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Trésor gaulois de Tavers: une plainte déposée pour empêcher la vente aux enchères prévue samedi

Lundi 29 avril 2019

France Bleu Orléans, Jérémy Marillier

Une partie des 65 pièces du trésor gaulois de Tavers

Le 4 mai, à Meung-sur-Loire, un ensemble de 65 objets gaulois sera vendu aux enchères. Un trésor national découvert en 2012 sur le terrain d'un couple d'agriculteurs. L'association Happah vient de porter plainte contre X afin d'empêcher une vente qui indigne le monde des archéologues.

La vente aux enchères du trésor gaulois de Tavers aura-t-elle lieu comme prévue, ce samedi, au château de Meung-sur-Loire? L'association Happah (Halte au Pillage du Patrimoine Archéologique et Historique) vient de porter plainte contre X pour destruction d'un site archéologique et pour aliénation d'objets découverts dans le cadre de fouilles illégales. L'objectif de cette plainte est clair: empêcher la tenue de cette vente aux enchères.

"Ce que nous espérons avec cette plainte, c'est que ce type d'affaire ne se reproduise pas, assure Jean-David Desforges, archéologue et président de cette association. Chaque année en France, nous avons deux affaires de ce type. Dans le cas de Tavers, nous voulons déboucher sur une procédure qui crée une jurisprudence. La revente de découvertes issues de fouilles non autorisées est punie par la loi, avec des peines de prison et une amende allant jusqu'à deux fois le montant de la vente."

Si la vente aux enchères se déroule comme prévue, Jean-David Desforges espère au moins qu'une procédure judiciaire soit ouverte, avec l'authentification du vendeur et de l'acquéreur.

Ce trésor gaulois de Tavers a été découvert en 2012 dans le champ d'un couple d'agriculteur de Tavers (Loiret), tout près de Beaugency. 65 pièces de métal (des colliers, des bracelets, des armes miniatures) enfouies sous terre il y a 2.600 ans. Des symboles de l'art de vivre au temps des Gaulois. Sans doute le dernier trésor national, reconnu par le ministère de la Culture, à pouvoir être vendu de la sorte. L'affaire du siècle pour certains, ni plus ni moins que le recel d'un pillage pour d'autres.

D'un coté, il y a ce couple d'agriculteurs, les propriétaires du trésor. Ils veulent bien parler aux journalistes mais surtout pas que l'on révèle leur identité. En 2012, des "chercheurs de trésors" son venus sonner à leur porte pour fouiller leur champ. Ils acceptent. Le trésor gaulois est trouvé.Aujourd'hui, les agriculteurs assurent qu'ils ne savaient pas que de telles fouilles sont interdites. Ils affirment avoir tout fait pour remettre les pièces gauloises à l'Etat mais que la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) les aurait baladés pendant plusieurs années, qu'aucun musée ou institution de la région Centre Val-de-Loire ne les a écoutés.C'est donc pour ça qu'aujourd'hui, ils mettent ce trésor aux enchères Ils disent en avoir "ras la casquette de ces objets gaulois qui leur causent bien des soucis."

Une "catastrophe" pour les préhistoriens

De l'autre coté, il y a le monde des archéologues, très remonté, dénonçant le pillage d'un site archéologique répertorié depuis les années 80 à Tavers. Pour certains spécialistes, ce "trésor" n'en a que le nom. Il s'agit plutôt pour eux d'un dépôt d'objets ayant pris de la valeur car ils ont pu être étudiés.Pierre-Yves Milcent est préhistorien, enseignant-chercheur à l'Université de Toulouse. Il a étudié ces objets gaulois et réalisé des fouilles dans le champ de l'agriculteur de Tavers, en 2014. Pour lui, cette vente aux enchères est impensable. "Cet ensemble d'objets gaulois a été exhumé sans aucun ménagement par deux personnes qui n'avaient aucune autorisation," déclare-t-il. "Pour nous, c'est une catastrophe. Nous perdons des informations sur le contexte de la découverte, sur la façon dont les objets étaient disposés. Nous ne pouvons pas faire l'apologie de telles conditions de découvertes. Je ne peux que déplorer le fait que ces objets ne soient pas déposés dans une collection publique. Pour le moment, pratiquement personne ne les a vu et je ne sais pas qui pourra les voir à l'avenir s'ils sont vendus à n'importe qui."

Les agriculteurs répondent que ces enchères sont pour eux la dernière et seule solution, qu'ils n'espèrent pas en tirer beaucoup d'argent même s'ils ont déjà repoussé une offre d'un musée de région parisienne. Malgré leur volonté de rester anonymes, ils seront bien présents lors de la vente, le 4 mai prochain au Chateau de Meung-sur-Loire, pour voir à combien ce trésor national va partir. Le prix de départ pour ce trésor, vendu en un seul lot, est fixé à 50.000 euros.
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