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Le mouchoir du poilu

Samedi 08 mars 2014

Cette semaine Dany, de St Firmin-des-Prés, nous fait parvenir la photographie d’un mouchoir qu’il a trouvé « plié sous une pile de torchons ». Il lui vient de ses parents, et probablement de ses grands-parents. Désireux d’en connaître l’histoire et la valeur, Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, lui répond.

Cette semaine Dany, de St Firmin-des-Prés, nous fait parvenir la photographie d’un mouchoir qu’il a trouvé « plié sous une pile de torchons ». Il lui vient de ses parents, et probablement de ses grands-parents. Désireux d’en connaître l’histoire et la valeur, Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, lui répond.

Ni broderie, ni dentelle pour ce grand mouchoir mesurant 78 x 68 cm. Fait d’un solide coton, il n’a jamais porté le monogramme d’une jolie dame car il est fait pour la guerre ! En effet, deux ans après la cuisante défaite de 1870, la France met en place la conscription générale pour tous les citoyens mâles afin de redonner au pays une armée puissante. Le fait est que se trouvent parmi ces « bleus » de nombreux analphabètes, certains ne parlant pas même français ! Se pose alors la question de leur formation... L’idée naît de transformer en pense-bête un objet usuel qui se trouve dans toutes les poches : le mouchoir. Ainsi, de 1880 à1905, l’armée fait imprimer à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires 13 types de mouchoirs d’instruction portant tous la même devise : « Fais ce que dois, advienne que pourra et tu seras pour tous un bon citoyen, bon soldat et honnête homme ».

Les textes sont d’un commandant de la garnison de Rouen et la gravure comme l’impression sont confiées à des ateliers rouennais. C’est donc sans surprise que ces mouchoirs sont bientôt appelés « mouchoirs rouennais ». À titre d’exemple, le N°3 porte sur la cavalerie, le N° 9 sur le fusil 1886 et le N°7 sur le secours aux blessés et l’hygiène. De couleur noire et rouge, ils sont divisés en deux parties. Au centre, les instructions générales et, sur le pourtour, la marche à suivre dans des situations particulières. Pour ceux quine savent pas lire, les images sont là pour les épauler.

Le mouchoir de notre lecteur est le N°5, traitant l’artillerie de campagne. Tout y est pour devenir un canonnier modèle ! Lors de la 1ère Guerre Mondiale, les Poilus, grâce aux dimensions du « mouchoir », lui trouvent un triple usage. Humidifié, il permet de se protéger le visage des gaz allemands avant l’arrivée des masques ; porté autour du cou en foulard et, en cas de blessure, pour nettoyer la plaie, porter un bras en écharpe ou serrer une attelle.Ces mouchoirs, nous l’avons dit, ont été édités à de très nombreux exemplaires. Faits d’un solide coton et d’une encre capables de résister aux horreurs de la guerre et aux affres du temps, beaucoup nous sont parvenus.

En parfait état, comptez environ 80 €. Mais prenez garde aux mauvaises copies faites en Chine et vendues sur internet une dizaine d’euros. Vous les reconnaîtrez à leur taille réduite, à un tissu fin et à une impression de piètre qualité. D’autres copies sont plus difficiles à démasquer. Ce sont celles faites par les Musées Nationaux dans les années 80. De belle qualité, elles se négocient entre 20 et 50 €. D’après photo, impossible de trancher !
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