FR
EN

Préface de la XXXe vente Garden party

Lundi 21 mai 2018

Par Stéphane Barsacq

Stéphane Barsacq
Le château d'Artigny
Qui n’a jamais rêvé de la grotte que découvre Ali Baba lorsqu’il déclare : « Sésame, ouvre-toi ! » Qui n’a désiré admirer, comme pour la première fois, des trésors soustraits à la vue, des merveilles inimaginables, des splendeurs nouvelles ? La beauté, sous toutes ses formes, nous indique à intervalles réguliers l’horizon de l’ineffable, ce que Stendhal appelait dans De l’amour « une promesse de joie ». Qu’à cet horizon se joigne la révélation d’un mystère que double une découverte et alors, la joie devient une joie sans bornes. Puisqu’il s’agit de nommer cette sensation, la plus vivace, la plus fugitive, la plus frémissante aussi, cette joie, c’est celle que nous procurent depuis tant d’années Philippe Rouillac et, depuis plusieurs saisons, Aymeric, son jeune fils, si ouvert à ce que d’autres ne voient pas, faute d’un sixième sens, de cette antenne magique propre à capter les ondes les plus secrètes.

Combien de fois ai-je pensé à la scène du conte en me réjouissant ce qu’ils découvraient ? Par leur faculté à mettre dans le mille comme à mettre le doigt sur ce qui vaut en vérité, Philippe Rouillac et Aymeric Rouillac nous ont mis sous les yeux des chefs-d’œuvre dignes de ceux de la fable rapportée par Antoine Galland : ils leur ont ôté le voile qui les rendait invisibles. Qu’on songe à ces dernières années seulement ! Avec l’assurance d’un sourcier, Aymeric Rouillac a été de révélation en révélation : le coffre de Mazarin, une statue de Camille Claudel, et, cette année, un tableau des frères Le Nain qui fut une double révélation : non seulement celle d’un tableau inconnu, mais celle d’une scène mystique jamais vue. On surprend Jésus, enfant, se recueillir et prier devant les instruments de sa passion future avec une sérénité mêlée de gravité. C’est qu’il entre dans l’aventure trentenaire des Rouillac, plus que le jeu avec le hasard, le génie de la trouvaille où, pour citer un mot fameux de Picasso, qui sépare les grands des petits, on trouve d’abord, on cherche ensuite.

Ce génie n’est pas si répandu ni si fréquent. Il s’offre au prix d’efforts constants, de recherches inlassables, de travaux quotidiens à qui possède l’œil, et à qui sait user des cinq sens, auxquels il ajoute, pierre de touche de la vérité, la mémoire la plus vive. Car Philippe Rouillac et Aymeric Rouillac savent tout de l’histoire de l’art ; ils sentent tout de son devenir, en évolution constante ; ils travaillent à ne pas se tromper pour ne pas tromper autrui. Ils vont à l’essentiel par intuition du cœur. Puis ils soumettent celle-ci au trébuchet de la raison. Veut-on savoir ce qui compte, et qui comptera, dans tous les sens ? Leur sagacité a fait ses preuves.

Grotte d’Ali Baba, cabinet de curiosité, musée en devenir, il y a des trésors pour tous les goûts. Le beau est la règle. Mais à ce goût du beau, il convient d’ajouter le sens de la foudre. Rares sont ceux qui vous donnent l’envie de tout sacrifier pour vous consacrer à une nouveauté sans âge qui découvre sa lumière.

Stéphane Barsacq
Inscrivez-vous à notre newsletter :
Suivez-nous :