FR
EN

Prisées par les collectionneurs, ces statuettes ont été réalisées par un paysan auvergnat

Dimanche 10 novembre 2024

La Montagne, Jean-Baptiste Botella

Un exemplaire d’une statuette en roche volcanique sera en vente lundi au Palais des congrès de Tours. Un objet mis à prix autour de 20.000 €, dont l’origine a longtemps été inconnue. Avant de trouver son créateur dans le Puy-de-Dôme.

Elles ont longtemps été anonymes. Sans origine. Une série de sept statuettes sculptées dans du granit ou de la pierre volcanique ont été acquises en 1940 par Josef Müller, un important collectionneur suisse auprès d’un antiquaire. "Il s’intéressait à des œuvres qui n’étaient pas dans les canons classiques", retrace Brice Langlois, commissaire-priseur au sein de la Maison Rouillac, à Tours. Ces œuvres ayant des caractéristiques stylistiques proches des monolithes de l’île de Pâques, en Polynésie.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’artiste Jean Dubuffet qui s’intéressait à l’art brut - une forme à l’opposé de l’art élitiste où tout le monde peut créer -, découvre ces bustes et têtes, puis les baptise les "Barbus Müller", en référence au collectionneur d’art. "Au regard du corpus, la plupart des sculptures étaient barbues. Il a donc imposé ce terme", complète le commissaire-priseur.

Le Graal des collectionneurs d’art populaire

Ces créations, à l’origine inconnue, se font peu à peu une place dans les collections des amateurs d’art brut. « Un certain nombre de pièces sont passées dans des ventes aux enchères. Au fil du temps, ces “Barbus Müller” sont devenues le Graal des collectionneurs d’art populaire », ajoute Brice Langlois.

Des dizaines d’hypothèses sont alors formulées sur leur origine. Jusqu’en 2017 où Bruno Montpied, spécialiste d’art singulier, retrouve des images anciennes où des statuettes semblables aux "Barbus Müller" sont disposées dans le jardin d’un cultivateur de Chambon-sur-Lac (Puy-de-Dôme) : Antoine Rabany. De son passé d’ancien soldat, Antoine Rabany (1844-1919), a conservé un surnom : "le Zouave".

« Mais ce n’était pas un sculpteur qui avait une formation », précise Brice Langlois. Bruno Montpied, notamment à l’aide de photos, réussit à déterminer l’époque des créations au début du XXe siècle. Tout en identifiant autour de 80 exemplaires de "Barbus Müller".

Elles étaient vendues pour une somme dérisoire

Si on ne connait pas les motivations de Rabany, le paysan auvergnat aurait tout de même cédé quelques statuettes "sur le bord de la route" pour une somme dérisoire. À son décès, ses petites-filles font le choix de céder le restant de ses créations.

Aujourd’hui, sept exemplaires des œuvres d’Antoine Rabany se trouvent au sein du musée Barbier-Mueller de Genève. Musée qui a d’ailleurs consacré une exposition en 2020 rassemblant une vingtaine de "Barbus Müller" issus de ses collections mais aussi de prêteurs publics et privés. Il est également possible d’apercevoir un exemplaire au Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, à Paris. "Beaucoup de statuettes se trouvent dans des collections privées", détermine le commissaire-priseur au sein de la Maison Rouillac.

Maison qui s’apprête à mettre aux enchères pour le compte d’un collectionneur privé ce lundi 11 novembre, au Palais des congrès de Tours, dans le cadre du salon des métiers d’art, le "Barbu Müller" numéro 59. Une pièce authentifiée par Bruno Montpied. "Aujourd’hui, ce sont des sculptures qui peuvent aussi capter l’intérêt des amateurs d’art contemporain. C’est pour cela que l’on propose cette pièce dans une vente aux enchères de ce type", avance Brice Langlois.

Une œuvre de 37 centimètres de haut, en pierre volcanique sculptée, d’une grande pureté qui devrait être mise à prix autour de 20.000 €.
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :