Une nuit à chambord

Cette semaine Alain, de Trouy dans le Cher, nous fait parvenir la photographie d’un tableau chiné dans une brocante il y a 13 ans. A-t-il fait une bonne affaire ? Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, lui répond.

Un rapide coup d’œil suffit pour identifier le sujet nocturne de cette toile : Chambord ! Plus précisément la façade Nord du château avec, au premier plan, la tour de la chapelle, puis celle de Dieudonné, comte de Chambord et enfin la tour François Ier. Impossible d’énumérer ici la kyrielle de raisons qui font de Chambord une véritable merveille. Classé au Patrimoine Mondial del’UNESCO, le plus vaste des châteaux de la Loire n’a cessé, depuis le XVIème, de susciter l’admiration de ses visiteurs. Et quel meilleur moyen d’en garder souvenir que de le dessiner, le graver, le peindre ? Cela paraît aussi naturel qu’aujourd’hui de le photographier. Ainsi, les représentations du château sont innombrables. Sujet émouvant pour l’amateur ; sujet intéressant pour l’artiste, notamment du fait de sa fabuleuse architecture. Si les œuvres d’anonymes dorment ici et là, certaines sont très célèbres. Notamment au château de Fontainebleau où, dans la fameuse galerie des Cerfsédifiée par Henri IV, est représenté Chambord et son domaine. À Versailles aussi,où l’on peut admirer l’œuvre de Pierre-Denis Martin, figurant Louis XIV chassant face au château de François Ier. Plus récemment c’est Bernard Buffet qui se laisse séduire par la demeure, réalisant en 1969 une toile mesurant prèsde deux mètres de long. Et il y a fort à parier que nombre de représentations contemporaines sortiront bientôt de l’ombre en même temps que le nom de leurauteur.

L’huile sur toile de notre lecteur, qui mesure 70 cm par100, semble une œuvre de qualité bien que n’étant pas de la «grande musique». Peindre une scène nocturne demande une certaine habileté. Rien de morose ici, pas d’obscurité oppressante. Au contraire même, la clarté du tuffeau blanc irradie et la lumière jaune s’échappant des fenêtres de la galerie et du lanternon réchauffe, rassure. Malheureusement, la qualité de la photographie ne nous permet pas de voir la touche, la « patte » du peintre. La signature en bas à droite « MONTET » est une information précieuse. Elle nous oriente vers Maurice Montet, un postimpressionniste de talent ayant une certaine cote et aimant notamment peindre des scènes nocturnes. Mais la graphie de sa signature diffère trop de la nôtre pour que cette œuvre soit de lui. Nous sommes donc ici face au travail d’un amateur éclairé inspiré par le travail desImpressionnistes et datant vraisemblablement du milieu du XXème. Malgré quelques maladresses, ce tableau relativement bien peint peut se négocier de 60 à 80 euros.

C’est le moment de découvrir une autre merveille du domaine de Chambord : son parc forestier clos, le plus grand d’Europe, où retentit encore le brame du cerf en cette saison.