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JARDINS DE PARADIS… ÉMAILLÉS !

Samedi 04 mai 2019

Cette semaine, Joël interroge Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, afin de connaître la valeur de deux peintures réalisée sur des plats.



Dans nos jardins, les iris emboîtent actuellement le pas aux tulipes pour nous régaler de leur floraison. Joël nous donne l’occasion d’admirer les deux simultanément, grâce à ces plats de grandes dimensions : 47 cm de diamètre ! Ils sont délicatement peints de bouquets traités sans chichis, au naturel, presque sauvages. L’artiste a sélectionné plusieurs espèces d’iris (blanc, germanica jaune et pourpre…) et de tulipes (perroquet, panachées…) dont les différentes teintes et nuances se détachent sur un fond bleu ciel : roses, violets, jaunes et verts. Joël n’est pas certain du support. Il pense à de la céramique, du bois, voire même du plâtre ! Mais l’aspect de ces peintures, et la finesse du trait trahissent un décor émaillé. Ainsi, il s’agit soit de porcelaine, soit de faïence fine, mais impossible de trancher sans un examen physique. Les plats sont des objets utilitaires destinés à présenter de la nourriture. Il paraît en revanche bien compliqué de poser une telle vaisselle, mesurant près de 50 cm de diamètre, sur une table… Et il n’en est pas question ! Nous sommes face à ce que l’on nomme des plats à offrandes, également appelés plats de monstrance. Utilisés dès le Moyen Âge, leur but unique est la décoration. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils se trouvent encadrés, à la manière d’un tableau.

Ces grands plats sont très à la mode dans la seconde moitié du XIXe siècle. Les plus célèbres sont probablement ceux réalisés à Paris par le céramiste Théodore Deck. Ne se refusant aucun décor, il fait appel à divers artistes pour orner ses créations. Sa renommée croissante le conduit, à la fin de sa carrière, à diriger la prestigieuse manufacture nationale de Sèvres. À ses débuts à Paris, dans les années 1850, il aurait pu engager un petit apprenti peintre sur porcelaine nommé… Auguste Renoir ! Il n’en fit rien, et les plats de Joël, qui nous rappellent au bon souvenir de l’un et l’autre, ne sont malheureusement ni de l’un, ni de l’autre.

Ils sont l’œuvre d’une jeune femme qui les signe : Laure Bardoux. Comme l’indique l’étiquette d’un transporteur au dos d’un cadre, elle était élève aux Beaux-Arts en 1883. Elle les expose au public cette année-là, en témoigne une étiquette numérotée, collée à même la céramique. Si son coup de pinceau peut être salué, son talent n’a pas suffi pour la rendre célèbre. Aucune trace d’elle sur le marché de l’Art ! Voilà qui n’enlève rien à la qualité de son travail, et à l’aspect très décoratif de ces œuvres qui, en parfait état, peuvent être estimées 200 à 300 € la paire.

Voilà qui nous donne l’occasion de saluer la 28e édition du Festival International des Jardins de Chaumont-sur-Loire, « Jardins de Paradis », dont le vernissage a eu lieu hier. Et aussi de vous glisser, chers lecteurs, cette information : Chantal Colleu-Dumond (la directrice du domaine) a annoncé au président Macron à Amboise avant-hier qu’une nouvelle fleur - ni une tulipe, ni une iris – mais une nouvelle « rose Chaumont » sera présentée prochainement. Un paradis embaumé !
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