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Un Coupe-Papier Royal ?

Samedi 19 janvier 2019 à 07h

Cette semaine, Patrick répond à Aymeric commissaire-priseur, car il souhaite connaître l’histoire d’un coupe-papier orné de fleurs-de-lys et d’un porc-épic.



En 496, l’armée de Clovis, Roi des Francs, affronte celle des Alamans à Tolbiac, non loin de Cologne. Mais le combat tourne vite au vinaigre pour nos ancêtres… Clovis tente le tout pour le tout en promettant au Dieu de son épouse chrétienne, Clotilde, de se convertir s’il lui donnait la victoire. Ce fût chose faite ! Peu de temps après, le roi des Francs est baptisé par l’évêque de Reims Rémi, en compagnie de tous ses guerriers, faisant ainsi de sa nation la « fille aînée de l’Église ».

À un Roi chrétien, il faut des armoiries chrétiennes ! De nombreuses légendes racontent comment les trois crapauds de ses armes ont été remplacés par des fleurs de lys. Ici c’est un ermite qui lui aurait donné un nouveau bouclier, l’ayant auparavant reçu d’un ange, là, ce sont ses soldats qui, pour fêter une victoire, auraient brandi des iris jaunes des marais ; dans une autre histoire, les lys proviennent de la forme du fer équipant les lances des Francs ! Quoi qu’il en soit, la forme de la fleur ne variera pas, faisant toujours référence à la religion chrétienne : la partie centrale représente la Foi, soutenue à gauche par la sagesse, et à droite par la noblesse. De plus, la fleur de lys est un symbole de la Vierge Marie. Louis VII est le premier Roi à généraliser son usage au XIIe siècle. À cette époque, les armoiries sont semées d’une multitude de fleurs de lys posées sur un fond bleu, couleur du Ciel où se trouve le Paradis. Charles V, 200 ans plus tard, les réduit au nombre de trois, en référence à la Trinité chrétienne : « Dieu Père, Fils et Esprit ». 1 000 ans après, ces fleurs sont toujours indissociables de la monarchie française.

Le manche du coupe-papier de notre lecteur est ainsi formé de cet emblème millénaire. La fleur de lys est traitée en ronde-bosse et ajourée de fleurons, enroulements et agrafes. Au niveau du talon de la lame est appliqué un ornement amusant : un porc-épic. Je ne vous apprendrai rien en vous disant qu’il est l’emblème du roi Louis XII, dont vous pouvez admirer une statue équestre à l’entrée du château de Blois ! Mesurant 17,5 centimètres de long, il semble malheureusement ne pas être en argent massif mais en métal argenté. En effet, si vous observez la lame avec attention, vous remarquerez que des usures laissent apparaître un métal jaune : du laiton. Ainsi, bien que de belle qualité d’exécution, cet objet n’est pas précieux. Il y a fort à parier qu’il était vendu dans les boutiques de souvenirs des environs du château de Blois à la fin du XIXe siècle.

Justement, entre 1844 et 1871, l’État charge l’architecte Félix Duban de la restauration des appartements royaux de cette résidence… royale ! À la manière de Viollet-Le-Duc, il redonne vie – réinvente même - des décors renaissants tels qu’on les fantasme à cette époque. Il en découlera un goût, une mode, pour les objets de la Renaissance, ou fabriqués dans le style de cette période.

C’est précisément le cas pour le coupe-papier de Patrick. Même si ce n’est pas le propre ouvre-lettres du Roi, cet objet est tout-à-fait charmant et pourrait trouver amateur pour une vingtaine d’euros.
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