FR
EN

Un soleil prometteur… qui pâlit rapidement !

Samedi 07 septembre 2019 à 07h

Cette semaine, Christian, un loir-et-chérien nous fait parvenir la photo d’une céramique de Picasso, Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, nous donne son avis.



Picasso, voilà une signature prometteuse sur l’objet que nous envoie Christian. Il s’agit d’un vide poche en faïence de forme carrée, à décor émaillé de différentes teintes de bleu, dit en camaïeu de bleu d’un soleil personnifié. Au revers l’inscription « MADOURA PICASSO 21.3.53 ». Pablo Picasso, d’origine espagnole est considéré comme l’un des plus important artiste du XXe siècle, et fondateur du cubisme. Son œuvre est importante et à sa mort il laisse près de 50 000 œuvres dont près de 2 000 tableaux, 1 300 sculptures, 8 000 dessins, 350 tapisseries et… 3 000 céramiques. C’est durant l’été 1946 que Picasso visite à Vallauris l’exposition annuelle des potiers, Il rencontre Suzanne et Georges Ramier, propriétaires des ateliers Madoura (Ma pour maison, Dou pour Douly du nom de jeune fille de Suzanne et Ra pour Ramier). Les époux Ramier sollicitent l’artiste qui modèle un faune en terre. Lorsque Picasso retourne à Vallauris l’année suivante il voit son faune que le couple a cuit et est séduit par le résultat. À partir de ce moment, Picasso va s’installer dans les ateliers et bouleverser la production avec la création de formes et décors nouveaux inspirés de la mythologie, d'animaux fantastiques.

L'atelier est à la disposition de Picasso qui décide de mettre en place des éditions limitées de ses créations. Cet accord permet à l’artiste qui a adhéré au parti communiste à la Libération, de revendiquer une sorte de démocratisation de son art. Dans une lettre à André Malraux, il écrit « J’ai fait des assiettes, on vous a dit ? Elles sont très bien… On peut manger dedans ». Les objets domestiques populaires voulus par Picasso vont rapidement devenir des objets d’art prisés des collectionneurs du monde entier. Une rétrospective de son travail s’est même tenue en 2013 au musée de Sèvres, cité de la céramique par excellence. Sur le marché de l’art, les céramiques de Picasso se négocient à partir de 5.000€ et s’envolent même jusqu’à plus de 100.000 € pour un plat de grande dimensions.

Les céramiques de Picasso sont marquées d’une empreinte en creux des ateliers Madoura accompagnée de la marque des éditions Picasso. De plus elles sont le plus souvent numérotées et référencées dans le catalogue raisonné d’Alain Ramié.

Le petit plat, ou même assiette à dessert de Christian est de forme quadrangulaire ; il mesure 14 par 14 centimètre ne porte aucune de ces marques. Il n’est pas non plus référencé. Au revers, La signature est inscrite en toutes lettres dans les mêmes tons de couleurs que le motif du soleil. Elle semble être inscrite dans l’émail de l’assiette. Pour en avoir le cœur net, il faudrait gratter la signature, si l’encre part, la signature est postérieure. Est également inscrit au revers la date « 21/03/53 » qui correspond bien à la période de production des céramiques de Picasso, de 1947 à 1971. Cependant en 1953, les décors référencés sont ceux de la corrida. De plus le traitement stylistique du soleil et de son visage est très éloigné du travail de Picasso dont les expressions du visage sont suggérées. Il s’agit donc d’un faux même pas une copie, d’un travail dit « à la manière de »!

Malheureusement, cher Christian, la fortune ne vous sourit pas autant que le soleil peint sur cette céramique. Mais servez-vous en comme vide poche !
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :