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Résolument Chocolat

Samedi 15 février 2014

Cette semaine, une lectrice Vendômoise souhaite en savoir plus sur un « presse-agrumes » en céramique monté sur un manche de bois. Maître Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, mène l’enquête.

Cette semaine, une lectrice Vendômoise souhaite en savoir plus sur un « presse-agrumes » en céramique monté sur un manche de bois. Maître Philippe Rouillac, notre commissaire-priseur, mène l’enquête.

Cet élément en céramique mesurant 8 cm de long est, plus précisément, en porcelaine. Il est émaillé d’un décor en relief et en aplat de brindilles bleues. Il est vrai que ses nombreuses côtes saillantes le font ressembler à s’y méprendre à un presse-agrumes mais il n’en est rien ! Il s’agit en réalité d’un moussoir à chocolat, utilisé pour dissoudre le chocolat râpé dans du lait ou de l’eau et obtenir une mousse onctueuse. Pour ce faire, le long manche en bois tourné (30 cm), sortant de l’orifice ménagé au centre du couvercle de la chocolatière, doit être saisi entre les paumes des mains et roulé avec énergie. Pensez bien que lorsque le chocolat arrive –discrètement-en France à l’occasion du mariage de l’Infante d’Espagne Anne d’Autriche avec Louis XIII en 1615, il ne s’agit pas, pour déguster cette boisson, de placer une pastille dans une machine et de presser sur un bouton !

En provenance d’Amérique latine, la fève de cacao débarque en Espagne à l’occasion du retour du conquistador Hernán Cortés qui l’offre à l’Empereur Charles Quint en1529. Breuvage des Dieux outre-Atlantique, il devient breuvage de Couren Europe. La Reine Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV, introduit à la Cour l’usage de la chocolatière (et de son moussoir) et fait du chocolat un breuvage royal que l’on offre en collation les jours de divertissement à Versailles. Les élites l’adoptent rapidement, à l’image de la marquise de Sévigné qui se désole à l'idée que sa fille ne trouve pas de chocolatière à Lyon… Aussi, lorsque Marie-Antoinette d’Autriche vient en France épouser Louis XVI, elle est accompagnée de son chocolatier personnel : un Viennois expert en l'art d'accommoder le chocolat avec de "la poudre d'orchidée, de la fleur d'oranger ou du lait d'amande". Le chocolat, rare et recherché, restera une denrée réservée aux personnes les plus favorisées jusqu’au milieu du XIXème siècle. Ce sont des entreprises comme Poulain, fondée à Blois en 1848, qui ont le plus contribué à la diffusion commerciale du chocolat dans toutes les couches de la société.

Il est peu courant de rencontrer des moussoirs en porcelaine. Ils sont généralement faits de bois. Celui-ci présente un décor proche de celui dit « à la brindille » réalisé à la Manufacture de Chantilly à partir de 1751. Décor qui n’est pas non plus sans rappeler le« Blue Onion » produit par la Manufacture de Meissen (en Saxe) entre le XVIIIème et la fin du XIXème. Sans voir l’objet, impossible de trancher et de la dater ! Le manche est probablement rapporté mais n’enlève rien à l’intérêt de cet ustensile qui, en bon état, peu se négocier autour de 50 € et vous inspirer, le mauvais temps aidant, la confection d’un chocolat à l’ancienne !
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