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Le roi est mort !

Samedi 12 novembre 2016

Cette semaine, Murielle nous fournit l’occasion d’occuper nos soirées d’hiver. Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, raconte :

Les jours raccourcissent, mais les soirées s’allongent ! Le froid aidant, les cheminées accueillent de belles flambées, quelques châtaignes grillées, et les fauteuils se rapprochent de l’âtre. Les jeux d’extérieur cèdent la place aux jeux de société. Parmi eux, il en est un que l’on nomme le roi des jeux : les échecs.
Jeu de guerre, certaines légendes en font le plus ancien jeu intellectuel du Monde. Il serait né en Inde 2 000 ans avant Jésus-Christ, inventé par un brahmane. Ce dernier souhaitait distraire son prince de l’ennui et lui montrer qu’un roi n’est rien sans son entourage. Le jeu se développe rapidement dans le monde arabe et gréco-latin. Tenez-vous bien, c’est avec les échecs qu’Aristote aurait instruit un de ses jeunes élèves nommé Alexandre le Grand !

Il arrive en Occident à la fin du Xe siècle et se diffuse dans la société médiévale à vitesse grand V, tant dans l’aristocratie que dans les foyers modestes. Mais ce n’était pas gagné pour le « plus noble des jeux ». En effet, les Européens y jouent pour de l’argent, ce que condamne l’Église. Et vlan ! Voilà notre jeu purement et simplement interdit ! Mais pas pour longtemps, rassurez-vous. Le jeu perd peu à peu ses attributs guerriers et se charge en moralité et en symbolique. Ses pièces illustrent ainsi la composition de la société médiévale. Une des plus belles œuvres d’ivoire qui nous soit parvenue du Moyen-Âge est d’ailleurs ce jeu d’échecs dit « de Charlemagne ». Il aurait été offert à l’Empereur par le Calife de Bagdad à l’occasion de son Sacre en l’an 800. Conservé au Cabinet des Médailles, à Paris, il date en réalité du XIe siècle. Plus modeste, mais en Vendômois, le château de Fréteval nous a livré une roque en os sculpté (la pièce d’échec que l’on nomme maintenant la tour) lors de fouilles archéologiques réalisées par Claude Leymarios. Elle est présentée au musée deVendôme.
À la Renaissance, les règles changent. On organise alors de grands tournois et les champions sont adulés tels les plus valeureux chevaliers !

Le jeu que nous avons dans nos maisons et ses règles n’ont pas changé depuis le XIXe siècle. Pendant la Guerre Froide, ce sont les deux blocs qui s’affrontent sur le damier à travers leurs champions dans des compétitions ultra médiatisées.
La dernière célébrissime partie d’échec a opposé Garry Kasparov, champion du Monde, à un super-ordinateur, en 1997. L’Homme s’est incliné face à la machine…
Le jeu de Murielle n’a malheureusement pas pu appartenir à Charlemagne ! Les pions sont en laiton ou en bronze et adoptent la forme de personnages chinois. Malheureusement, ceux-ci ne viennent pas plus de la Cité Interdite à Pékin que du palais d’Aix-la-Chapelle ! Nous sommes face à un souvenir de voyage. Comptez ainsi une vingtaine d’euros en brocante pource travail contemporain. En ce lendemain du 11 novembre, précisons que le mot « Échec » vient du persan et signifie « le roi est mort ». Le 11 novembre 1918, ce mot a dû longuement raisonner dans l’esprit du Kaiser Guillaume II, le dernier Roi de Prusse…
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