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Polémique du trésor de Tavers : Rouillac sort par le haut

Dimanche 05 mai 2019

La Nouvelle République, Christophe Collinet

Aymeric Rouillac et le trésor de Tavers.

Les commissaires-priseurs Aymeric et Philippe Rouillac ont reposé le marteau. C’est l’État qui est désormais propriétaire du trésor gaulois.

En acceptant de mettre en vente 65 objets gaulois découverts en 2012 à Tavers (Loiret) dans un champ, les commissaires-priseurs basés à Vendôme et Tours Aymeric et Philippe Rouillac se sont retrouvés au cœur d’une polémique, une bataille menée par l’association Halte au pillage du patrimoine archéologique et historique. Samedi, jour de la vente, ils en sont sortis par le haut.

On nous promettait une tempête samedi à Meung-sur-Loire, pour votre vente. Comment s’est-elle passée ?

« Nous avons remis les choses à l’endroit pour ce trésor de Tavers ! D’abord en faisant respecter l’état de droit et la loi française qui prévoit que lorsqu’un trésor est découvert, il a un propriétaire. La propriété de ce trésor a été contestée alors qu’elle était parfaitement légale. Et donc nous avons procédé à la vente, samedi après-midi, de ce trésor archéologique, qui date du VIe siècle avant notre ère et constitué d’éléments de parure féminine : des bijoux, des bracelets, des colliers portés par une élite gauloise sur les bords de la Loire voici 2.600 ans. Un trésor, aussi, qui a permis de faire jaillir dans le milieu de l’archéologie des questions sensibles. »

Un trésor… qui a bien failli vous coûter cher !

« Pendant une quinzaine de jours, nous avons entendu des avis tranchés extrêmement violents sur les réseaux sociaux. Il fallait que tout le monde puisse sortir par le haut de cette vente. Alors, de manière inédite, pour la première fois, nous avons reposé notre marteau d’ivoire. On aurait pu prendre des enchères. Nous avons reçu des marques d’intérêt très importantes de la part de collectionneurs et de marchands, mais avec la confiance des propriétaires, le couple d’agriculteur dans le champ duquel ce trésor a été trouvé, nous avons engagé des discussions avec l’État pour le faire entrer directement dans les collections publiques. Cela s’est joué pendant la visite présidentielle à Amboise, jeudi dernier. Le trésor a été acheté directement, avant la vente aux enchères, par l’État au profit du musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye. »

50.000

C'est, en euros, le prix auquel l'État français a acquis ce trésor gaulois. Cette somme correspond au montant de la mise à prix prévue lors de la vente aux enchères.

Les anciens propriétaires sont satisfaits ?

« Ils nous ont dit que ça n’était pas une question d’argent, mais de principe et de respect. Ils ont été vraiment malmenés depuis la découverte de ce trésor en 2012. Ils souhaitaient que les choses se passent bien. Nous avons pensé que cette vente de gré à gré permettrait d’apaiser les esprits. »

Cette affaire n’illustre-t-elle pas la difficulté de concevoir qu’on ne puisse pas être propriétaire d’un objet qu’on trouve sur sa terre ?

« C’est la plus belle histoire que l’on raconte depuis toujours. Jean de La Fontaine, le laboureur et le trésor dans un champ. Le Christ qui dit que vous avez un trésor dans votre champ… On rêve tous de découvrir un trésor. Malheureusement, ce rêve est une chimère parce que depuis 2016 la loi a changé et le trésor que vous découvrez ne vous appartient pas. Il faut le remettre à l’État. Le trésor de Tavers avait été trouvé avant 2016, c’est pourquoi il appartenait bien aux propriétaires du champ, mais il y a eu beaucoup d’émotion autour de sa découverte et de sa vente parce que les archéologues professionnels considèrent que les gens qui font de la recherche avec une poêle à frire (un magnétomètre) font du pillage archéologique en découvrant des trésors sans les étudier et en les faisant disparaître sur un marché parallèle. »
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