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Des crêpes avec une cuisinière Godin !

Samedi 03 février 2018 à 07h

Cette semaine, une habitante de Huisseau-sur-Cosson confie à Aymeric Rouillac, notre commissaire-priseur, l’estimation d’une cuisinière Godin.



À peine avons-nous pu digérer la galette des rois qu’il est déjà temps de faire sauter les crêpes pour la Chandeleur ! Fête païenne qui prit une dimension chrétienne lorsqu’un pape décida de distribuer de la nourriture à la foule, la fête des chandelles est aussi synonyme du retour prochain des beaux jours. Cette cuisinière, décrite par sa propriétaire comme de marque « GODIN à Guise, modèle n°880 de 1931 » nous semble toute indiquée pour préparer des crêpes dorées à point. Fonctionnant au bois et au charbon, elle comporte plusieurs fourneaux et un robinet pour l’eau chaude dans sa partie gauche. Elle est émaillée, nickelée et recouverte de faïences à motifs de triskèles et de filets bleus sur fond blanc.
L’entreprise Godin est forte d’une histoire bientôt bicentenaire puisque son fondateur, Jean-Baptiste-André Godin (1817-1888) invente en 1840 un poêle en fonte émaillée. Il installe son usine à Guise, dans l’Aisne, en 1846 et fait croître son entreprise grâce à la proximité de l’Oise et la construction d’une voie de chemin de fer. En 1870, il emploie 900 personnes et produit 50 000 appareils par an ! Le secret de sa réussite aura été de mêler innovation technique – emploi de la fonte de fer au pouvoir calorifique plus important que la tôle – et esthétique avec des appareils décorés de motifs leur conférant la qualité d’objets d’ameublement.

Mais Godin est également un entrepreneur soucieux de mieux gérer la vie de ses employés. Constatant une paupérisation des travailleurs avec la révolution industrielle, il adhère dès la révolution de 1848 aux idées socialistes de Charles Fourier. Son projet est utopique : créer un grand bâtiment pour abriter toutes les commodités nécessaires à la vie en communauté de ses ouvriers. Si Fourier appelle son hôtel coopératif le phalanstère, Godin préférera le nom de « familistère ». Le familistère de Guise est donc construit en 1857 pour accueillir les employés de sa société. Leur vie est organisée dans un espace commun devant favoriser l’hygiène et les relations sociales entre les membres de la société. Ce « Palais social » comporte même son école, sa crèche, sa buanderie et sa piscine. L’expérience s’achève finalement en 1968 et le familistère de Guise est aujourd’hui un musée.

L’entreprise Godin existe encore, bien qu’elle ne signe plus ses poêles et fourneaux « Godin & Cie – société du familistère de Guise, Aisne. ». Ses modèles phares restent la cocotte en fonte à la longévité inégalable et le poêle « Petit Godin » qui chacun valent respectivement plusieurs centaines et plus d’un millier d’euros. Le musée de la société Godin à Guise présente une cuisinière à la houille modèle de 1907 qui a pu apparaître dans le film « Germinal » de Claude Berri. Notre cuisinière au foyer mixte charbon et bois peut intéresser des collectionneurs et atteindre aux enchères entre 500 et 700 euros, à condition qu’elle soit en bon état de marche. La photographie semble toutefois indiquer qu’il lui manque sa cheminée et la faïence semble avoir vécu. Les plus beaux modèles sont parfois restaurés, comme le modèle 700D au décor japonisant. Voilà de quoi faire sauter des crêpes avec style !
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