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Au-delà du miroir...

Samedi 04 mai 2013

Catherine, de Ruan, se demande quelle peut être la valeur et l’époque de fabrication d’un grand miroir. Philippe Rouillac, commissaire-priseur, répond à sa demande.

Catherine, de Ruan, se demande quelle peut être la valeur et l’époque de fabrication d’un grand miroir. Philippe Rouillac, commissaire-priseur, répond à sa demande.

Tel Narcisse contemplant son reflet dans les eaux, nous plongeons dans ce miroir. De belles dimensions, 110 x 140 cm, il se destine au-dessus de la cheminée ou de la commode d’un salon. Sa forme rectangulaire, classique et sévère, est adoucie par une ornementation tout en mouvements. Plusieurs registres de frises alternent d’élégantes coquilles et des branchages enlacés nommés « rinceaux ». Des baguettes moulurées encadrent ces éléments pour mieux les mettre en valeur. La structure est en bois, le plus souvent du hêtre. Il est d’abord mouluré, puis sculpté avant de recevoir une couche de stuc, genre de plâtre, enduit à base de chaux. Le voici alors près pour son ultime habillage, la dorure. La glace semble en bon état mais seul un examen physique permettrait de déterminer s’il s’agit d’une glace moderne ou bien d’une glace au mercure. Cette technique, employée dès le XVème siècle, subsiste jusqu’en1850, date de son interdiction. À cause des vapeurs de mercure, les artisans miroitiers ne dépassaient pas les 30 ans ! Le besoin qu’a l’homme de se mirer remonte aux âges les plus anciens. Les Égyptiens utilisent le métal, ou certaines pierres sombres comme l’obsidienne, qu’ils polissent pour en faire de petits miroirs. Au Moyen-Age, en Europe, apparait la technique de la plaque de verre appliquée sur une plaque de métal poli. Au XVème et le XVIème siècle, c’est l’âge d’or des maîtres miroitiers ! Les plus célèbres sont les artisans de Venise qui, confinés sur l’île de Murano, améliorent la découverte du miroir étamé et la technique au mercure. Les doges menaçaient de mort quiconque oserait fuir l’île et divulguer ses secrets de fabrication ! Mais inévitablement, ces secrets s’échappèrent et l’Allemagne en fût le premier bénéficiaire. Au début du XVIIème siècle, en France, Colbert ouvre la manufacture française des glaces dont la plus belle œuvre sera la célèbre « Galerie des Glaces de Versailles » conçue par Jules Hardouin-Mansart vers 1680.

Le miroir de notre lectrice ne provient pas de l’illustre Galerie ! Il est cependant de belle facture et date de l’époque de la Restauration, premier tiers du XIXème siècle. Les angles sont un peu fendus, comme c’est le cas pour de nombreux miroirs anciens. Ceci est dû au travail du bois, matériau vivant. Elle est cependant en bon état et seule la datation de la glace elle-même est à confirmer. En vente aux enchères, comptez autour de 500 euros. Une coquette somme pour ce miroir qui à coup sûr n’est pas un miroir aux alouettes !
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