaine, Alain, de Soings-en-Sologne, emmène Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, à la pêche !

En 1565 débute laconstruction d’un bien curieux édicule dans le jardin du palais des Tuileries,à Paris. C’est une grotte artificielle commandée par la reine Catherine de Médicis. Cette lubie est italienne, comme la reine, qui introduit en France cette mode. On agrémente les jardins de grottes dont les parois imitent les stalactites, s’habillent de coquillages et s’ornent de sculptures. Une fontaine en est souvent l’élément central. La plus célèbre, malheureusement disparue, sera la grotte de Thétys, au château Versailles.

Celle desTuileries reçoit, quant-à-elle, un décor en céramique animé d’une kyrielle d’animauxen relief et peints au naturel. Ça grouille de partout : ici un crabe, là un serpent, plus loin une grenouille, des scarabées au plafond, des lézards sur les parois, des poissons, des insectes, des coquillages, des écrevisses, des feuillages divers…! Ils sont d’un réalisme saisissant, et pour cause !

Leur créateur, Bernard Palissy (1510-1589), vient de Saintonge. Il n’a aucune formation de potier mais ne manque pas d’idées de génie. La plus célèbre de toutes : mouler des animaux « sur le vif », pour ensuite les reproduire le plus fidèlement possible ! Les détails sont plus vrais que nature. Sur un moule d’une jambe humaine retrouvé au Louvre, on distingue jusqu’aux plis de la peau,et aux poils ! Il choisit ses argiles avec soin et invente des émaux qui n’empâtent pas les détails. Ces merveilleuses techniques lui vaudront le titre « d’inventeur des rustiques figulines du Roy ». Rustiques figulines, un drôle de nom pour un drôle de bestiaire ! La grotte de la Reine a disparu mais les musées du Louvre et d’Écouen en conservent quelques fragments.

On connait de lui de nombreux plats d’ornement recevant un décor complexe. Ces plats ont trouvé de nombreux amateurs à travers les siècles. Au XIXe, deux écoles de suiveurs de Palissy s’affrontent : Paris et Tours ! Dans cette dernière ville citons Charles-Jean Avisseau (1793-1861) qui perce les secrets du maître et atteint le sommet de son art vers 1843. La fascination pour ces plats est telle,et certaines productions si fidèles aux originaux qu’elles ont facilement tenté les faussaires d’accomplir un méfait…

Brisons le suspens, le plat d’Alain ne vient pas des Tuileries ! De forme ovale, il mesure 39 par 26 cm. Naturaliste, il figure une perche reposant sur un lit de feuillages. L’aile est en outre appliquée de coquillages, d’une libellule et d’un papillon. Bon, vous avez peu de chance de la prendre pour une vraie… Le trompe-l’œil est gâché par les couleurs des émaux mal appliqués et qui ont coulé. D’une manière générale, l’exécution est peu soignée. Il est l’œuvre de François Maurice qui travaillait à la fin du XIXe siècle rue des Rasselins, à Paris.

Nous sommes donc malheureusement loin de la qualité, non seulement des créations de Palissy, mais aussi de celles d’Avisseau le tourangeau. Pour sa grande taille et son caractère décoratif très sympathique, comptez une estimation autour de 100 € s’il est en parfait état. De quoi déguster un bon plat de filets de perche entre amis !
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