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Chasse “ So British ” !

Samedi 29 septembre 2018 à 07h

Cette semaine, Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, répond à Mélanie qui souhaite connaître la valeur d’un « tableau signé Robbé ».



Difficile de manquer l’ouverture de la chasse qui, dimanche dernier, s’est faite avec force déflagrations. Pas question de fusils et autres carabines dans l’œuvre que nous soumet Mélanie puisqu’elle représente des veneurs. Ces derniers constituent un type de chasseurs particulier puisqu’ils chassent à cheval, avec une meute de chiens et sans armes à feu. Vous l’avez deviné, il s’agit de la chasse à courre. On chasse de cette façon depuis 600 ans et le nombre de veneurs n’a jamais été aussi important qu’en ce début de siècle ! La France compte environ 400 équipages dont l’incontournable et incomparable équipage au cerf de Cheverny. Le spectacle tant sonore que visuel de la grande vènerie est tout-à-fait fascinant. Rien d’étonnant donc à ce que les peintres aient souhaité le représenter. Dans notre région, vous avez probablement déjà entendu le nom de Karl Reille (1886-1975) qui, à travers ses gouaches, a rendu un brillant hommage à ce patrimoine vivant.

Le style du tableau de Mélanie n’a rien à voir avec le coup de pinceau de Reille. Il ressemble à une illustration d’un livre pour enfants. En effet, les couleurs sont vives, posées en grands aplats. La lecture de la composition est simple, sans chichis. Les personnages, comme les animaux, sont à la limite de la caricature. Voici une œuvre efficace, tout-y-est compréhensible immédiatement. Au premier plan, un jeune garçon pousse la barrière d’un pré pour permettre à la meute de chiens et aux veneurs d’y entrer, libérant ainsi le passage à une diligence en route sur un petit chemin campagnard. Campagne vallonnée et verdoyante qui se dévoile à l’arrière-plan, protégeant de ses coteaux un petit village. Mais, me direz-vous, ce n’est ni le Perche ni la Petite Beauce ! En effet, cette scène se déroule en Angleterre.

Face à une telle œuvre, un œil aiguisé s’écrie : Aldin ! Actif outre-Manche à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, cet artiste animalier possède un solide bagage académique. Il adopte ce style reconnaissable entre mille pour illustrer, souvent avec humour, nombre d’ouvrages cynégétiques mais également des livres pour enfants ou encore des journaux. Lui-même grand veneur, son coup de crayon assuré et sa fine connaissance des animaux font de son œuvre une véritable ode à la chasse à courre.

Mais il y a un hic concernant le tableau de Mélanie : il est signé « Robbé » en bas à droite. Le fait est que ledit « Robbé » est inconnu au bataillon ! Il s’agit probablement du pseudonyme d’un amateur de l’œuvre d’Aldin. Il s’est plu à le copier tout en ayant l’élégance de ne pas faire passer sa copie pour une œuvre originale du maître, autrement dit pour un faux. Quoi qu’il en soit, il n’a pas le talent de l’artiste-chasseur anglais et certaines approximations le trahissent. Difficile pour nous de définir d’après photo si ce tableau de grandes dimensions (1m75 par 70 cm !) est un dessin original réalisé à la plume ou une estampe. Dans le premier cas, nous pouvons, grâce à sa taille et son côté très décoratif, l’estimer de 300 à 500 €. Dans le second, il devrait trouver amateur entre 80 et 100 €.

Dans tous les cas, voici de quoi souhaiter une belle saison à nos chasseurs Loir-et-Chériens !
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