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Le vol de l’aigle sur la ville de Lyon

Samedi 12 décembre 2020 à 07h

Cette semaine, Alain, de Romorantin, nous fait parvenir la photographie d’une affiche. Me Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, nous donne son avis.



Le retour de Napoléon de son exil à l’île d’Elbe porte le nom du vol de l’aigle. A l’instar de l’affiche d’Alain, le rapace est le symbole omniprésent de l’Empire. Le premier mois des cent jours est un raz-de-marée, semblable à la chasse en chute libre d’un aigle, fondant sur sa proie : la France. En 1814 les armées de l’Europe coalisée défont l’armée française lors de la campagne de France. Après le traité de Fontainebleau, Napoléon abdique et s’exile sur l’île d’Elbe. Mais comme le disait lui-même l’Empereur : “Les hommes de génie sont des météores destinés à brûler pour éclairer leur siècle.”

Le 1er mars 1814, Napoléon débarque à Golfe-Juan près d’Antibes et conquiert en moins d’un mois la France entière. L’affiche présentée par Alain, est une relique d’une étape majeure de cet exploit : la traversée de Lyon. L’affection réciproque entre l’empereur et les lyonnais s’explique par la révolte contre la Convention nationale, qui entravait le commerce de la soie – principale activité de la ville – après 1793. Suite aux représailles sanglantes de l’État, Napoléon y est vu comme un libérateur. A son retour en 1814 il est acclamé par la ville qui lui reste fidèle, d’où ces mots restés célèbres : « Lyonnais, je vous aime ». Bonaparte entre à Lyon le 10 mars. Le 15, date de notre affiche, le maréchal Ney, tiraillé entre le Roi et l’Empereur, se rallie finalement à l’aigle, en déclarant la « cause des Bourbons à jamais perdue », en référence à la famille royale française. Le retournement du maréchal Ney qui était censé ramené Napoléon dans une cage de fer transforme complétement la situation : Bonaparte n’est plus un hors la loi, mais bien l’Empereur légitime de retour. Le 16 mars les deux hommes se rencontrent à Auxerre. Napoléon qui avait débarqué avec seulement 1.200 hommes quinze jours plus tôt quitte la ville entouré de 30.000 soldats ! Le 19 mars, Louis XVIIIe s’enfuie de Paris. Le sort en est jeté et le « petit Caporal » retrouve son trône. Comme le dit Ney on « ne peut pas arrêter l’eau de la mer avec les mains », la France est prise sans verser la moindre goutte de sang. La suite des évènements est en revanche un effroyable bain de sang et une retentissante débâcle. Le nom de la morne plaine de Waterloo résonne, depuis le 18 juin 1815 dans les têtes européennes, nul besoin de vous remémorer l’issue de la bataille…

L’affiche présentée par notre lecteur figure un point d’intersection entre la petite histoire régionale et la grande histoire de l’Europe. Malgré son état moyen, elle est d’un grand intérêt historique. Même s’il s’agit d’une affiche de propagande et qu’elle a été tirée à un très grand nombre d’exemplaires, cette double proclamation est rare sur le marché. Il faudrait impérativement l’examiner physiquement pour donner une estimation. Si elle est authentique, plusieurs centaines d’euros, voire d’avantage sont à attendre. Le prix du témoignage d’une épopée glorieuse à travers l’Europe…
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