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Un cartel rocaille de tic et de toc

Samedi 20 février 2010

Le trésor de cette semaine est une pendule, un cartel d’applique imitant le style rocaille, probablement créé dans la seconde moitié du XIXe siècle.

Le trésor de cette semaine est une pendule, un cartel d’applique imitant le style rocaille, probablement créé dans la seconde moitié du XIXe siècle.

Un lecteur nous écrit en nous adressant « quelques photos d'une pendule qui appartenait à ma grand-mère (décédée en 1951 à plus de 80ans ». Il précise : « Cette pendule mesure 37 cm de hauteur de 23 cm de largeur et paraît-il des environs de 1850. » Philippe Rouillac, commissaire-priseur expertise cette pendule qui pourrait ne plus faire tic-tac mais tic et toc…

L’art de la pendule connait un moment de grâce au XVIIIe siècle.Aux horloges trapues du règne du roi soleil, succèdent des chefs d’œuvres de légèreté et de précision à l’époque du roi Louis XV. La pendule devient un objet de décoration merveilleux : avec des ouvrages en marqueterie de bois précieux, des supports à l’éléphant ou au Chinois en porcelaine, et surtout des bronzes dorés en forme de feuillages ou de coquilles rocailles…Notre pendule appartient à ce dernier style de la « rocaille ».

Précisons pour commencer que cette pendule est un cartel d’applique : c’est-à-dire une pendule directement fixé (appliquée) au mur.À l’époque Louis XV, le cartel est généralement entièrement en bronze, un matériau qui permet toutes les folies.Car la folie créatrice est la marque de l’art « rocaille ». Toutes les règles de la symétrie ou de l’équilibre sont oubliées. Regardez les fleurettes cachant un serpent sur la partie gauche de notre cartel, elles répondent à un treillage disposé sur la partie droite ! Le cadran est émaillé, avec des chiffres romains pour les heures, et des chiffres arabes pour les minutes. Mais ce cadran n’est pas signé d’un horloger : il devient un élément secondaire tant le décor sculpté attire le regard. Pour renforcer la puissance du décor,les bronzes sont généralement dorés. Le soir lorsque les bougies des lustres et des flambeaux brûlent, la lumière joue et rebondit le long des courbes du bronze doré. Malheureusement la dorure de notre cartel a disparu. Il s’agit plutôt d’une dorure bon marché passée au pinceau que d’une authentique dorure à la feuille d’or.

Observez les aiguilles : elles se terminent par des fleurs de lys, le symbole royal.Deux solutions s’imposent alors. Soit ce cartel a survécu à la fureur révolutionnaire et a miraculeusement conservé ses fleurs de lys caché dans un grenier. Soit il a été créé après la Révolution française, dans le goût des années folles de la rocaille, avec des aiguilles aux fleurs de lys. C’est vers cette dernière proposition qu’il faut se pencher. En effet, les bronzes de notre cartel semblent un peu lourds, et nettement moins ouvragés qu’au XVIIIe siècle. Il manque une nymphe, un vieillard avec sa faux symbolisant le temps ou un Chinois à la pagode dans le décor. Le petit nœud en bas du cartel est lui typique de la fin du XVIIIe siècle, il ne figurerait jamais sur un cartel « rocaille ».

Il s’agit donc d’un cartel d’applique imitant le style rocaille, probablement créé dans la seconde moitié du XIXe siècle. Cette belle pièce a subit les ouvrages du temps, et sa valeur, en l’état, en vente aux enchères serait de 200 à 300 €. Prix à multiplier par 10 pour un beau cartel d’époque Louis XV ! Le balancier manque sur les photos. Aussi, pour réentendre le tic-tac de votre cartel, je vous invite à le confier à l’excellent horloger blaisois Monsieur Mazanec, qui appartient à une dynastie d’horlogers depuis… 1793 ! Une jeunesse pour un cartel rocaille… même du XIXe siècle !
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