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Bureau en forme libre

Lundi 02 novembre 2020

par Charlotte Perriand

Charlotte PERRIAND (Paris, 1903 - 1999)
Bureau en forme libre, petit modèle.

Plateau en madrier de pin massif reposant sur trois pieds, agrémenté d'un tiroir en bois et d'une tirette superposée du côté des deux pieds obliques.

H. 72, L. 175, P. 86 cm.
(état d'usage, petits accidents et manques)

Provenance :
- collection Marie-Louise Monnet, Paris.
- offert en cadeau de mariage à Philippe et Anne Carvallo, Paris, 1969.

Nous remercions Monsieur Jacques Barsac qui nous a confirmé que "ce modèle de bureau est très beau.... et rare" et informé de la proximité de Charlotte Perriand avec la fa- mille Monnet.

Bibliographie :
- Jacques Barsac, "Charlotte Perriand - L'œuvre complète, volume 2, 1940-1955", éditions Norma, Paris, 2015, un petit bureau " Georges Monnet " avec ses tiroirs en bois repro- duit p. 269.
- Jacques Barsac, Charlotte Perriand - L'œuvre complète, volume 3, 1956-1968", éditions Norma, Paris, 2017, dessin du modèle reproduit p. 83.

Ça se caresse le bois, c'est doux comme les cuisses d'une femme, Charlotte Perriand

Sœur de Jean Monnet, Marie-Louise Monnet (1902- 1988), fonde l'Action catholique des milieux indé- pendants. Elle est aussi la première femme nommée auditrice au concile de Vatican II (1962-1965). Le choix d'un bureau de Charlotte Perriand, une créatrice de sa génération, pour son appartement de la rue Fran- çois Ponsard dans le 16e arrondissement parisien montre sa liberté d'esprit et son goût pour le siècle dans lequel elle est pleinement investie. En 1969, elle l'offre à l'occasion du mariage de jeunes amis Philippe et Anne Carvallo. Lui est journaliste à l'Agence France Presse et elle professeur agrégée de philoso- phie, enseignant notamment au lycée Louis-le-Grand. Le couple conservera ce cadeau très symbolique dans leur propriété de Touraine jusqu'à ce jour.

Réalisé dans un madrier de pin dont il épouse la forme libre de la bille de bois tout juste débitée, ce meuble illustre l'excellence des fabrications de l'ate- lier Chetaille pour Perriand. Le prospectus des "Meubles en bois massif, bureaux, tables et bahuts Charlotte Perriand" diffusé par les éditions Steph Simons en 1956 précise à côté du dessin de ce modèle : "Ces meubles sont taillés dans des pièces de bois du- ment sélectionnées et assemblées seront les règles de l'art de la charpente. Choix des essences selon les disponibilités. " Assumant ne pas pouvoir faire " de série "mais" de l'artisanat pur, même s'il fait figure de production de luxe" Charlotte Perriand justifie ce choix en 1963 : "C'est pourquoi je dessine ces grosses tables en bois, que j'aime. Du moins sauvegardera t-on ainsi ces belles techniques artisanales, qui ten- dent malheureusement à disparaitre et deviennent par le fait même de plus en plus coûteuses."

Notre bureau dérive de celui en forme galbée dessiné en 1939 pour le bureau d'étude de Charlotte Per- riand, derrière lequel elle pose lors de l'exposition "Synthèse des arts" au Japon en 1953. Elle le décline dans différentes tailles, notamment en 1950, pour l'ap- partement de l'ancien ministre de l'agriculture du Front Populaire, Georges Monnet, rue d'Ulm à Paris. Ses petits bureaux d'enfants comportent alors, comme le nôtre, un tiroir et une tirette en bois. C'est à la fin de son séjour au Japon que Charlotte Perriand entreprend la normalisation et la standardisation de ses différents modèles. À partir de 1956, ce bureau est proposé en deux dimensions par les éditions Steph Simons : une grande et une petite, qui correspond à la nôtre. Toutefois, le tiroir de ce bureau n'est pas un bloc métal comme celui du grand modèle d'édition, mais en bois massif avec une tirette, comme les créa- tions particulières pour Georges Monnet en 1950.

Ce meuble qui est resté jusqu'à maintenant inédit sur le marché, témoigne de la rareté de sa conception et de l'indépendance du choix de sa première proprié- taire. L'Express pronostiquait ainsi avec justesse en 1962 : "Et c'est pour cela qu'en l'an 2000 - si notre monde existe encore - les amateurs de meubles an- ciens achèteront ses créations en expliquant qu'au XXe siècle, tout de même, on savait faire des meuble qui n'étaient pas de pauvres objets sans âme".
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