FR
EN

L’histoire de Paris reproduite en couleurs

Vendredi 07 octobre 2022 à 07h

par Aymeric Rouillac

Cette semaine, Baptiste de Blois soumet à notre expertise une gravure représentant une vue extérieure de l’église Saint-André des Arcs. L’occasion pour Aymeric Rouillac, notre commissaire-priseur, de nous en dire plus sur l’histoire de l’estampe et sa valeur.

L’estampe est un procédé d’impression qui trouve ses origines en Europe au XVe siècle. Inventé quelques décennies avant l’imprimerie de Gutenberg, l’estampe permet de reproduire des œuvres sur papier assez rapidement et participe à la diffusion de l’art partout en Europe. Au cours des XVe et XVI e siècles, la technique utilisée est la xylographie : l’artiste grave une plaque de bois avec un burin, puis encre les reliefs. La plaque est pressée contre la feuille de papier et le dessin apparait en contraste. Le plus célèbre représentant de cette technique est évidemment Albrecht Dürer, grand peintre et graveur allemand. Au cours du XVIIe siècle, une nouvelle technique est employée pour créer des estampes : l’eau forte. Il s’agit de graver une plaque de métal, souvent du cuivre, à l’aide d’un acide. Le procédé permet de réutiliser le support un plus grand nombre de fois que la plaque de bois. Le XVIIIe siècle voit l’apparition de la couleur sur les estampes. La large diffusion de l’estampe permet de constituer une collection d’art à moindres frais, mais aussi aux reproductions scientifiques et architecturales de circuler largement. Enfin, au XIXe siècle, l’apparition de la lithographie signe l’avènement de la reproduction, lui conférant une dimension presque industrielle. La lithographie consiste à utiliser une pierre comme support de gravure, que l’on presse après l’avoir encrée.

On peut reconnaitre une lithographie aux angles arrondis que la pierre laisse parfois sur la feuille. Les autres techniques restent appréciées par les artistes, notamment la gravure sur bois traditionnelle au Japon, dont Hiroshige et Hokusai sont les grands représentants. Au XXe siècle, les plus grands noms de la peinture, comme Picasso pour ne citer que lui, utiliseront la gravure comme un support à part entière de leur art.
L’estampe de Baptiste est probablement une aquatinte du début du XIXe siècle. L’aquatinte est un procédé de colorisation qui consiste à appliquer des pigments de couleurs sur la plaque de cuivre qui viennent colorer le papier après avoir été chauffés. Le sujet est l’église Saint-André des Arcs, une ancienne église parisienne qui fût détruite au cours du XIXe siècle, après servi de temple athée pendant la Révolution. A noter qu’un certain François-Marie Arouet, plus connu sous le pseudonyme de Voltaire, y fut baptisé en 1694 et que Robert Nanteuil, grand graveur français du XVIIe siècle y a sa sépulture. L’église changera de nom, et remplacera Arcs par Arts. Aujourd’hui, à l’emplacement de l’ancienne église se trouve la place Saint-André des Arts, dans le 6e arrondissement de la capitale. Le musée Carnavalet conserve en ses collections une vue presque similaire de l’église.

La gravure de Baptiste semble en bon état. Peu de rousseurs ou de traces d’humidité sont visibles et il n’y a pas de déchirures, usures courantes sur les estampes. Cependant, comme nous l’avons vu, les estampes sont par nature, un moyen de diffuser le largement possibles les images. Il est probable que notre gravure ait été reproduite de nombreuses fois, d’autant plus si elle a été effectivement dessinée au XIXe siècle. De plus, le fait que l’église soit aujourd’hui détruite peut contrarier les amateurs de gravures parisiens souhaitant avoir une vue de leur ville, mais peut intéresser historiens et architectes. C’est pour cela que cette vue extérieure de l’église Saint André des Arcs pourrait trouver amateur aux alentours de 20 euros. Suffisant pour commencer une collection d’estampes à la manière d’un gentilhomme du XVIIIe siècle ou pour s’offrir un billet pour le musée Carnavalet et admirer les merveilles architecturales actuelles ou disparues de la ville lumière !
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :