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De la ligne à la couleur

Vendredi 29 octobre 2021

La Gazette Drouot, Caroline Legrand

Charles Lapicque (1898-1988), Sans Zaccaria, 1956, toile signée et datée, 130,5 x 81 cm.
Estimation : 20 000/30 000 €
Jean Royère (1902-1981), paire de commodes «Bensaude», vers 1934, en placage de sycomore, ouvrant par quatre tiroirs, 94,5 et 90,5 x 105,5Jean Royère (1902-1981), paire de commodes «Bensaude», vers 1934, en placage de sycomore, ouvrant par quatre tiroirs, 94,5 et 90,5 x 105,5 x 44,5 cm.
Estimation : 10 000/20 000 €

Les maîtres du XXe siècle, Jean Royère en tête, partageront cette affiche avec un important ensemble d’une soixantaine d’œuvres de Charles Lapicque, provenant notamment de sa famille.

C’est en 1934 que le docteur Alfred Bensaude (1908-1982) commande à Jean Royère un ensemble mobilier à l’occasion de son mariage. Cet homme, membre d’une dynastie de médecins, qui deviendra cofondateur de la Société française de proctologie, fait alors preuve d’un goût avant-gardiste. En effet, Royère n’est à Paris que depuis trois années et ne connaît pas encore le succès qui viendra après la guerre. Mais le décorateur autodidacte, qui a abandonné une carrière confortable dans l’import-export au Havre pour se lancer à Paris à l’âge de 29 ans, a obtenu sa première commande en 1933, pour le bar du Carlton sur les Champs-Élysées. Et sa réputation n’a pas tardé à se propager parmi les initiés. Alfred Bensaude le choisit donc pour meubler son appartement de l’avenue Pierre-Ier-de-Serbie. Comme à son habitude, Royère réalise un ensemble cohérent et complet, que l’on connaît d’ailleurs au travers des archives du décorateur, conservées à la bibliothèque du musée des Arts décoratifs de Paris. Restée jusqu’à ce jour dans la famille, cette paire de commodes – auparavant reliées entre elles par un tiroir central et surmontées de trois miroirs – était accompagnée dans la chambre à coucher du couple d’une armoire de même profil (162,5 x 210 x 55 cm), elle aussi présentée, à 10 000/20 000 €. Si ces meubles s’inscrivent encore nettement dans l’esthétique art déco, par leur forme géométrique et l’utilisation du sycomore, ils affichent déjà le minimalisme et l’élégante épure des lignes qui feront la célébrité de Royère.

Place à la science de la couleur, celle de Charles Lapicque, avec une soixantaine d’œuvres provenant notamment de la collection Alain et Violette Merle, cette dernière étant la petite-fille du peintre. Ces tableaux offrent un beau panorama sur la carrière d’un artiste inclassable, qui s’inspira autant du cubisme que des vitraux médiévaux. Il se déploiera de la toile datant de 1938, Le 11 Novembre, où la couleur se fait déjà puissante (10 000/15 000 €), jusqu’à Force huit de 1971 (à envisager à 15 000/20 000 €), en passant par les Manœuvres de nuit, toile de 1958. Celle-ci évoque sa nomination de peintre de la Marine, en 1949, et ses voyages, notamment à Brest en 1958 à bord de l’aviso Pimodan, et est estimée 30 000/40 000 €.

AGENDA

Trois temps forts sont à distinguer dans cette vente intitulée « Art+Design #5 », orchestrée par la maison Rouillac à Tours. Les maîtres du XXe ouvriront le bal : Jean Royère avec une armoire livrée au docteur Alfred Bensaude en 1935 (10 000/20 000 €), accompagnée de sa paire de commodes (10 000/15 000 €), ainsi que Mai-Thu avec une composition de 1942 à l’encre et couleurs sur soie, intitulée La Sieste (40 000/60 000 €).

Charles Lapicque sera ensuite mis à l’honneur à travers près de soixante peintures et dessins brossant un large panorama de sa carrière. On notera les deux huiles sur toile titrées respectivement San Zaccaria, de 1956 (20 000/30 000 €), et Rendez à César, de 1958 (18 000/22 000 €). Enfin, les artistes d’après-guerre et contemporains fermeront la marche. Figure notamment au catalogue le sculpteur espagnol Baltasar Lobo – grand admirateur d'Henri Laurens et qui retranscrit le corps féminin par des modules abstraits tout en exprimant une sensualité manifeste – avec son bronze À la source, fondu par Susse Frères et numéroté 3/8 (140 000/160 000 €). Pierre Chapo sera aussi présent avec quatre bancs en orme massif modèle S38A, de 1973 (1 500/2 000 €), de même que Bernard Dublé avec Scoutor, une sculpture en aluminium datée de 2019 (5 000/8 000 €).
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