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Voyage bon marché

Samedi 05 janvier 2019 à 07h

Cette semaine, Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, répond à Michel, de St-Amand-Longpré qui s’interroge sur la valeur d’un livre de 1913.



Le journal dont Michel nous fait parvenir la photographie de la une est paru il y a 106 ans, jour pour jour, avant l’édition de votre quotidien favori que vous êtes présentement en train de lire. Étonnant non ?! Il ne relate ni l’actualité nationale, ni celle du Loir-et-Cher mais s’occupe de faire découvrir à ses lecteurs les contrées les plus reculées et secrètes de notre planète. À cette époque, il faut environ 6 jours à un paquebot pour relier New-York depuis le Havre. En avion, nous mettons aujourd’hui 8 heures. C’est dire à quel point tout était plus lointain ! Et l’inconnu effraye souvent autant qu’il fait rêver. Et pour rêver, les français de 1913 n’ont que peu de moyens : les récits des explorateurs, les dessins des illustrateurs et de rares photographies. Rien d’étonnant donc que de nombreux journaux ayant pour thème les voyages d’exploration voient le jour au XIXe siècle. Parmi eux le « Journal des Voyages ».

Cet hebdomadaire paraît pour la première fois en juillet 1877. Il naît de l’association entre deux éditeurs : Maurice Dreyfous et Georges Decaux, spécialisé dans l’édition d’ouvrages destinés au grand public. Le Journal des Voyages est d’ailleurs destiné à un lectorat populaire qui le reçoit le dimanche afin de permettre une découverte en famille. Pour l’équivalent de 50 centimes d’euros, l’hebdomadaire offre 16 pages abondamment illustrées en noir et blanc. Les notes de grands explorateurs, tels l’anglais Henry Morton Stanley qui écume l’Afrique, y sont bien souvent enjolivés, voir même parfois et romancés. On dirait aujourd’hui : « inspiré de faits réels ». Et ça marche ! Le journal absorbe même trois concurrents : « Sur mer et sur terre », « Le Monde pittoresque et monumental » et « La Terre illustrée », donnant naissance à une nouvelle formule en 1909. Une des grandes nouveautés est la première de couverture… en couleurs ! Sérieusement concurrencé par « L’Intrépide » qui cible un jeune public, le « Journal des Voyages » paraît désormais le jeudi, jour des enfants. À la veille de la Grande Guerre, l’arrivée de la photographie dans la presse fascine un public désormais tenté de délaisser les illustrations – parfois fantaisistes – qui faisaient le succès de notre hebdomadaire. Sa publication est suspendue en 1915. Le dernier numéro est publié en 1949, mais dépouillé de la gloire qui l’auréolait dans les années 1910.

Michel nous indique posséder un livre. Il s’agit en réalité de l’ensemble des numéros du Journal des Voyages de l’année 1913 que leur propriétaire d’alors a fait relier dans une couverture cartonnée afin de les conserver en bon état pour en profiter longtemps. Nous l’avons vu, les lecteurs de cet hebdomadaire étaient nombreux. Nous ne sommes pas parvenus à connaître le tirage mais il se compte certainement en milliers d’exemplaires. De fait nombre de ces journaux nous sont aujourd’hui parvenus et, avouons-le, n’intéressent plus grand monde, internet n’aidant pas… Ainsi, ne nous pouvons estimer l’ensemble qu’entre 5 et 10 € en brocante.

C’est peu cher payé pour le plaisir de passer une soirée d’hiver à découvrir les coutumes du Nouvel An du vieux Japon ! Gageons que vous ne trouverez pas ce thème sur Netflix…!
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