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Une heure d'amour en plus

Samedi 28 octobre 2017 à 07h

La Nouvelle République


Cette semaine, Elisabeth interroge Aymeric Rouillac, commissaire-priseur, au sujet d’une pendule « dans la famille depuis très longtemps ».

Cette pendule est dite « à sujet » car elle raconte une histoire. En bronze doré, elle présente une base de forme rectangulaire reposant sur quatre pieds toupie. Elle accueille le cadran de forme ronde, émaillé blanc, qui s’inscrit dans une borne. Cette dernière est sommée d’une lyre à côté de laquelle est posée une partition que déchiffre un amour jouant du luth. Il se tient debout sur une base de colonne, le pied gauche appuyé sur deux livres empilés. Une frise appliquée sur le devant de la base reprend cette thématique : un arc, un carquois (qui sont les attributs de Cupidon, l’Amour) et un flambeau symbolisant les sentiments ardents se détachent sur fond de branches de rosiers fleuris. Au centre, une couronne de lauriers symbolise l’amour victorieux. Cette pendule, non contente d’égrainer les heures, chante l’amour. Que de romantisme ! Et cela n’a rien d’étonnant.

Les pendules « à sujet » apparaissent sous le règne Louis XVI. Comme sous l’Empire, elles font la part belle aux grands sujets mythologiques, mettant en scène les héros et les dieux de l’antiquité. À partir des années 1820-25, le Romantisme se diffuse et devient à la mode. Les Arts décoratifs suivent le mouvement et s’émancipent peu à peu du diktat de l’école classique : place à l’Amour ! C’est ainsi que des pendules à sujets plus légers se multiplient. L’un des thèmes favoris n’est autre que celui mettant en scène des petits amours affairés à diverses tâches : ici vigneron, là jardinier, forgeron ou encore, bien sûr, musicien ! Attention la mièvrerie guette…

La pendule d’Elisabeth a été réalisée dans le premier quart du XIXe siècle, précisément sous le règne de Charles X. À cette époque, la qualité des bronzes est extraordinaire, ce qui n’est pas tout à fait le cas de la pendule de notre lectrice. Loin d’être grossiers, ses ornements ne sont pas traités avec autant d’égard que ceux des modèles les plus prestigieux. Le cadran qui n’est pas signé, comme les aiguilles, semble avoir été changé. Un seul trou de remontoir est présent : celui du mécanisme. Cela signifie que cette pendule ne sonne pas les heures. De plus, la lyre semble avoir été brisée puis refixée à l’aide d’une soudure à l’étain… une bien mauvaise restauration ! Aussi, des ornements, probablement cassés, sont négligemment pendus à la lyre par un câble… Quant à la dorure elle semble bien fatiguée, probablement par un nettoyage excessif ? Elisabeth a omit de nous donner les dimensions de cet objet qui doit mesurer probablement au maximum 30 cm de haut pour 35 de large. Malgré sa qualité de fabrication et son mauvais état, j’estime cette pendule à l’amour musicien du début du XIXe siècle de 300 à 500 €.

Cette nuit nous gagnons une heure de sommeil - passant à l’heure d’hiver. Quelle chance pour Elisabeth, qui sera bercée en musique par un charmant amour. Quoi de plus doux qu’une heure d’amour en plus ?
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