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Une pendule à l'Antique au goût de Marie-Antoine

Samedi 06 février 2021 à 07h

Cette semaine, Nadine, nous fait parvenir la photographie d’une garniture de cheminée par un horloger de Vierzon. Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, partage son avis.



Guirlandes feuillagées, vases Médicis enflammés, rinceaux et têtes d’aigle animent le décor de cette ravissante garniture de cheminée en marbre et bronze doré rappelant le règne de Louis XVI et de son épouse Marie-Antoinette. Elle se compose de deux candélabres encadrant. Son décor reprend le vocabulaire esthétique de l’Antiquité et sa silhouette invoque la forme d’un portique grec à quatre colonnes. Ces colonnes reposent sur une base ornée d’un rang de perles, leurs fûts sont lisses, sans cannelures ni artifices. La simplicité incarnée ! Quant aux chapiteaux qui les coiffent, on dit de leur forme qu’elle est dorique. Cette forme se distingue parmi une série de trois, classées par l’architecte Vitruve au Ier siècle après J.-C. Il s’agit des styles doriques, ioniques et corinthiens. Chacun des trois ordres renvoient à des caractères, sinon des sensibilités, différents. Ainsi, la volute des chapiteaux ionique est voluptueuse, féminine, en phase avec le caractère de tempérance et le goût pour les arts qui représentent si bien la France. François Ier choisit ce type de chapiteaux pour son tombeau à Saint-Denis… se présentant face à l’éternité comme le protecteur des Arts et des Lettres. L’ordre dorique est en revanche plus sévère. Les théoriciens de l’architecture l’associent généralement à l’homme. Les temples des divinités masculines – Zeus à Olympie ou Apollon à Corinthe – en sont entre autres ornés. En France dans le dernier quart du XVIIIe siècle, il est possible d’associer le roi Louis XVI cet ordre. La fameuse colonne de Nantes figurant le roi vêtu à l’antique est donc coiffée d’un chapiteau dorique.

Mais la garniture de Nadine articule assez finement les genres masculins et féminins pour citer outre le roi.. la reine Marie-Antoinette. Les deux oiseaux aux ailes déployées roucoulant sur deux carquois affrontés, ainsi que le nœud soutenant au centre de la corniche la guirlande fleurie, évoquent les styles champêtres et naturalistes appréciés par la souveraine, comme l’illustre son portrait à la rose peint par Élisabeth Vigée Le Brun. Le style savamment négligé, la nature gaie et fraîche, anime le quotidien de la reine pour éviter l’étiquette de Versailles. Pour cela, elle fuit la cour au hameau du Petit Trianon, construit par l’architecte Richard Mique. Là elle reçoit et éduque ses enfants aux activités agraires et s’improvise bergère, ce que ses contemporains lui reprochent.

La garniture de cheminée de notre lectrice n’a pas été conçue à cette époque mais cent ans plus tard, dans la seconde moitié du XIXe siècle voire du début du XXe siècle. Le cadran à décor feuillagé entre chaque chiffre arabe est typique de la production autour de 1900. Pour cet ensemble, nous pourrions articuler une estimation entre 150 et 300 euros. Un petit conseil, même si le mécanisme ne fonctionne pas, placez au-moins les aiguilles à 10h10, l’heure de la mort de Louis XVI, retenue depuis comme étalon par les horlogers du monde entier pour présenter une pendule !
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