FR
EN

Nostalgie libertine d’un buste en bronze

Samedi 11 janvier 2020 à 07h

Cette semaine, Dominique nous fait parvenir la photo d’un buste de femme en bronze, de 42 cm de hauteur. Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, nous partage son avis.



Que penser du regard de biche effarouchée de cette élégante à la tenue affriolante ? Coiffé d’une plume d’aigrette, le modèle est paré d’un simple ruban noué autour de son cou et vêtu d’une robe découvrant un important décolleté. Le drapé aux innombrables plis se termine par des motifs végétaux stylisés, faisant transition avec le piédestal à doucine qui supporte l’ensemble de la composition. Le bronze patiné est signé « Dubois » au revers de l’épaule droite.

Ce portrait nous plonge au XVIIIe siècle, témoins des grandes heures d’un roi galant…. Comment en effet ne pas penser aux maîtresses de Louis XV, comme Madame du Barry ou la Pompadour à Ménars ? Pour autant, cette œuvre n’est pas le fruit d’un artiste du siècle des Lumières, mais d’un auteur du XIXe siècle, nostalgique de l’Ancien Régime. Face à l’industrialisation et aux progrès techniques et technologiques, le XIXe siècle est en effet propice au retour de nombreux styles hérités d’un passé idéalisé. L’Antiquité, le Moyen-Âge ou la Renaissance sont le leitmotiv des artistes, et très demandé par les amateurs. Sous le Second Empire, l’impératrice Eugénie recréé même dans les salons du thé du château de Compiègne un décor de style Louis XVI, composé à la fois d’éléments anciens provenant des Garde-meubles de la Couronne et de mobilier contemporain dans le goût du XVIIIe, commandés aux meilleurs artisans. On parle alors de style « Marie-Antoinette-Impératrice » pour illustrer l’imprégnation artistique des deux souveraines. Si les sources d’inspiration sont nombreuses, des critiques émanent néanmoins contre ce style éclectique, à l’exemple d’Alfred de Musset qui conclue amèrement qu’il « n’y a pas de style à [son] temps ».

La signature « Dubois » est-elle celle du sculpteur Paul Dubois (1829-1905), chef de file des artistes dit « florentins », car inspirés par la Renaissance italienne… ? Revenu à Paris après quatre ans de séjour à Rome, il présente au Salon de 1865 son célèbre Chanteur Florentin, dont un exemplaire est aujourd’hui conservé au Musée d’Orsay. Rien n’est moins sûr, il faut plutôt y voir celle d’un homonyme vers 1900. Au regard de la photographie parvenue, il semble que le buste soit bien en bronze, ce qui permettrait d’estimer ce charmant modèle entre 150 et 300 euros. Un conseil pour l’entretient : rien n’interdit à la caresse des yeux d’adjoindre celle de la paume de la main afin d’aviver la patine de votre bronze… renouant également avec le geste d’un roi galant !
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :