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La famille Drake del Castillo au château de Véretz

Mardi 05 janvier 2021

par Brice Langlois, historien de l'art

Les Drake del Castillo figurent parmi les plus illustres familles de Touraine à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, quand bien même leurs origines soient anglaises et espagnoles. James William Drake – dont nous présentons le portrait (n°263) – est issu de l’aristocratie d'Axminster dans le comté de Devon en Angleterre. Il s’établit à Cadix en Espagne pour développer une activité de négoce de vin. Profitant de l’opportunité offerte par l’économie florissante de Cuba au lendemain de la Révolution dans les colonies des Caraïbes,.il installe à la Havane son entreprise d’import-export de produits manufacturés, d’affrètement de bateaux et mène des activités bancaires. Naturalisé espagnol, William James Drake épouse le 17 mai 1800 Carlotta del Rosario Nunez del Castillo y Perez, issue d’une des familles les plus influentes et les plus riches de l’aristocratie cubanespagnole. Les del Castillo détiennent la plus grande réserve foncière cubaine, permettant à James William d’implanter sa propre production de canne à sucre et d’y développer la plantation la plus réputée de l’île. A la faveur de son mariage et à sa prospérité notoire, il intègre la haute noblesse espagnole en étant promu chevalier de la prestigieuse corporation de la Real Maestranza de Caballería de Séville. Ses fils, Carlos, Santiago et Francisco concourent au succès de l’entreprise familiale.

Santiago se fixe plus durablement en France et participe à la direction de l’entreprise depuis Paris. Il se marie à Émilie Friand, puis à Claire Spitz après le décès de sa première épouse. Séduit par les douceurs des bords de Loire de la Touraine, il acquiert le château de Candé auprès de Raoul Le Caron de Fleury. Le château est entièrement rénové et agrandi selon les plans de l’architecte tourangeau, Jacques-Aimé Meffre. Au pavillon Renaissance de François Briçonnet, Santiago Drake del Castillo ajoute une aile et un donjon dans le style néo-gothique. Son fils Jacques prolonge les travaux. Il expose sa collection composée entre autres du Portait de Lorenzo Bartolini par Ingres (Montauban, Musée Ingres) ou de tableaux de Claude Monet avec qui il entretient une relation d’amitié. En tant que président de la Société des Amis des Arts de Touraine, il s’efforce d’exposer les œuvres des impressionnistes dont la Marée basse à Varengeville par Monet (Madrid, Musée Thyssen-Bornemisza). Si Jacques del Castillo s’investit dans la vie culturelle de Touraine, il occupe également des fonctions politiques locales : élu maire de Monts à partir de 1873 et député d’Indre-et-Loire de 1893 à 1906.

L’implantation en Touraine de la famille Drake del Castillo est confirmée en 1878 par l’achat du château de Véretz par la veuve de Francisco. Lieu historique de Touraine, le château connaît trois périodes de construction et de restauration à la faveur de ses différents propriétaires. Démantelé par les Anglais durant la Guerre de Cent Ans, l’édifice est reconstruit au goût de la Renaissance par le chevalier Jean de la Barre, conseiller de François Ier. La porte du château est surmontée de son portrait équestre (n°223) qui est directement influencé par celui de Louis XII ornant l’entrée du château de Blois. Le château de Véretz est un lieu historique en Touraine. En 1598, Henri IV s’y arrête. Il y définit le contenu de l’Édit de Nantes, signé le 13 avril pour mettre un terme aux tensions religieuses et morales du pays. À la Révolution, le château et la chapelle sont détruits et dépecés par la bande noire. Il est reconstruit dans l’esprit néo-gothique par le comte de Richemont qui le cède aux Drake del Castillo. Meublé dans le même style que son architecture (n°287), le château sert d’écrin pour les réceptions comme en témoigne la ménagère par Aucoc aux couverts gravés aux armes de la famille (n°237). Les bijoux habillent les femmes dans un décor composé d’une importante collection de tableaux de maîtres anciens de l’école italienne. Les signatures comme Faustino Bocchi (n°20), Michele Rocca (n°22), Giovanni Maria della Piane dit Mulinaretto (n°43) ou Sassoferrato (n°16) entretiennent l’art de vivre sur les bords de la Loire.
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