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Une longue-vue pour voir sans être vu

Samedi 13 février 2010

Le trésor de cette semaine est une longue-vue de la fin du XIXe ou début du XXe en bois et métal portant l'inscription "Day or Nigth, London".

Le trésor de cette semaine est une longue-vue de la fin du XIXe ou début du XXe en bois et métal portant l'inscription "Day or Nigth, London".

Voir de loin sans s’approcher est le rêve de nombreux espions, explorateur, chefs militaires, mais aussi d’astronomes et de géographes. La longue-vue a été créée pour ces personnages à la vie aventureuse ou plus studieuse. Mais c’est par hasard que son invention survient à la fin du XVIe siècle. René Descartes, le grand philosophe français du XVIIe siècle,raconte cette découverte dans son livre « Dioptrique ». D’après lui,c’est un hollandais nommé Jacques Metius, fabriquant de miroirs et de verres décoratifs, qui, un jour, « s'avisa par bonheur de regarder au travers de deux (verres), dont l'un était un peu plus épais au milieu qu'aux extrémités,et l'autre au contraire beaucoup plus épais aux extrémités qu'au milieu, et il les appliqua si heureusement aux deux bouts d'un tuyau, que la première des lunettes dont nous parlons, en fut composée. »

Les plus grands progrès de la science tiennent souvent à des expériences fortuites…. Appelé « télescope »en astronomie, son usage permis à Galilée quelques années plus tard de prouver que la terre était ronde. Appelée« lunette d’approche terrestre » sur terre, elle permit au maréchal Vauban de remporter des victoires militaires au service du roi Louis XIV.Appelée « longue-vue marine » sur mer, elle donna la suprématie à l’Angleterre du XIXe siècle pour conquérir le plus grand empire colonial de tous les temps. Les lointains descendants de cette invention sont fixés sur des satellites en orbite autour de la terre qui enregistrent nos faits et gestes.

Notre modèle se compose d’acajou, de verre et de laiton. Les qualités combinées de ces matériaux garantissent un usage extrême. Jugez-en par vous-même : l’acajou est un bois imputrescible, c’est-à-dire qu’il ne pourrit pas. Ce bois précieux a toujours été recherché : depuis les côtes africaines jusqu’aux îles caraïbes. On l’utilise pour des objets de précision, ainsi le marin au long cour ne risque pas de retrouver sa longue vue mangée par les termites. Le laiton de son côté est un alliage de cuivre et de zinc qui s’oxyde très peu. C’est pourquoi on le retrouvait sur les luxueux paquebots transatlantiques. Une fine couche de corrosion l’atteint parfois, que l’on appelle le « vert-de-gris ». Rien ne vaut pour le nettoyer un mélange de savon, d'ammoniaque et de talc. Le verre enfin a fait l’objet des plus sérieuses recherches scientifiques. La mention « Day or Night » gravée sur le laiton de notre longue-vue signifie que l’on peut se servir de cette lunette d’approche de jour comme de nuit ! Les verres utilisés éclaircissent en effet la nuit les objets regardés :facilitant l’observation des étoiles, ou d’une position ennemie….

Notre longue-vue a été fabriquée à la fin XIXe ou au début du XXe siècle à Londres, principal centre de production à l’époque coloniale. Peut-être a-t-elle participé à des campagnes aux Indes, avant de retrouver le vieux continent européen ? Il est important pour en estimer la valeur de déplier cette longue vue et d’en compter les « tirages ». Les tirages correspondent au nombre de tubes emboités les un dans les autres, qui dépliés séparent le verre oculaire (celui du côté de l’œil) du verre de l’objectif(celui du côté de l’objet à observer). Comptez 80 à 10 € pour une longue vue à tirage simple… et infiniment plus si l’un des propriétaires de cet objet a laissé une place dans l’histoire. Souvenez-vous de Napoléon Ier continuant d’observer la mer depuis son exil de Saint Hélène,avec sa longue-vue de campagne qu’il utilisait le matin de la bataille d’Austerlitz !
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