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Un bon coup de balai pour l’arrivée du Printemps.

Samedi 26 mars 2022 à 07h

Cette semaine, Claude de Romorantin-Lanthenay, nous questionne sur une petite sculpture en bronze. Quelle est la différence entre un bronze et un régule ? Comment réalise-t-on un bronze ? Qu’est-ce qu’un bronze original ? Notre Commissaire-Priseur, Philippe Rouillac, vient clarifier nos pensées.



Les bronzes ornant les cheminées et les commodes sont issus d’un long travail de collaboration entre l’artiste et l’artisan, le sculpteur et le fondeur. Le processus débute avec la réalisation par l’artiste d’une sculpture sur cire. Cette dernière sera recouverte d’argile qui sera cuite. Des orifices, appelés évents, sont aménagés afin de permettre à la cire de s’évacuer lors de la cuisson. Une fois cette étape achevée, il ne reste plus qu’une sculpture creuse en argile qui servira de moule pour accueillir le bronze en fusion. Cette étape est généralement réalisée par un artisan, le fondeur. Cependant, certains artistes se forment et réalisent cette étape eux-mêmes. Des évents sont à nouveau créés pour permettre au bronze d’atteindre les zones les plus difficiles d’accès et au gaz de s’évacuer. Le moule en terre-cuite est ensuite brisé. Enfin, le bronze subit un travail de finition pour retirer toutes ses aspérités et défauts. Le bronze est alors prêt à être vendu, à un détail près : il doit d’abord être numéroté. En effet, les bronzes peuvent être édités à plusieurs exemplaires. Depuis 1967, le législateur a souhaité limiter le nombre de tirages à huit exemplaires commerciaux – numérotés en chiffres arabes – et quatre Épreuves d’Artiste – marquées EA, suivi d’un chiffre romain. Ces douze bronzes sont dits « originaux ». Les exemplaires édités au-delà de cette limite doivent porter la mention « reproduction », conformément au Décret Marcus du 3 mars 1981.

La sculpture de bronze a beaucoup de succès depuis le commencement de l’Humanité, notamment en raison de sa résistance et de la beauté de sa patine. Néanmoins, son coût élevé fait que l’on imite des œuvres célèbres dans un autre alliage, similaire mais moins onéreux : le régule. Ce dernier est composé de plomb et d’étain ou d’antimoine alors que le bronze est composé de cuivre (au moins 65%) et d’étain.

Comment faire la distinction entre les deux ? Le bronze se différencie du régule par plusieurs aspects. De par son poids, tout d’abord : le bronze est plus lourd et plus solide que le régule. Par l’observation de la couleur de la patine sur les zones de frottement ou de griffure : le bronze présente généralement un reflet jaune, alors que le régule présente un reflet blanc. Par l’observation des finitions : le bronze se travaille lorsque le métal a refroidi et durci, ce qui permet d’estomper les défauts du moule. Le régule se travaillant à bas point de fusion, les gravelures, ciselures et autres recherches de détails sont beaucoup plus compliquées à bien réaliser. Enfin, de par sa sonorité : le bronze émet un son aigü alors que le régule émet un son sourd.

La sculpture de notre lecteur est bien en bronze. Elle est signée Henry Fugère (1872-1944), un élève de Cavelier qui expose à partir de 1893 des médailles et des sculptures de bronze. Mesurant dix-sept centimètres de haut, cette œuvre fait partie des nombreux petits bronzes d’édition dont l’existence est permise par le « procédé Collas ». Ce procédé, élaboré par Achille Collas en 1838, permet de reproduire en ronde-bosse différentes œuvres à la taille et dans les matériaux souhaités. L’œuvre de notre lecteur, non sans rappeler le monde de la rue de Poulbot, figure une fillette vêtue d’une robe protégée par un tablier. Elle tient avec paresse le manche d’un balai. Sa tête, coiffée d’un béret, est penchée en arrière. L’expression de son visage, les yeux fatigués et la bouche entrouverte, semble soupirer la légende inscrite à la base de la sculpture « Quelle corvée ». Un bronze aux qualités semblable à celui de notre lecteur peut s’obtenir pour une somme avoisinant les 100 €. De quoi, se donner du courage avant le grand ménage de Printemps.
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